J'irai jusqu'au bout (Framal)

Chapitre 35 - Un matin

Je me réveille en un vilain sursaut. Ma tête ne me laisse aucun répit. Une petite bosse violette a désormais pris place sur mon crâne.

Je regarde autour de moi avant de réaliser que je suis toujours dans mon salon : je me trouve sur mon canapé, à moitié nue.

Idriss est à cheval entre le sol et la petite place dont il a pu bénéficier à mes côtés. J'ai du le pousser en dehors alors que je rêvais. Ce n'est pas dans mes habitudes de dormir avec un garçon, encore moins ici.

En tout cas, cela ne l'empêche pas de dormir comme un bébé. Un sourire confiant se dessine sur ses lèvres même quand il n'est pas conscient.

La soirée d'hier s'est terminée par une grande discussion sur l'entreprise du disque, j'ai dû m'endormir à ce moment là. Je ne me rappelle plus vraiment des arguments employés par Idriss lorsqu'il parlait de ces artistes vendus.

Par contre, je me souviens avoir trouvé cette nuit...plutôt chouette.

A cette simple évocation, mes joues se mettent, soudainement, à brûler.

Pauvre Lana, va chercher tes médicaments à la cuisine au lieu de glousser comme une adolescente.

Je tente de me déplacer sans écraser mon invité.

Cette tâche est, en réalité, plus compliqué qu'elle n'y parait. Je l'entends grogner quand mon pied cogne contre son bras. Il me rattrape par la cheville et je tombe à la renverse.

-" Putain Idriss ! Ma tête !"

Ses yeux s'ouvrent précipitamment :

-" Merde, je suis désolé. J'avais oublié."

-"T'as de la chance. Je n'ai rien."

Un sourire triomphal se dessine sur son visage :

-" Tu dis que c'est de la chance, moi je dis que c'est du talent."

Je lève les yeux au ciel et tente de me redresser, mais, Idriss me retient :

-"Attends, t'as oublié un truc."

-" Quoi donc ?"

Il ne me répond pas. Toutefois, je comprends le message lorsque sa main vient se poser sur ma cuisse et qu'il m'embrasse.

Ses baisers sont à la fois doux et précipités. Je dois prendre sur moi pour ne pas aller plus loin :

-"Faut qu'on discute un peu de tout ça."

- "De quoi tu parles ? "

Idriss et les sous-entendus...

Ma main commence à faire des allers/retours entre son torse et le mien pour qu'il comprenne de quoi il est question.

La vérité, c'est que je ne sais pas quoi dire.

Quels termes utilisés pour décrire ce qui se passe entre lui et moi ?

Il me regarde interloqué durant quelques secondes. Puis, comme par magie, la pièce semble tomber :

-"Ho..."

Il se gratte la barbe lorsqu'il me répond enfin.

Sa voix est très calme et semblable à celle qui le caractérise lors de ses interviews avec le S-Crew :

-" On se voit régulièrement pour mon affaire... Qui est plutôt déprimante."

C'est certain.

Il marque une courte pause avant de reprendre :

-" Donc, ce serait bien de rendre tout ça, de temps à autre, un peu plus... Joyeux."

- "Plus joyeux...Je vois, en allant au cinéma ou au centre commercial par exemple ?"

Son visage se décompose et ses sourcils se froncent :

-"Très drôle."

-"Ouais, je trouve aussi."

-" Lana..."

Il commence à perdre patiente. Je décide de mettre fin à son supplice :

-"Je suis partante pour rendre tout ça plus joyeux."

Idriss m'ouvre ses bras.

-"Alors viens ici."

Je me colle contre lui et dépose ma tête sur son torse.

Son dos doit le faire souffrir à force de rester allongé sur le sol, mais, il ne s'en plaint pas.

Ma respiration se joint au rythme de la sienne et je me détend petit à petit. Je suis presque endormie quand son téléphone vibre sur la table basse.

Le rappeur y jette un rapide coup d'oeil avant de soupirer et de balancer son Iphone le plus loin possible.

-" Qu'est-ce qu'il se passe ?"

-"Les gars vont m'organiser une soirée pour mon annif. Ils pensent que j'ai 12 ans , tu crois ?"

Je ris. Ses doigts viennent se perdre dans mon dos. Il tapote, avec énergie, contre ma peau.

Il est énervé. Je tente de le rassurer comme je peux :

-" C'est plutôt gentil de leur part."

-" Nan. Je voulais partir loin de Paris, au soleil, m'éloigner de mon quotidien. Des soirées avec les reufs, on en fait tout le temps. "

-"Si tu veux, on peut passer la journée ensemble."

C'est sorti tout seul. Son corps se contracte soudainement. Je pense lui avoir fait peur, mais, il finit par murmurer :

-"Tu veux abuser de moi ce jour là...T'es vraiment une obs..."

Je ne lui laisse pas le temps de finir sa phrase.

-"Mais non imbécile. Je vais te trouver un truc à faire avant ta soirée. Une activité qui n'impliquera pas que nos corps soient dénudés."

-" C'est dommage."

-"La ferme."

Il s'apprête à répliquer lorsque mon téléphone se met, lui aussi, à sonner.

Sauvée par le gong.

- "Allo ?"

J'entends mon interlocuteur se racler la gorge avant de me répondre.

- "Salut. C'est Mekra."

Idriss semble aussi surpris que moi quand il reconnait la voix de son frère.

- "Salut Hakim. Que puis-je faire pour toi ?"

-"Passe-moi mon reuf. Il a pas répondu au SMS du groupe."

Je ris et tend mon téléphone à son petit frère :

-" C'est pour toi."

-" Qu.. Quoi ?"

Ils s'échangent quelques mots. Idriss finit par le saluer et raccroche.

-"Putain, je pense qu'il a capté qu'on s'envoyait en l'air !"

C'est la journée des révélations pour lui.

-"Waw. Bravo Idriss. Il t'en a fallu du temps ! "

Je l'applaudis. Le rappeur croise les bras comme un enfant et fait mine de m'ignorer.

Pourtant, quand je lui propose un petit déjeuner fait maison, il retrouve son sourire et me couvre de baiser.

C'est fou comme il me fait du bien.

On en est presque à oublier ce qui se passe à l'extérieur de mon appartement.

Bande d'imbéciles.