Chapitre 8

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 Chapitre 8 : L'eau, ça rafraîchit

KALLY

Une fois mes affaires récupérées, je montai dans ma voiture et prit mon téléphone portable pour appeler mon frère Jex. Je vérifiai l'heure sur ma montre car je devais lui rendre des comptes à heure régulière. Oui, vous avez bien compris : j'étais sensée donner signe de vie. Jex avait même activé la géocalisation de mon portable. Et si jamais, par un fâcheux contre-temps je n'avais pu le contacter ou si je disparaissais des radars, et bien... il en était fini de moi. Je passerai les prochaines semaines dans ma chambre, privée de tout lien extérieur : pas de téléphone, pas d'ordinateur.

Fallait-il vous rappeler que j'étais majeure ? Cette situation était grotesque et humiliante. Je n'avais nullement besoin d'être maternée de cette façon. Mais que vouliez-vous ? Je n'avais pas le choix.

Je trouvai son numéro dans les appels récents et cliquai sur son nom. Jex décrocha dès la première sonnerie, prouvant qu'il devait être aux aguets, prêt à déclencher l'alerte rouge écarlate si l'horaire convenu avait été dépassé d'un quart de millième de seconde.

C'était à ce moment précis que mon avenir se jouait car vous pensez bien que j'avais développé une stratégie pour éviter de rentrer aux bercails. Et il fallait attaquer directement. Le plan se déroulait en quatre étapes. Tous à vos stylos ! Prenez des notes.

- Salut petit Bidou. [Etape 1 : Donner un surnom ridicule dans le but de titiller votre interlocuteur]

- Kally, arrête avec tes surnoms à la con, répondit-il d'une voix lasse.

- Je reste au centre-ville [Etape 2 : Annoncer clairement votre objectif]

- T'es avec qui là ?

L'éternelle question qui en précédait toute une série ! : « Tu es avec qui, pourquoi faire... et ton amie (remarquez le e à la fin du mot amie) n'a pas de pote ? »

- Toute seule. [Soyez sincère. Votre interlocuteur n'est pas stupide]

- Je t'envoie un prospect. [Réaction anticipée]

Je soufflais d'exaspération. [Veuillez m'excuser, cela m'avait échappé]

- Tu me souffles au nez ? me demanda-t-il d'un ton menaçant. [Notez que l'intonation montait. Mon interlocuteur perdait patience]

- Non, j'ai une mèche sur mon visage, répondis-je. [Etape 3 : Agacer la personne au bout du téléphone]

- Fous- toi de moi. [Remarquez le vocabulaire discourtois. Vous n'êtes pas loin. Tenez bon !]

- J'aimerais être seule mon Bidou. [Mettre une intonation suppliante]

À partir de ce moment, vous passiez à l'étape 4 : l'estocade. Il ne restait que cinq secondes pour que votre « adversaire » lâchât l'affaire.

- Négatif. Tu ne peux pas passer une journée sans catastrophes.

- Ok... [Montrer votre résignation] Au fait, et tes cheveux ? [Parler d'un sujet anodin]

- J'en ai plus, dit-il sèchement. [Décompte : quatre]

- Il faudra te protéger le crâne, tu risques d'attraper un coup de soleil. [Décompte : trois. Penser toujours à son bien-être]

Il grogna et ne répondit pas. Il devait ruminer sa cuisante déculottée.

- Bidou ? [Décompte : deux] Je suis désolée pour hier. Lan était si impressionnant que j'ai pris peur. Et quand il t'a empoigné les cheveux et écrasé la tête sur le plan de travail... Mon dieu ! c'était horrible ! Et puis, ce bruit de tondeuse était insoutenable...

A pretty calamityOù les histoires vivent. Découvrez maintenant