Épilogue

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« I might do some things you don't like,

We all make mistakes, that's just life,

They might say I changed, that's alright »

NF - My Life

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Le 7 août 2018

Dans la petite pièce obscure, une odeur de pourriture émane des aliments laissés à l'abandon à côté de la vaisselle. Le silence, le vide, la froideur, tout ce qui circule dans la salle tels des démons, nourrit le monstre qui grignote avec appétit les derniers espoirs d'un homme.

Assis sur une chaise, Javier Escorne attend le début du feu. Il attend que ce papier, neuf et éclatant de blancheur brûle dans les flammes de l'Enfer. Et lorsque cela arrive, c'est totalement hypnotisé qu'il approche sa main du diable brûlant. Ça commence par chatouiller sa peau. Puis peu à peu, le supportable vient flirter avec l'insupportable. Pourtant, le brun refuse de bouger ne serait-ce que d'un centimètre.

Les dents serrées, il finit le fond de sa bouteille pour endurer la douleur que la brûlure lui procure. Il est peut-être saoul. Il faut dire qu'il a bu sans même s'en rendre compte. C'était vital pour lui. Une gorgée, une autre, puis encore une autre. Sans s'arrêter. Sans pouvoir. Sans vouloir. Mais au moins, son taux d'alcool lui permet de supporter le souvenir des insultes de Julio Martinez, son boss, qui lui a ordonné d'arrêter son petit jeu de « provocation ». Grace à cela, il se sent capable d'affronter les images de son enfance malheureuse que son cerveau malade a décidé de lui envoyer par rafales.

Les autres disent qu'ils ne le comprennent pas. De toute façon, personne ne comprend rien à cette chienne de vie.

Le téléphone dans sa poche vibre, pour la énième fois depuis bientôt dix minutes et coupe Javier dans ses affaires. Sa peau est rouge. Bouillante, elle le pique et le brûle. Presque autant que son cœur.

Dans un soupir, l'homme éteint l'appareil. Parce qu'il s'agit de son portable personnel et non pas du professionnel, il sait que c'est Jésus. Depuis qu'il a arrêté de lui répondre, au beau milieu de leur conversation deux heures plus tôt, son frère ne le lâche pas. La veille, lorsque ce dernier est venu le voir, pour s'assurer qu'il ne déprimait pas trop depuis son licenciement, il n'a pas pu s'empêcher de lui demander s'il avait besoin d'aide.

La vérité, c'est que oui, Javier a besoin d'aide. Mais d'une aide que personne ne pourra pas lui apporter.

L'homme quitte sa chaise pour avancer vers la seule fenêtre de son trou à rat. Pas de rideaux, les stores se sont coincés à mi-chemin depuis une éternité, la moisissure des coins gagne du terrain mois après mois et l'isolation ne cesse de s'affiner... Dehors, la vie se joue de ses nombreux visages. Alors qu'un couple s'engueule bruyamment mais se réconciliera sûrement quelques minutes plus tard en criant son amour mutuel, des mecs les mains dans les poches, la tête basse ou la clope au bec, font les pans sur les trottoirs. Ils se croient beaux. Ils se croient forts. Ils disent aux gens qu'ils sont les seuls à comprendre.

Mais eux non plus ne comprennent rien.

Javier non plus ne comprend pas.

La preuve ? Cela fait plus de deux jours qu'il aurait dû livrer la marchandise qui dort sur son plancher. Deux jours que les clients de Martinez ont fait comprendre leur mécontentement et ont craché sur le Passeur. Deux jours que Javier ne sait pas quoi faire. En soi, les choses ne semblent pas si compliquées. Une livraison reste une livraison. Sauf que l'abruti de métis qui bosse avec lui, a eu la langue trop pendue, si bien que l'affaire est remontée jusqu'aux oreilles des flics.

Campus, Love & Obsession 1 - Double visage (Terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant