« On fait des erreurs mais on préfère rejeté la faute, et on se contentera de dire que l’enfer c’est les autres »
On s'est mis de nouveau à rire jusqu'à ce que j'entende quelqu'un toquer à ma porte. C'était Baba...
- Baba : Benti, fin oukhtek ? (*Ma fille, où est ta soeur ?*)
Je ne savais pas quoi lui répondre, j’avais tout simplement peur... Peur de voir sa réaction lorsque je lui annoncerai que sa fille a pris la fuite, la veille, par ma faute...
- Moi : Pardon Baba, on s’est disputé avec Khadija et…
Je n’arrivais pas à lui dire, comment lui expliqué ?
- Baba : Et quoi ? Qu'est c'qu'il s'est passé ? Sra chihaja a3liha ? (*Il lui est arrivée quelque chose ?*)
- Jibril : Khali (*Tonton*), elle est partie
- Baba : Fin mchat ? (*Où elle est partie ?*) Chez sa copine ? Pourquoi tu m'réponds pas Nessma ?
J’étais assise sur mon lit, la tête baissée, la bouche fermé…
- Baba : Jibril, khalina rahm walidik (*Jibril, laisses-nous s'il te plaît*)
En sortant de la chambre, Jibou m’a lancé un regard plein de compassion.
Mon père, lui, s’est rapproché de mon lit. Il s’est mis au même niveau que moi et a relevé ma tête.
- Baba : Benti, dis-moi ce qu'il s'est passé
- Moi : Baba, je suis désolée, j’ai pas réussi à la retenir, je sais que c’est de ma faute. Excuse-moi, s’il te plait, je ne voulais pas que ça se passe comme ça
- Baba : Firaha ? (*Elle est où ?*)
- Moi : Je ne sais pas, elle m’a pas dit, elle a coupé son portable et je n’arrive pas à la joindre… Mais elle est partie, elle a pris toutes ses affaires
- Baba : Pourquoi vous vous êtes disputées
- Moi : Pour des trucs de filles Baba
Comme j’ai honte... Je ne sais pas quoi lui dire et je n’arrive pas à trouver un mensonge assez crédible pour masquer le départ de Khadija...
- Baba : Benti, maintenant, arrêtes d'me prendre pour un con. T'as cru j'ai pas remarqué ce qui se passe ces derniers temps ? Depuis que ta mère n'est plus là, rien ne va plus, ta soeur fais beaucoup de bêtises. Elle n'a pas accepté la mort de ta mère. J'ai essayé de parler avec elle mais elle a la tête dure. Tu veux pas me dire pas me dire a3lash mshat, ma3lish (Tu veux pas me dire *pourquoi elle est partie, pas grave*), je le saurai un jour ou l'autre. Mais, ne dis pas que c'est de ta faute, tu fais du mieux que tu peux. Nessma, je vois tout ce que tu fais pour ta famille, les sacrifices. Jamais, tu vas jouer avec tes copines, tu fais le ménage, le mangé et tu travailles dur à la fac. Ta mère serait fière de toi, ma fille. Tu fais preuve de beaucoup de courage. J'te le dis pas assez mais je t'aime ma fille
Je me suis effondrée dans ses bras, cela faisait un moment que mon père et moi n’avions pas parlé ensemble, mise à part des : « le manger est prêt » ou des « pas trop fatigué Baba ? »… On se contentait du strict minimum. Depuis qu’il a perdu sa moitié, il s’est renfermé sur lui-même.
Avant la mort de ma mère, j’étais très proche de mon père. Souvent, il me prenait avec lui pour aller jouer au tiercé et je devais toujours lui lire le journal des courses. Mais ça ne me dérangeait pas, c’était notre petit moment à nous.
- Moi : Choukrane (*Merci*) Baba
Il a séché mes larmes avec sa main puis a déposé un long baisser sur mon front.
- Baba : Arrêtes, ne pleures pas. Matkafish a3la oukhtek, kbira (*T’inquiètes pas pour ta sœur, elle est grande*). Elle sait ce qui est bon pour elle et ce qui ne l’est pas. Je vais envoyer tes frères la cherché et moi je vais voir avec mes copains, peut-être qu'ils l'ont vu... C’est fou comme tu me rappelles ta mère, t’as le même regard qu’elle...
- Moi : Ça te dérange Baba ?
- Baba : Non, au contraire benti... Allez, je vais voir avec tes frères pour Khadija. Vas chercher tes sœurs, il se fait tard
- Moi : D’accord. En plus, elles doivent être épuisées du voyage !
- Baba : Ah celles-là, tu parles ! C’est pire que des piles électriques. Elles m’ont épuisé tout le week-end. J’ai cherché le bouton OFF mais je l’ai jamais trouvé !
Je suis alors descendue pour récupérer mes princesses. En remontant, j’ai croisé Redouane et Jibou dans le hall.
- Moi : Vous allez où ?
- Redouane : Baba nous a demandé d'retrouver la re-sta de Khadija ! Tu sais pas où on peut la chercher toi ?
Cela se voyait qu’il était énervé.
- Moi : Essayes chez sa copine Cindy, mais j'pense pas qu’elle soit là-bas
- Redouane : Cindy du bat **, même son frère c’est Cacheton ?
- Moi : Oui
- Redouane : Ok. Bon Jibou, on décale ? (s’adressant aux jumelles) Les grumeaux, pas de bêtises !
- Jibou : Ouais, j’ai appelé Yass, il va nous rejoindre, on l'attend devant le parking
Ils sont partis et moi, je suis remontée avec les jumelles.
La soirée passait au ralenti. Le temps ne voulait pas avancer, l'attente était horrible. J'ai eu le temps de me faire un tas de scénarios. Je n'avais aucune nouvelle, j'avais beau les appelé, aucun d'eux ne me répondait.
Mon père a fini par aller se coucher, les jumelles s'étaient endormies depuis longtemps.
J'ai passé la soirée à attendre leur retour en espérant qu'ils aient retrouvé Khadija...
Vers minuit, j'ai entendu la serrure de la porte... Fin du suspense, j'allais enfin savoir s’ils l’avaient retrouvé...
- Moi : Vous l'avez trouvé ?
- Yass : Nan
- Redouane : On l'a cherché de partout, on a fait le tour de tous les quartiers mais rien
- Moi : Putain, c'est pas possible ! Vous avez été chez Cindy ?
- Redouane : Ouais un interrogatoire, on lui a fait
- Yass : J'sais pas si elle sait où elle est, mais elle a rien voulu lâcher
- Moi : Ok, il est où Jibou ?
- Yass : Il arrive là, il a été la cherché dans son ancien quartier avec Jalil
- Redouane : Hachek, Ness prépares-nous un truc à graille, j'ai la dalle
- Yass : Ouais, fais beaucoup
Khadija a disparu, et tout ce qui dérange mes frères, c'est le fait que leurs estomacs crient famine. Çela m’énerve, d'autant plus qu’ils ne me questionnent pas sur les raisons de son départ, c'est bizarre.
Je m’attarde pas et je file en cuisine faire la Conchita pour ces Messieurs.
Jibou a fini par rentrer, accompagné de Jalil. Eux non plus, n'ont pas retrouvé Khadija.
Je les ai servis puis je suis retournée dans ma chambre.
En essayant d’esquiver les épreuves, ma sœur a fini par sombrer à son tour dans les torrents de soucis qui ont saccagé nos existences. Elle a pris la décision de fuir, je ne sais où pour ne plus partager les souffrances qui embrassent les siens. Auprès de nous, elle se sentait oppressée...
Aujourd’hui, elle nous a délaissé pour vivre un amour dévastateur avec l’homme qui a su cambriolé son cœur et atomisé ses pensées. Sa part d’ombre a pris le dessus. Elle a su amadoué le peu de lucidité qu'il te restait en te murmurant, tendrement, les cris de détresse que ton cœur avait du mal à dissimuler.
Tu n'as pas su faire taire l’amour qui te rattachait à Soryan, la brute qui, plus d’une fois, a passé ses nerfs sur toi. Tu ne prends pas de drogue mais tu as finis par devenir une Soryanïnomane, camée, toxico, envoutée par ses mots… Est-ce cela le prix à payer pour avoir aimé ? C’est ça qu’on appelle le prix de l’amour ?
Tu recherches l’évasion auprès de ton bien-aimé, tu t’accroches au peu qu’il a su t’accorder. Il te vend du rêve ma sœur, tu n'as pas mis le décodeur et tu es en train de te faire arnaqué par ce dealeur. Il t’as mis de la poudre aux yeux, en te promettant un merveilleux voyage à ses cotés. Tu finiras en épave, pour avoir fait l’erreur d’aimer un magouilleur.
Analyse bien la CAM qu'il te propose avant de périr d’une overdose d’amour car celle qu'il t’offre n’est pas si différente que celle qu'il revend en bas de ses blocs. Une fois injectée, sa poudreuse te fera t’envoler, elle te fera oublier, elle te fera planer mais elle finira aussi par te consumer, te ronger de l’intérieur... Tu deviendras l’esclave de son cœur…
Quelqu’un toque à ma porte...
- Jibou : Ness, tu dors ?
- Moi : Nan, entres
- Jibou : Toujours tes insomnies ?
- Moi : Ouais, toujours mais ça va mieux
On a fait une nuit blanche, à parler comme au bon vieux temps, on s'est remémoré nos souvenirs de gosses, les conneries que l'on a pu faire tous ensemble...
Puis, on a abordé le sujet fragile, la mort de Yemma. Je pensais qu'en parler me ferais du mal mais, au contraire, Jibou a su contenter mes peines avec des paroles réconfortantes, et le fait de m’ouvrir à lui m’a apaisé.
On a ce lien spéciale qui nous unit depuis qu’on est petit. Je ne serais vous l’expliquer mais l'on a toujours été fusionnel, un peu comme des jumeaux.
Malgré les nombreux kilomètres qui nous séparent et la distance qui s’est instaurée ces derniers mois entre nous, rien n’a changé... J’ai retrouvé ce lien, ce frère qui me manquait tant.
On a parlé pendant des heures et des heures de tout et de rien, de la pluie et du beau temps, de nos peines et nos joies… On se devait de rattraper tous ces mois perdus loin l’un de l’autre.
On a finit par être interrompu par mon réveil qui annonçait la fin de cette discussion et le début d’une nouvelle journée.
Jibou m’a promis de venir me chercher à la fac à la fin des cours...
Devant les crises qui pèsent de tout leur poids et face à l'accumulation des difficultés et leur prolongation, seule la persévérance peut faire briller pour le musulman la lumière protectrice contre l'affolement et la guidance qui préserve du désespoir. C'est dire que la patience est une vertu indispensable pour le musulman dans sa vie et sa Foi.
Il doit fonder sur cette vertu et son œuvre et ses espoirs, sans cela il ne serait pas sérieux. Il doit habituer son âme à supporter l'adversité sans lassitude, attendre les résultats même s'ils ne sont pas immédiats et faire face aux difficultés, quelles que soient leur gravité et leur poids, avec un cœur qui ne connaît pas de doute et un esprit qui ne fléchit pas devant les pesanteurs. Il doit rester confiant et ferme. Il ne doit pas paniquer devant une tempête qui apparaît à l'horizon, même si elle est suivie d'une deuxième puis d'une troisième. Il doit rester serein et avoir la certitude que les signes du dégagement de l'horizon finiront par arriver et que la sagesse exige d'attendre ces signes avec sérénité et certitude.
"Celui qui persévère Allah lui donne la patience. Et aucun homme n'a reçu de meilleur et de plus large don que la patience" [ Rapporté par Al-Bukhârî ]