"Toi qui vient de perdre un être cher, qui encaisse sans jamais rendre la monnaie, gère c'est ton cœur qui mange et le temps qui digère."
Alors que je profitais de l'absence de la famille et de l'unique présence de Jibril pour faire un peu de rangement, un cri strident vint rompre ce silence.
-Jibril: NESSMA. TELEPHONE.
-Moi: C'est qui?
-Jibril: Je sais pas il a demandé à parler à un membre de la famille ***** (mon nom de famille)
Je m'empare du combiné.
-Moi: T'aurais pas pu demander hagoune (*imbécile*). Oui Allô
-...: Mademoiselle *****
-Moi: En personne à qui ai-je l'honneur.
...: vous êtes de la famille à Rédouane ******* ?
-Moi : Oui c’est mon frère, il se passe quoi ?
-…: C’est le service des urgences de l’Hôpital Herriot, je vous appelle car votre frère vient d’être transporté dans notre service, il a eu un accident de voiture.
-….:...
-….: Allo ? Vous êtes toujours là ?
-Moi : O..Ouii, il…va b..ien ?
-…. :
Le ciel vient de me tomber sur la tête, je m’écroule au sol le combiné encore à la main j’ai l’impression tout d’un coup de manquer d’air. Je n’arrive pas à réaliser je vais encore perdre un membre de ma famille est ce que je suis condamné à ce que tous les gens que j’aime me quitte un jour ? A ce moment-là je pense à Yemma, je ne m’habituerais jamais à son manque même le temps n’y fait rien. Je sais que c’est Allah qui rappelle nos âmes mais j’aurais quand même aimé la garder encore un peu auprès de moi.
-Jibril : OW Ness, il s’passe quoi là ? Réponds-moi !!
-Moi : C’est Rédouane, je…je c..rois qu..il va mourir
-Jibril : StaghfAllah mais tu racontes quoi toi ?!!!
-Moi : Il… a eu un…accident
-Jibril : Putain !!! il est à quel hôpital ?
-Moi : Hôpital Herriot
Sans plus attendre il m’aide à me relever et machinalement je prends ma veste et mets mes chaussures. Je suis dans la voiture avec Jibril, la route qui nous mène à l’hôpital me semblait interminable, à ce moment précis j’aurais aimé avoir la capacité de me téléporter jusqu’à l’hôpital pour m’assurer que Rédouane allait bien. Durant tout le trajet je ne cessais d’invoquer intérieurement Allah de me laisser l’occasion de revoir mon frère une dernière fois, de lui parler et d’entendre sa voix et surtout de lui demander pardon. Je me sens affreusement coupable de cette situation, je me suis défilée face à son mal-être, j’ai le sentiment que je n’en ai pas assez fait pour lui. J’ai arrêté d’espérer que je pouvais aider mon frère à se remettre debout et à lâcher ses bouteilles d’alcool.
-Moi : J’ai peur Jibou
-Jibril : Ness ça va aller, c’est des épreuves d’Allah Il est juste Il sait ce qu’Il fait faut que tu gardes la foi ok ? On dit qu’Allah éprouve les gens qu’Il aime nan ? Donc c’est qu’Il t’aime c’est le moment de lui prouver que tu peux tenir le coup même dans les pires moments. Allah teste ta foi montre lui que tu peux supporter beaucoup de choses sans flancher et invoque Le souvent. On va tous prier pour qu’il s’en sorte mais faut que tu acceptes que la mort fasse partie de la vie. Tu sais Nessma viendra un jour où on partira. L’important c’est de garder en tête les bons souvenirs.
Je n’ai trouvé rien à redire au discours de Jibril ses mots m’avaient transpercés et me rassuraient sur la conduite à adopter. Je devais m’en remettre à Allah et Lui faire entièrement confiance. Je continuais de regarder Jibou et c’est à ce moment-là que je me suis rendue compte à quel point mon Jibou avait changé. Il avait muri en tout point c’était devenu un homme fort et surtout il s’est assagi avec les années. J’étais heureuse de voir qu’il parlait religion et qu’il plaçait toute sa confiance en Allah. J’étais fière de l’homme qu’était devenu mon cousin et je souhaitais le même chemin à mes frères.
On arrive enfin devant l’hôpital où mon frère a été transporté. Avant même d’avoir franchi le seuil de l’entrée, j’ai les larmes qui coulent à flots. J’ai peur de ce que les médecins pourraient m’annoncer. Je sais que plus rien ne sera jamais plus comme avant.
Jibril m’emboite le pas et me prend par la main, c’est le soutien dont j’ai besoin en ce moment il a parfaitement rempli son rôle depuis qu’il est arrivé chez nous. S’il n’avait pas été là aujourd’hui, je n’aurais pas le courage de faire face aux événements.
Jibril se dirige vers l’accueil de l’hôpital pour demander des nouvelles de Rédouane. Je le suis machinalement, mon corps est présent mais mon esprit est ailleurs comme s’il refusait d’être présent à cet endroit.
-Jibril : Bonjour, on nous a appelé mon zink euh enfin mon cousin Rédouane ******* a eu un accident, on veut le voir.
-La secrétaire : Ecoutez il va falloir patienter, je ne peux pas vous renseigner pour le moment jeune homme.
-Jibril : D’où j’vais patienter moi, j’vous dis que mon cousin a eu un accident on sait pas s’il va bien et vous m’demandez de patienter, c’est une caméra cachée j’espère.
-La secrétaire : Je comprends très bien votre inquiétude, mais je ne peux rien faire pour le moment.
-Jibril : MAIS ZEUBI C’EST QUOI CET HOPITAL, ON VOUS PAYE POUR QUOI AU JUSTE ?!!
-Moi : Jibril c’est bon calme toi, madame s’il vous plait je veux juste savoir comment va mon frère. Je sais que vous êtes débordée mais comprenez nous on est inquiets
Je lui parle calmement en lui faisant mon regard le plus triste qu’il soi. J’ai compris que cela ne servait à rien de placer des mots plus hauts que l’autre avec ce genre de personne et puis mes stages m’ont permis de comprendre le fonctionnement d’un hôpital. Elle me fixe un instant en faisant mine de réfléchir mais je comprends à son regard qu’elle va m’aider.
-La secrétaire : J’vais voir ce que j’peux faire. Prenez place en salle d’attente je viens vous chercher dès que j’ai du nouveau.
Avec Jibril on s’installe dans cette salle d’attente où l’inquiétude et l’angoisse règnent .Les expressions de visage des personnes présentes avec nous témoignent de l’ambiance glauque qui plane au-dessus de nos têtes.
Les minutes semblent défiler comme des heures. Je scrute les aiguilles de l’horloge placardée sur l’un des murs de la salle d’attente en priant pour que le temps s’écoule rapidement et qu’on m’annonce enfin que Rédouane va bien. Je commence à m’agiter et à ne plus pouvoir tenir en place. Une heure plus tard, ou peut-être plus j’avais perdu la notion du temps, la secrétaire m’appelle enfin. Un médecin vient à notre rencontre. Je reste pétrifiée sur place car je vois à l’expression de son visage que les nouvelles ne sont pas si bonnes.
-le médecin : Bonjour je suis le DR Delcour, c’est moi qui m’occupe de votre frère, il a perdu beaucoup de sang mais on réussit à stabiliser son état. Son pronostic vital n’est pas engagé néanmoins il est dans le coma. Nous n’avons aucun moyen de savoir quand il se réveillera c’est une question de semaines ou plus
Le terme « coma » m’a fait réagir, donc mon frère va bien mais il n’est plus conscient de ce qu’il se passe autour de lui ? Et puis le coma personne ne sait combien de temps cela peut durer on va vivre avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête. On va devoir venir le voir tous les jours tout en ignorant combien de temps il resterait dans cet état. Et s’il ne se réveillait jamais au final ? Je commençais à perdre de nouveau espoir et puis je me rappelais de tout ce que Jibou m’avait dit dans la voiture : de l’importance des épreuves. Comment je peux prétendre que je crois en Allah sans lui prouver la fiabilité de ma foi. J’ai alors compris qu’il ne servait à rien de se lamenter sur son sort qu’il suffisait de regarder en dessous de nous pour réaliser la chance que l’on avait. Rédouane est encore parmi nous il n’est pas mort.
Jibril s’est chargé d’annoncer l’accident et le coma de Rédouane à Baba et Khadija, je veux bien être forte mais leur apporter cette nouvelle et regarder leur visage se décomposer était au-dessus de mes forces.
Désormais On vivait tous avec l’idée que Rédouane mettrait peut être des semaines voire plus à se réveiller. On a fini par mettre Yass au courant, Jalil l’avait appelé sur le portable qu’il avait fait rentrer en douce. D’après lui, Yass a littéralement pété les plombs en apprenant que Rédouane avait échappé de peu à la mort j’aurais aimé qu’il soit parmi nous pour vivre cette épreuve j’avais mal de l’imaginer à ruminer sa culpabilité tout seul au fond de sa cellule.
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Deux semaines sont passées depuis qu’on nous a annoncé que Rédouane est dans le coma. Deux semaines que je lui rends visite tous les jours, que je prie Allah l’Exalté de le tenir encore en vie et de ne pas le faire mourir avant qu’il n’ait eu le temps de se repentir. J’essaie de rester forte même si j’ai des périodes de gros doutes où mon moral est au plus bas mais je sais que dans ces moments-là, j’ai le soutien de ma famille. Jihène et Omran aussi sont très présents et prennent des nouvelles de mon frère tous les jours. Jihène est même venue lui rendre visite plusieurs fois je crois qu’elle a en quelque sorte remplacé Sou. Elle me manque énormément j’aurais aimé qu’elle soit présente pour moi dans cette épreuve mais je sais qu’elle a également ses propres problèmes à régler.
Pendant cette période, j’étais en stage dans un hôpital en dehors de ma ville. Une après-midi comme une autre après une nuit de garde, je me rends au chevet de Rédouane qui est toujours dans le coma. Le trajet vers l’hôpital est devenu routinier, il fait partie de mon quotidien maintenant. J’arpente les couloirs de l’hôpital comme si j’y avais toujours vécu, les infirmières me connaissaient à force de me voir tous les jours. Dans les couloirs me menant à la chambre de mon frère, je croise Christine l’infirmière qui s’occupe de Rédouane. C’est une quadragénaire pleine de vitalité, malgré la difficulté de son travail elle est toujours souriante et a ce don de savoir trouver les mots pour apaiser. Ce jour-là en me voyant arriver, elle affiche son plus grand sourire.
-Christine : Nessma, je voulais t’appeler …. Ton frère s’est réveillé ma grande
A peine a-t-elle eu le temps de finir sa phrase que je me suis effondrée dans ses bras en pleurant toutes les larmes de mon corps. Je n’arrivais pas à croire que ce que j’espérais depuis des semaines était enfin devenu réalité. Je ne tenais que pour revoir le sourire de mon frère, entendre le son de sa voix. Allah a répondu à mes invocations. Je l’ai remercié intérieurement de m’avoir laissé mon frère, de m’avoir gardé dans le droit chemin de m’avoir permis de garder foi en Lui.
J’ai dû attendre une bonne heure avant de pouvoir entrer dans sa chambre. Pendant ce temps j’ai prévenu tout le monde que Rédouane était tiré d’affaire. Peu de temps après, mon père est arrivé accompagné de Jibou et Khadija. Mon père a décidé de laisser les jumelles chez Babette, elles ont vécu tellement d’épreuves ces derniers temps qu’il a préféré attendre d’être sûr que tout allait bien pour Rédouane avant de les emmener le voir. Mes petites princesses m’ont impressionnées, elles ont été très fortes même en voyant Rédouane allongé inconscient sur ce lit d’hôpital. Elles lui ont fait des dessins tous les jours depuis l’accident et m’ont dit qu’elles les gardaient jusqu’à ce qu’il se réveille.
Au bout d’une heure d’attente, on a enfin eu la permission d’entrer dans la chambre. On était tous stressés et impatients de revoir Rédouane, j’avais une boule dans le ventre, le cœur qui battait la chamade, les mains qui tremblaient. J’ai passé deux semaines à voir mon frère inconscient branché à des machines et de me dire que maintenant ce cauchemar est derrière nous est un réel soulagement. J’ai l’impression de pouvoir respirer à nouveau.
Lorsque nous sommes entrés, Rédouane était encore un peu dans les vapes, je ne sais même pas s’il réalisait qu’il avait passé deux semaines dans le coma. En nous voyant devant lui, il nous a tous balayé du regard comme s’il nous voyait pour la première fois. Puis j’ai vu une larme couler le long de sa joue. On s’est tous approché de lui pour le serrer dans nos bras.
-Rédouane : Baba, pardonne moi j’voulais pas…
-Baba : Skot weldi (*tais-toi mon fils*), je suis content que tu sois encore parmi nous c’est le plus important pour moi.
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Mon frère se remettait très rapidement de son accident, les médecins avaient décidés de le garder encore une semaine en observation pour être sûr qu’il était apte à sortir. Rédouane a vraiment eu de la chance sur ce coup-là, à part quelques cicatrices et une jambe dans le plâtre il n’a pas eu d’autres séquelles. Pour sa jambe il allait devoir subir quelques séances de rééducation dès sa sortie d’hôpital.
Quelques jours avant qu’il ne sorte, Jihène a insisté pour rendre visite à Rédouane. Elle voulait voir en chair et en os un revenant du royaume des morts. Il lui manque une case à cette fille c’est pas possible.
En arrivant dans le service où était hospitalisé mon frère, on croise Jalil dans le couloir qui apparemment sortait de la chambre de mon frère. Durant toute cette période où mon frère est cloitré sur son lit d’hôpital, je dois avouer que Jalil m’a impressionné par le soutien qu’il a apporté à ma famille. Il a été présent pour tout le monde moi la première il a arrêté de jouer son rôle de skyzo avec moi et avait un comportement presque normal. Parfois, il lui arrivait même de s’occuper des jumelles quand on ne voulait pas les emmener à l’hôpital et que Babette ne pouvait pas le faire. Elles ont sûrement du le rendre dingue mais il ne se plaignait pas.
-Moi : Salam, t’étais avec mon frère ?
-Jalil (froidement) : Ouais
-Jihène : Toujours aussi aimable à ce que j’vois.
Jalil a jeté un regard noir à Jihène qui le défiait elle-même du regard. Je voyais Jalil contenir sa colère, il avait la mâchoire serrée et lui envoyait des éclairs de rage avec ses yeux. Elle n’a vraiment peur de rien cette fille.
-Jalil : Toi t’as de la chance on est dans un hôpital
-Jihène : Ouais ouais, bon Ness j’vais déjà voir Rédouane reste avec le skyzo si tu veux
Elle s’en va en nous laissant dans le couloir je vois Jalil la fusiller du regard, je pense qu’un jour il va l’enlever et la séquestrer quelque part. Il n’a pas l’habitude qu’on lui tienne tête et je sais qu’il devient dingue à l’idée que Jihène se permette de le provoquer de la sorte.
-Jalil : Saha tes fréquentations Nessma, Yass et moi on est de PD ? On parle dans le vent c’est ça ?
-moi : C’est bon elle est cash mais c’est pas une mauvaise fille.
-Jalil : Azi t’sais quoi toi aussi tu m’soules
Voilà c’est le retour de Jalil le skyzo, je savais bien que sa gentillesse de ces derniers temps était plus que suspect. Sa vraie nature de skyzo est revenue au galop. Je ne cherche pas à comprendre et je me dirige en direction de la chambre à Rédouane. En arrivant dans la chambre, Jihène s’est mise à l’aise et quand Rédouane me voit il a eu l’air soulagé.
-Rédouane : Ness c’est qui cette go ? J’vais la jeter par la fenêtre
-Jihène : J’aimerais bien savoir comment tu vas faire avec ta jambe dans le plâtre shabi (*mon pote*)
-Moi : Qu’est ce qui se passe ?
-Rédouane : La go j’la connais même pas elle m’a croqué le veau-cer en deux minutes, elle m’a demandé (en imitant Jihène) « c’est comment dans l’au-delà ? T’as vu une lumière blanche avant de tomber dans le coma » elle est ouf ta shab Ness
En entendant ça j’ai éclaté de rire et connaissant Jihène elle devait être très sérieuse quand elle lui a posé la question. Les gens qui ne la connaissent pas peuvent être très déstabilisés par elle mais dans le fond c’est une personne gentille et surtout très naïve mais c’est cette naïveté qui l’a rend attachante.
-Jihène : Ben quoi, c’est la première fois que j’rencontre quelqu’un qui sort du coma moi, j’pose des questions normal quoi
-Rédouane : Sah Ness tu l’as trouvé où la celle ?
-Moi : Mais qu’est-ce que tu racontes, c’est Jihène elle est en cours avec moi en plus elle est déjà venue à la maison
-Jihène : Ness t’es sure qu’il souffre pas d’amnésie ton reuf, si j’étais son médecin j’lui ferais passer un scan pour vérifier.
On est resté une bonne partie de l’après-midi avec Rédouane, finalement il s’entendait bien avec Jihène, ils n’ont pas arrêté de se chercher et se lancer des pics exactement comme le ferait deux potes qui se connaissent depuis le berceau. Moi je regardais mon frère et j’étais heureuse de constater qu’il se remettait de l’accident car sincèrement j’ai eu peur qu’il ne soit encore plus aigri qu’auparavant. Mais j’étais contente de voir que cet accident lui a fait l’effet d’un électrochoc et qu’au final il a pris conscience qu’il a été à deux doigts de tout perdre.
Avec Jihène on s’en va lorsque les potes à Rédouane sont arrivés en force dans la chambre. On refait le chemin inverse pour sortir de l’hôpital.
-Jihène : J’vais appeler Kader tu veux qu’on te dépose quelque part ?
-Moi : J’vais voir Omran vite fait donc non c’est pas la peine
Elle me regarde avec son air qui veut tout dire, elle doit déjà s’imaginer des choses complètement fausses.
-Jihène : Omran hein ? Après tu m’dit qu’il y a rien entre vous, remballe tes disquettes cousine
-Moi : J’savais que tu t’en empêcherais pas, c’est un ami sans plus
-Jihène : Un ami qui te regarde avec des cœurs dans les yeux
Je n’ai pas riposté car je savais pertinemment que c’était peine perdue avec Jihène. Je suis sure qu’elle imaginait déjà une superbe love story entre Omran et moi alors que moi-même je ne savais pas ce qu’on représentait l’un pour l’autre. Quoi qu’il en soit, je l’ai laissé attendre Kader, et je me suis dirigée vers le lieu de rendez-vous pour attendre à mon tour Omran.
En l’attendant je révisais quelques cours parce qu’avec l’accident d Rédouane je n’ai pas vraiment eu le temps ni la tête à me plonger dans mes bouquins. Il arrive peu de temps après en voiture, je monte et il se met à rouler. On arrive dans le parc où on a pris l’habitude de venir avec Omran. Nous sommes en plein mois de juillet et le temps est tout simplement magnifique. On s’installe sur le même banc que toutes les fois où l’on se voit, c’est vrai qu’avec Omran j’ai pris mes habitudes. Les évènements de ces derniers temps le départ de Sou l’accident de Rédouane nous ont rapprochés au point qu’il est devenu indispensable à ma vie. Je dois avouer que je ressens des choses que je n’ai jamais ressenties auparavant, je ne saurais comment l’expliquer puisque c’est la première fois mais le fait est que j’ai constamment besoin de sa présence à mes côtés. Plongée dans les réflexions, je n’ai pas remarqué que j’étais en train de le fixer depuis un petit moment.
-Omran : Wesh arrête de me regarder comme ça, j’sais que j’suis beau gosse mais quand même, un peu de retenue mademoiselle
-Moi : T’es nul Omran
Sans que je n’aie eu le temps de comprendre, il saisit mon bras le fait passer derrière mon dos et le tord violemment. Je crois qu’il ne maitrise pas sa force parce que j’ai eu mal mais fierté oblige je ne dis rien. Je me retrouve prisonnière dans ses bras mon visage à quelques centimètres du sien. Je ne comprends pas ce qu’il m’arrive mais j’ai le cœur qui commence à cogner très fort dans ma cage thoracique et les joues qui virent au rouge écarlate.
-Moi : Lâche moi Omran.
-Omran : Non j’veux pas.
-Moi : Allez t’es pas marrant lâche moi maintenant.
-Omran : Ok mais à une condition
-Moi : C’est quoi ?
-Omran : Tu m’fais un bisou et j’te lâche
-Moi : T’es sah là ? Depuis quand les bisous se négocient ?
-Omran : Depuis que c’est moi qui fixe les règles, j’attends Ness
Je cède sous la pression et lui dépose un bisou sur la joue, mes lèvres contre sa peau font frissonner mon corps en entier je suis déstabilisée par cette sensation c’est la première fois que je ressentais une telle émotion. Je commençais réellement à prendre peur face aux sentiments que j’éprouvais pour lui, je ne connaissais rien de tout ça avant aujourd’hui, pour moi c’était un grand saut dans l’inconnu.
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Le temps passe, la fin juillet est là. Rédouane est sorti de l’hôpital et a commencé ses séances de rééducation pour sa jambe. Jibril est toujours à la maison et pour ma part je jongle entre les cours et les stages. Cet été pas de vacances pour nous, on est coincés dans nos tours de béton. Mais le plus important pour moi est d’être entouré des miens peut importe l’endroit dans lequel je me trouve. Ce qui me rend encore le plus heureuse c’est de savoir que Yass sort de prison dans quelques jours…
Selon Abou Horaïra, l’Envoyé de Dieu (bénédiction et salut soient sur lui) a dit : « Celui qui s’est rendu coupable d’une injustice vis-à-vis de son frère doit s’acquitter envers lui dans ce monde sinon il n’y aura ni dinar ni dirham au Jour de la Résurrection. Qu’il règle ses comptes avant qu’on ne lui enlève de son actif une bonne action pour son frère, et s’il n’en possède pas, qu’on retire de mauvaises actions de son frère pour les porter à son passif.»
(Rapporté par Al-Boukhari).
Et Allah est plus savant.