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« Persuader d’avoir du vécu, chacun pense posséder le monopole de la souffrance. On arbore fièrement nos cicatrices et on aime à rappeler à quel points nos vies sont triste et cruelle. On est le nombril du monde et tous prétende avoir grandi à l’ombre du bonheur. »



Là, Mr Jalil se leva brusquement, frappa contre sa tête et dit : « Putain je suis con. Désolé, j'avais oublié »

Comment oublié ? Moi je ne peux pas oublié que tu nous as quitté Yemma. Je ne t'oublierais pas... Jamais... Le jour où mon esprit cessera de penser à toi, c'est qu'Allah m'aura rappelé à lui.


Un tsunami de haine vient d’envahir les parois de mon corps. Ses paroles ont eu, sur moi, le même impact qu’une arme à feu. Ses mots m’ont touché à bout portant. La phrase qu’il a expulsé de son canon a abattu mon être. Les vibrations, austères, de sa voix ont transpercé l’oreille interne de mon cœur, fusillé par tant d’hostilité.

Pourtant, aucune larme ne vient parcourir mes joues… Je me suis faite la promesse que plus jamais elle ne coulerait et ce ne sont pas les paroles d’un égoïste comme Jalil qui réussiront à faire apparaître des perles hors de mes pupilles.
Et puis même si je l’aurais voulu, je n’aurais pu. Ma carapace empêche mes larmes de couler, elle a trouver un subterfuge. Elle les a juste fais dévié en larmes intérieures, abreuvant les plaies de mon cœur... Et maintenant, c’est mon âme qui pleure.

- Moi : T’a pas le droit Jalil, comment tu peux oublier ? J’te méprise pour c'que tu viens de dire. T’es qu’un gros batard !

J’me suis relevée et j’ai craché un mollard à ses pieds puis je suis partie.

Mais, ne pensez pas qu’avec Jalil, cela soit si simple que ça. Il a trop de fierté pour se laisser insulté comme ça.

J’étais en train de monter les marches quand j’ai senti que mon corps basculait contre mon gré en arrière. Je me suis retrouvée plaquer dos au mur, une fois de plus. Jalil se tenais face à moi, ses mains maintenaient mes épaules.

- Jalil : Plus jamais tu refais ça, t'as compris ?

- Moi : Sinon quoi ? Tu vas me défoncer, c’est ça ? Bah vas-y, fais-toi plaisir !

Il me regardait droit dans les yeux... Tout ce que je peux vous dire, c’est que son regard m'a terrorisé, mais impossible de baisser les yeux face à lui.

- Jalil : J’ai envie de te défoncer Ness, tu sais même pas à quelle point tu m’montes le seum là !

- Moi : Pff... T'as vu c'que tu viens d’me dire toi ? Imagine la rage que j’ai moi !

- Jalil : Elle te manque ?

Je pense qu’il aime me voir souffrir. Je ne pouvais pas répondre, aucun son ne voulait sortir. Je me suis juste contentée de baisser la tête, j’observais mes pieds quand j’ai aperçu une larme tombée sur le sol ! Je ne l’ai pas senti coulé mais elle a réussi à s’échappé de mon corps.
Sans que je ne puisse faire quoi que ce soit, mes larmes se mirent à couler à flot. Je n'arrivais plus à m’arrêter, j’étais en train de suffoquer.
Le trop plein que j’avais accumulé, resurgissait maintenant. L’intérieur de mon être est détruit, je me sens oppressée, comme si l'on m’empêchait d’inspiré l’air qui m’entoure, je ne suis plus maitre de mon propre corps.

J’me déteste. Pourquoi ? Pourquoi ? Je suis si faible, pff ! Une promesse intérieure qui s’est vite envolée. Mon âme pleure, je l’entends scander le doux prénom de Yemma, il fulmine dans chaque parcelle de mon corps. Tu es dans toutes mes pensées…

Après un court instant d’absence, je réalise enfin que Jalil est en train de me porter. On se dirige vers le parking, plus précisément, vers sa voiture. Il m’installe, puis prend place à son tour sur le siège voisin.

On roule, je ne sais pas où l'on va mais je vois les immeubles défiler à toute vitesse sous mes yeux.
Il avait ouvert les fenêtres de la voiture, ce qui fait que je sentais le fluide gazeux qui constitue l’atmosphère, remplir mes poumons à nouveau. Une brise d’air frais qui agit sur moi, comme une gomme qui effacerait mes larmes…

- Jalil : Ça va mieux ? 

- Moi : Oui 

Il avait arrêté la voiture, on était devant une épicerie.

- Jalil : Bouge pas de là, j’en ai pour 5 minutes

- Moi : Nan mais Jalil…

Je n’ai pas eu le temps de finir ma phrase qu’il était déjà dehors. Il est fou lui, j’comprends pas ce qu’on fait là.

Il a fini par revenir avec un sac à la main.

- Jalil (en me tendant le sac) : Tiens

- Moi : Jalil, ramènes-moi stp, je vais me faire tuer par mes frères s’ils me voient pas à la maison ou en voiture avec toi !

- Jalil : Waah... Comment tu casses la tête toi. Tranquille, tes reufs ils sont même pas là, respire grosse

- Moi : Nan mais y’a pas de respire, j’ai pas envie d’être là, donc ramènes-moi

- Jalil : Vas-y, prends dans le sac là, y’a des trucs pour que tu t'soignes et passes-moi la teille-bou d’Oasis

- Moi : Mais t’es sourd ou quoi ? Je veux rentrer Jalil

- Jalil : Tu keaff mon blaze ou c’est comment ?

- Moi : Excuse Mr *******, c’est mieux la ? Bon maintenant ramènes-moi !

- Jalil : T'as enfin compris c’était quoi la puissance mais j’te ramène pas pour autant. On doit jacter toi et moi, maintenant ta gueule

On s’est plus adressé la parole, je ne sais pas ce qu’il attend de moi mais ça me fatigue de le contredire, donc je préfère me taire.

On a roulé pendant une quinzaine de minutes, puis il a finit par couper le contact et descendre de la voiture. On était dans un espèce de parc.

Bon si je voulais rentrer chez moi, fallait que j’aille lui parler, j’ai finis par descendre à mon tour.
Il était posé sur une barrière en bois, j’me suis installée à coté de lui mais personne ne parlait. Je me suis mise à penser à tous les évènements qui nous avaient détruits... La mort de Yemma, la descente aux enfers de mes frères, la rechute de Khadija…

- Moi : C’est là que tu ramènes tes putes ?

- Jalil : Nan, pas besoin d’aller aussi loin pour ce vider les couilles

- Moi : Pff, t'es vraiment qu’un gros porc !

- Jalil : Ness, je sais que tu me détestes. Je vois bien le regard que tu portes sur moi, le vert de tes yeux me méprise. J'te comprends. Pour toi, j'suis le sale type qui a fait sombré ton frère. Mais, saches que contrairement à c'que tu penses, ton frère je l'ai aidé... Ouais, j'lui ai évité bien des galères. Tu penses que je l’ai mis dans le biz parce que je suis une raclure, mais si je l’ai fait rentré dans ce terrain de merde c'est pour vous, pour votre famille... Pour toi, tes sœurs, ton frère et ton père.

Il s’est arrêté de parler, s’est levé, puis a shooté dans un caillou. Il me tournait le dos.

- Jalil : Je sais ce que c'est de perdre le pilier de son cœur, la personne qui porte tout le monde à bout de bras. Moi aussi j'ai perdu ce pilier et fallait bien quelqu'un pour nourrir la miff nan ? Bah quand votre mère est décédée Allah y rahma, j'me suis senti obligé de prendre ton reuf sous mon aile... Ouais, pour toi, je l'ai détruit en lui faisant connaître les vices de la rue, les règles de la street (*rue*) mais dis-toi bien que s'il fait ça, c'est uniquement pour vous. Il veut pas que cette cité vous pourrisse de l’intérieur

Jalil, le thug de la tess, avec son apparence de gangster qui deale la mort en bas de nos tours... J'me suis bien trompée et, sur le moment, je me suis sentie juste trop conne. Je l’ai haïs du plus profond de mon cœur, en pensant qu’il avait détruit Yass, alors que, lui-même, est dépassé par les évènements. 
Comme je m'en veut de l'avoir jugé sans connaître les vraies raisons.

Je me suis juste contentée de l'observer, je n'sais pas pourquoi mais j'étais bloquée, mes yeux ne voulait pas arrêter de le fixer.

- Jalil : Me regardes pas comme as là

- Moi : Désolé 

J'ai baissé mon regard.

Après ça, plus personne n'a parlé pendant une bonne dizaine de minutes.

- Jalil : Vas-y, j’te ramène, il est tard

Le trajet du retour s’est fait en silence, il m’a déposé devant ma tour.

- Jalil (en me faisant un clin d’œil) : T’inquiètes, Yass et Redouane sont en soirée 

- Moi : Ah ok, merci Jalil

Je suis rentré chez moi en pensant que cette soirée était enfin finie. 
Quand j’ai vu mon état dans le miroir de la salle de bain, j’ai pris peur... Un gros coquard avait pris forme sur mon visage, des cernes se dessinait sous mes yeux. 

- Khadija : T'es fière de toi ? J’espère que t’es bien contente, à cause de toi Soryan veut plus m’adresser la parole. J’te déteste, j’te hais. T'as gâché ma vie...




Allah Azawjel dit: Et ne médisez pas les uns des autres; l’un d' entre vous aimerait-il manger la chair mort de son frère mort?

Nessma, ma vie en KilodramesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant