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« La vie est comme ces fruits dont le goût est sucré, puis soudainement amer. Elle n'est ni noir, ni blanche, non elle est beaucoup plus complexe que cela. C'est un remarquable mélange de douces saveurs à d'autres, fortement épicées. Un métissage entre le bien et le mal, entre l'agréable et le détestable. Entre l'acceptable et l'inacceptable, entre le vrai et le faux. Entre l'illusion et la réalité, entre l'espoir et la crainte. »


Je menais mon train-train quotidien jusqu’au jour où…

Il devait être vers les 6 heures du matin, le soleil n'était pas encore levé mais, par la fenêtre, on pouvait apercevoir la lueur de l’aube s’éveiller. J'étais la seule debout à cause de mes insomnies. Ça devait faire trois bonnes nuits que je n’avais pas fermé l'œil.
J'étais en train de préparer le petit déjeuner des petites quand j'ai entendu quelqu’un sonner à la porte. Ça ne pouvait pas être mon père parce qu’il était beaucoup trop tôt (il ne rentre pas avant 7h30 du travail) et puis il n'aurait jamais sonné comme un malade ! Mes frères et sœurs dormaient paisiblement à cette heure-ci. Je n'voyais pas qui ça pouvait être, donc je me suis précipité vers la porte d’entrée.

- Moi (en regardant par le judas) : Oui ?

Quand j'ai vu qui c'était, mon cœur a fait un bond hors de mon corps et c’est la peur qui a envahi celui-ci. Je ne savais pas trop quoi faire, s’il fallait lever ma sœur, mes frères. J'étais complétement perdue et je faisais des sauts sur moi-même ! 

-… : Police, ouvrez !

Je suis partie me réfugier au salon pensant qu’ils allaient finir par partir.
Dans la minute qui a suivi j’ai entendu un espèce de « BOOM », un bruit assourdissant qui s'est répété à plusieurs reprises. En fait, ils étaient en train de défoncer la porte d'entrée ! 

Je n'ai même pas eu le temps de faire quoi que soit qu'une dizaine de policiers avaient envahi l’appartement. Ils se sont éparpillés, il y en avait deux, trois dans chaque pièces. Ils fouillaient de partout, chaque recoin de la maison y est passé.

- ... : Police, mademoiselle, nous allons effectuer une perquisition à votre domicile. Où sont vos parents ?

Je savais même pas quoi répondre, j’étais choquée. Au début, je pensais que j’étais en train de faire un cauchemar. Je me pinçais pour être sûr que je ne m’étais pas assoupie mais la réalité m'a vite rattrapé…

- … : Oh ! Je vous parle. Vous faites bien parti de la famille de ****** Yassine ?

Il a bien prononcé le prénom de mon frère. Ça y est, je suis bel et bien éveillée et, malheureusement, je ne fais pas un mauvais rêve, je le vis. C’est comme s'il m’avait mis une claque en pleine tête... Enfin, ses paroles ont eu le même impact sur moi. Devant lui, je reste de marbre, je vois la scène très clairement, qui défile sous mes yeux, mon corps est présent mais mon esprit est loin, très loin. Je suis impuissante face à ce « spectacle ». Je n’arrive pas à réagir.

- Moi : Euh… Bah…

Khadija est arrivé au même moment comme une furie, en mode pyjama javellisé, cheveux ébouriffés, la haine et la colère pouvaient se lire sur son visage. Elle s’est positionnée devant moi, comme pour me protéger, puis elle s'est mise à regardé l’agent de haut en bas et, avec son air le plus hautain, elle lui a dit :

- Khadija : Je suis la plus grande, mes parents sont absents. Maintenant vous pouvez me dire ce qui se passe ?

- … (en lui tendant un papier) : Madame, tenez la commission rogatoire au nom de ****** Yassine, qui nous autorise à perquisitionner votre appartement.

Elle a pris la commission, la lu en la survolant. Je ne saurais vous dire ce qu’il y avait inscrit dessus, mais à l’expression de son visage, c’était facile d’en déduire que c’était du sale.

- Khadija (s’adressant à moi) : Occupes-toi des petites, préparez-vous comme d’habitude et je vous déposerai en cours. (Au policier) Vous en avez pour longtemps ?

Vu la situation, j’ai pas trop cherché à comprendre et, sans même écouter la fin de leur conversation, j’ai essayé de me frayer un chemin jusqu’à la chambre de mes sœurs. Mais, en passant par le couloir, je n’ai pas pu m’empêcher de jeté un regard noir, qui reflétait bien mon désespoir, en direction de mon frère et ses gros b*****s.

Je lui en veux énormément et, pourtant, j’ai essayé, j’ai tout fait pour qu’on n’en arrive jamais là. Je l’avais averti, il savait que ça allait bientôt tomber et qu’une épée de Damoclès était posée juste au-dessus de sa tête, prête, à tout moment à enfoncer sa lame. Ce danger constant, qui flottait autour de lui, a fini par infiltré notre demeure. Par sa faute, il nous a tous transpercé. T'as mal évalué le poids de tes actes et, maintenant, t'en payes les conséquences.

Une crainte vient enivrer mon esprit, celle de te savoir mis en cage. Le fait de voir mon frère menotté m’effraie. Son but premier partait d’une bonne intention : protéger sa famille. Pour nous, c’est son destin qui s’enlise. J’ai beau faire la fille forte, que rien ne m'atteint, je ne suis encore qu’une enfant apeurée et dévastée par les évènements qui sont en train de se produire.
J’aimerais tant leur hurler qu’il se trompe de personne, que mon frère est un homme bon, qu’ils ne le connaissent pas, qu’ils ne savent pas pourquoi il a agit ainsi, qu’il n’est pas coupable mais seulement victime de notre malheur et que toutes ces conneries, il les a faites pour nous sortir de cette impasse. 
Par notre faute, tu finiras incarcérer dans la solitude des peines et des drames.

Quand je suis rentré dans la chambre des jumelles, je les ai trouvé réveillées. Elles étaient en train de se préparer. 
Malgré leur jeune âge, elles ressentent les choses même si elles ne comprennent pas forcément.

- Moi : Mes amours, vous êtes déjà réveillées ?

- Sofya : Bah oui. Ness, on a entendu du bruit et y’a des madames qui sont venues nous parler !

- Nahla : Oui et Khadija, elle nous a dit qui fallait qu’on se prépare et que des gens jouer à la chasse au trésor dans la maison, alors on se dépêche pour aller jouer avec eux.

Mes sœurs pensaient que les policiers était des personnes qui jouait à la chasse au trésor ! Si seulement elles savaient qu’en faite c’était Yass, le gros lot. Je ne pense pas qu’elles mettraient tant d’entrain et de joie à se préparer.

- Moi : Sofya, on dit les dames, et non les madames. Khadija a raison, mais vous ne pourrez pas jouer avec eux. Maintenant on se dépêche, vous allez finir par être en retard pour l’école.

- Nahla : Oh, non ! Moi je veux jouer, je m’en fou de l’école.

Elle s’est assise sur son lit et a fait mine de bouder.

- Sofya (en narguant Nahla) : Oh le gros bébé qui boude !

- Moi : Bon stop, Sofya laisses-la tranquille. Nahla, promis ce soir on jouera ensemble mais ce matin on peut pas.

- Nahla (avec une tête de chien battu) : Promis ?

- Moi : Oui Nahla. Dépêchez-vous, faites vos lits je viendrai vous chercher pour déjeuner.

Elles ont sauté dans mes bras et m'ont fait un bisou.

Je voulais aller dans ma chambre mais des flics était occupés à la saccager !

- Moi : Euh, vous faites quoi là ?

- … : Ça se voit pas, mademoiselle ?

Les nerfs me sont montés et j’me sentais obligée de les ridiculiser de la même manière qu’eux l’on fait avec ma famille.

- Moi : Si je vois très bien même ! Mais, vous pensez vraiment que je dissimule des grammes de coke dans mon tiroir à sous-vêtements ?

- …(en se rapprochant de moi) : Mais c’est qu’elle fait la maligne la p'tite !

Redouane a surgit dans mon dos, il m’a décalé et s’est mis face au ** de flics

- Redouane : Bouffon ! C’est à ma sœur que tu parles comme ça ?

- … : Vous vous calmez tout de suite, ou c’est la famille au complet qu’on embarque pour agression sur agent

Putain, pourquoi j’ai ouvert ma bouche !? Je retenais Redouane pour pas qu’il fasse de conneries.

- Moi : Redouane, arrêtes, tu vois pas qu'ils font exprès ! Rentres pas dans son jeu, t'es plus malin que ça (en le foudroyant l’agent du regard)

- Redouane : Fils de p**e ! 

Il m’a éjecté puis est parti de la maison.

-… : (À son collègue) Faut toujours qui fasse les marioles ceux-là. (À moi) Un soucis ?

Il est sérieux lui ? Il est chez nous, à fouiller chaque centimètre de notre demeure et, en plus de ça, il ose nous prendre de haut, en s’adressant à nous comme si on était des animaux. Il nous humilie sous notre propre toit et on doit acquiescer et se la fermer par ce qu’il se prénomme agent de la loi, il pense avoir tous les droits.

Dans cette société si t'as une tête cramé, t’as forcément l’aspect du suspect, l’égalité des chances, la présomption d’innocence n’existent pas. Contrairement aux idéos, on ne nait pas tous égaux. Par respect pour vous, je ne dirais pas toutes les insultes que j’aurais voulu lui balancer à ce gros lard ….

Là c’était trop, ils faisaient tous pour nous pousser à bout avec leurs réflexions et leurs regards de dégout. J’ai préféré prendre les petites et partir, à mon tour. Au début elles n'ont pas comprit mais je leur ai expliqué qu'il y avais trop de monde à la maison donc on allait prendre le petit déjeuner, dehors, entre filles. 
Khadija est restée à la maison en attendant que mon père arrive. Je n'sais pas comment il va réagir face à l’ampleur des conneries de mon frère.

J’ai finit par déposer les filles à l’école et je suis arrivée en retard à la fac. J’ai prétexté une panne de réveil à Sou et Omran mais mon regard en disait long sur mon état. S'il y'a bien une chose que je déteste faire, c’est mentir au gens...Mais je ne me voyais pas leur lancer un : « Hey, salut ça va !? Il fait beau aujourd’hui, vous ne trouvez pas ? Ah oui, au fait, faut que j'vous raconte ! Ce matin, les keufs ont débarqué à la cité et on fait une perquise chez moi ! Tu me prêtes ta règle stp ? » Parfois le silence est d’or.

A la pause j’ai appelé ma sœur pour savoir quelle tournure cette histoire prenait.

- Moi : Oui c’est moi, ils sont partis ?

- Khadija : Ouais, c’est bon, ils ont décampé vers 08h30 !

- Moi : Tant que ça ?

- Khadija : Laisse tomber, ils sont mis le da3wa (*bordel*) et ils se sont barrés ces e*****s !

- Moi : Bref, Yass il est où là ?

- Khadija : Ils l’ont embarqué, il doit faire une GAV de 24h et s'ils ont pas de preuves, il le relâche.

- Moi : In cha Allah

- Khadija : In cha Allah

- Moi : Bon j'te laisse, je reprends là. A toute !

- Khadija : Ok, bisous

Waouh ! Elle vient de me dire « bisous » ? Ce matin déjà j’ai eu l’impression, qu’en se mettant devant moi, elle essayait de me protéger; et là, elle me dit « bisous ». Malgré les épreuves, je crois que je retrouve ma sœur. Son changement n’est pas immédiat mais, graduellement, elle fait sa réapparition…

J’ai essayé de suivre les cours toute la journée mais je n'ai pas réussi. 
Je sais que mon avenir repose sur cette année mais ça serais trop égoïste de ma part de me concentrer sur un futur alors que mon présent est en train de vacillé de tous les côtés. Ma vie est en train de basculé et mes proches s’auto-mutilés. Sombre désespoir qui guette les miens, désormais aussi clair que l’eau de roche. Le bonheur nous nargue et c’est l’opulence de la malchance qui a envahi nos demeures, sans artifice elle a su imposer son odeur, au gout du vice.

Lorsque Yemma a cessé de vivre, elle a emporté avec elle l'âme de notre famille. Yemma, toi qui était notre centre névralgique et l'axe principal de nos cœurs. En ce jour d'adversité, j'aimerais tant que tu sois auprès de nous car seul toi a la clé et connais le secret pour apaiser nos cœurs et faire taire nos malheurs.
Dès notre plus tendre enfance tu nous a appris, à marcher, à parler... tous les actes de la vie quotidienne. En grandissant tu nous a enseigné les règles de base qu'une personne se doit d'acquérir au cours de sa vie, tels que le respect, l'indulgence, ou encore le pardon. 
La seule chose que tu as omis de nous inculqué, par faute de temps surement, c'est de survivre sans toi. Aujourd'hui on se rend compte que ta présence manque, ton absence a provoqué de vives entailles qui ont fissuré nos cœurs. Et, pourtant, on se doit de braver les épreuves de la vie et de rester fort comme tu l'aurais fait Yemma. 



Le Messager d’Allah (que la paix et le salut d'Allah soient sur lui) a dit :
Celui qui est facile à vivre, calme et doux, Allah lui interdit l’entrée en enfer.
Rapporté par Baihaqy et authentifié par Albâny. 

Nessma, ma vie en KilodramesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant