Chapitre 10

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Maison de Tolède, quelques heures après la dispute

               Cette dispute m'a toute retournée. J'arrête pas d'y penser. J'étais aux premières loges quand j'ai vu la cicatrice de Nairobi. Quand je sors de ma chambre je trouve Tokyo sur le pallier. Elle pousse la porte de Nairobi, elle veut sûrement la même chose que moi, comprendre et s'excuser. J'étais entrée dans cette engueulade malgré moi et j'ai été trop loin, j'ai même failli arracher une mèche de cheveux à Tokyo. J'avais à nouveau dix ans. Heureusement, Berlin m'a arrêté et m'a empêché de faire bien pire. D'ailleurs ça fait quelques jours qu'il me fait de l'œil et je pense que cette situation nous a rapprochée. Bref, j'ai quand même besoin de m'excuser.
- Tokyo ? je lance à travers le couloir.
- Hum... répond-elle.
               Elle doit vraiment être vexée pour à peine réagir, en même temps je comprends. Je m'avance vers elle en essayant de faire le moins de bruit possible en marchant. Nairobi me voit arriver et lève les yeux au ciel.
- Et vous êtes à deux... elle est déjà entrain de se coucher. Je veux être seule.
               Tokyo et moi on entre dans sa chambre, une fois dedans je ferme la porte et vais m'assoir sur le lit à côté de Tokyo.
- Je l'ai vu aussi... je suis désolée. J'aurais jamais dû répondre et entrer dans cette dispute, je dis.
- Voila ! Merci ! Vous pouvez partir ! dit Nairobi en se recouchant, mais évidemment on ne bouge pas.
- Il à quel âge ? demande Tokyo.
               Après une grande respiration remplie d'énervement, Nairobi fini par répondre.
- Sept ans. Il a sept ans.
- Où est-il ? je demande. Avec son père ?
- Son père ? Pas avec son père non. Nairobi se redresse et s'assoit. Personne ne sait où il est.
- Il s'appelle comment ? questionne Tokyo, on est entrain de la faire craquer, elle va finir par arrêter de faire la tête.
- Axel. répond Nairobi. Il s'appelle Axel. Ça signifie « hache ».
- Hache ? dit Tokyo.
- Oui. Parce que c'est une hache. Comme ça mère.
               Nairobi se détend enfin et commence à parler plus librement.
- C'est un survivant ce gamin. Il a survécu à tout. C'est le bouchon sur la mer qui ne coule jamais. Il est comme ça. Il avait trois ans quand on est parti de chez ma mère. A cause de son mari qu'il lui filait de l'anisette pour qu'il arrête de pleurer. Je l'ai emmené. Juste nous deux. Pas de famille. Juste lui et moi. Ça se passait très bien. Mais, j'ai déconné.
               Quand elle raconte son histoire, les larmes me montent aux yeux. Elle se reteint elle aussi pour ne pas pleurer.
- Un jour, continue-t-elle, j'allais chercher des cachets à vendre et... Je l'ai laissé seul. Cinq minutes, ça ne devait prendre que cinq minutes. Il a foiré. Avec ce putain de Spider Man... je déteste Spiderman. Il voulait être un super héros, elle soupire en réprimant ses larmes. Il grimpait partout. Même quand on ne le regardait pas. Il est sorti par la fenêtre sur la terrasse.
                  Tokyo pose sa main sur sa bouche, sûrement choquée ou prête, elle aussi a pleurer.
- Il s'est mit sur une chaise et a hurlé: « Maman ! Maman ! », continue Nairobi. Il avait trois ans et demi. Cinq minutes plus tard, il y avait les flics, les pompiers, tout le monde. J'ai été arrêté avec les cachets. Avec mes antécédents, pas de boulot, direct en prison. Mon fils est passé d'une famille d'accueil à l'autre. Et je n'ai eu droit à rien. Pas de visites, pas de téléphone. Rien. Quand je suis sortie de prison, rien. On ne me l'a pas rendu.
- Tu l'as revu ? je demande.
- On me le refuse, répond Nairobi. Mais je sais où il est.
- Ah oui ? dit Tokyo.
- Aux Canaries. Avec une famille qui a un hôtel. Il va bien.
- Tu vas aller le chercher ?
- Je vais le reprendre. Fin de l'histoire. On ira à l'autre bout du monde. Je vais vous dire autre chose, dit Nairobi. Ni moi, ni personne ne foutra en l'air cette mission. Je tuerais tout ceux qui voudront l'empêcher. je ris légèrement, Tokyo s'avance vers Nairobi.
- De tous les plans, dit elle, le tien est le meilleur. Autre chose, elle se retourne et sort une bouteille de son sac. Vous aimez la tequila ?
               C'est là que démarre la première nuit de débauche à la campagne, je dis première car je suis sure qu'il y en aura beaucoup d'autre. Musique à fond, verre d'alcool, twerk. J'ai même enlevé mon soutien gorge en dansant. On ne s'est pas arrêté de bouger. Jusqu'à ce que le Professeur frappe à la porte. C'est une bonne surprise puisqu'on est complément bourrées et entrain de twerker sur le lit. Je suis sur la première à entendre le Professeur, je me retourne vers lui avec un sourire innocent et tape sur l'épaule de Tokyo. Elle se précipite, en perdant légèrement l'équilibre, pour éteindre la musique.
- Il est 4h03, dit le Professeur. Il y a cour demain matin. Sur les plastics.
- Pardon, dit Tokyo en mettant ses mains l'une contre l'autre comme si elle priait.
- Vous devez dormir.
- C'est l'heure du dodo ? je demande.
- Au lit, répond l'homme à lunettes.
- Tout les quarte, demande Nairobi.
- Chacun dans son lit.
- Ce pyjama te va bien Professeur ! dit Tokyo en rigolant.
- Maintenant, puis il sort de la chambre en fermant la porte.
- Bonne nuiiiit ! je crie, mais Tokyo met sa main sur ma bouche en faisant « Shhhh »
               On se regarde toutes les trois et on explose de rire.
- J'adore ce type, répète plusieurs fois Nairobi.
- Vraiment ? Ça ne se voit pas, je dis en tombant sur le lit, morte de rire.
- Vraiment ? Il devrait s'en douter.

Loᥒdrᥱs Dᥱ FoᥒoᥣᥣosᥲOù les histoires vivent. Découvrez maintenant