Chapitre 33

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J'ai envie de hurler mais je n'y arrive pas. Alors que tout le monde aide Moscou, je reste sur le sol, ma jambe en sang. Je comprends qu'ils ne s'occupent pas de la balle que j'ai reçu dans la jambe. Que vaut une jambe comparé à une vie, à celle de Moscou ? Voyant mon état, Berlin me prend dans ses bras et me porte en princesse. Mais je n'ai aucune envie d'être une princesse. Les larmes coulent lentement sur mes joues. Moscou n'est pas encore mort, mais pour combien de temps ? La seule chose à faire c'est ne pas perdre pied. Je laisse ma tête tomber sur le torse de Berlin mais de là où je suis Moscou ne me voit pas, je leve donc la tête vers l'homme qui me porte et lui demande de me reposer près de Moscou. Une fois à terre, j'attrape la main de celui-ci, il me regarde, ne sourit pas, la dose de morphine l'en empêche.
- Moscou. Ça va aller, je dis en pleurant.

Maison de Tolède, deux mois plus tôt.

Comme d'habitude, autour de la table, tout le monde rit. J'ai l'impression d'être dans un rêve, tout va bien, tout est facile. Pendant les trois derniers mois, nous avons créé des liens, même si c'était interdit. Tokyo et Rio, moi et Berlin, Nairobi et son penchant pour le Professeur.
Nous sommes dehors, il n'y a rien de spécial à fêter... ah si ! Mon anniversaire. Aujourd'hui, j'ai 34 ans, ça fait mal. Mais, évidemment, mes amis sont là pour me le faire oublier, mais surtout me faire rire. Cet anniversaire aurait pu être mieux si ma sœur était là. Elle n'a jamais arrêté de croire en moi, c'est bien la seule.
Vers 21h, Moscou sort de la grande maison, un gâteau dans les mains. Autour de moi, je ne vois que des sourires rayonnant. Berlin est assis à côté de moi, je pense que le Professeur sait pour nous, mais restons vigilant. En parlant du Professeur, il a un vrai et grand sourire heureux.
Je souffle mes bougies et tout le monde applaudit.
- Hip hip hip ! crie Denver.
- Hourra ! répondent tout les autres.
Je fais un vœu, le plus beau vœu qu'il met donner de faire, que tout mes amis soient heureux, qu'ils aient se pourquoi ils sont ici, que tout le monde en sorte indemne.

Maison de la Monnaie, 105 heures de braquage.

Je ne sais pas combien de temps j'ai dormi, quand je me réveille je suis dans le canapé de la salle de pause et le téléphone sonne. Dans la pièce il n'y a que Berlin qui se lève et va répondre.
- C'était quoi cette fusillade ? demande le Professeur
- Londres et Moscou on été touché, répond Berlin. Londres a reçu une balle dans la jambe et Moscou trois.
- Où ?
- A l'abdomen. Le fois n'est pas touché. Le reste, je n'en sais rien.
- Ton avis ?
- C'est mal barré, dit Berlin. Moscou ne veut pas sortir. Il veut qu'on termine le tunnel.
- Les serbes sont la. On va creuser de ce côté, explique le Professeur. Je vais trouver ce médecin ukrainien. Sortez le plus vite possible. J'ai été démasqué. La police ne va pas tarder à arriver.
Berlin raccroche et se tourne vers moi. Il a l'air inquiet mais il s'adoucit en me voyant les yeux ouverts. J'ai moins mal à la jambe et j'ai un bandage autour de la cuisse.
- Qu'est-ce qu'il y a ? je lui demande.
- Le Professeur... il a été démasqué. On n'a plus beaucoup de temps.
J'essaye de me lever mais une simple contraction du muscle de ma cuisse me fait souffrir. Andrès se met à genoux devant moi.
- Aide moi à aller en bas, je lui dis. Je veux rester avec Moscou.
- Tu es sûr ? me questionne-t-il.
- Plus que jamais.
Berlin commence à me porter mais je l'arrête en posant une main sur son torse. Je repose les pieds par terre et il me soutient pour que je marche jusqu'à l'entrée, où se trouve Moscou.
- Salut mon ami, je lui lance en m'asseyant près de lui.
- Tu marches ? me demande-t-il faiblement.
- On dirait, comme ça, mais je souffre le martyr.
- Tu es forte.
J'attrape la main de Moscou et y dépose un baiser.
- Ou stupide, je réponds en riant.
Je ne sais pas comment qualifier ce moment. Ce moment que seul Moscou et moi pouvons comprendre, un moment qui n'appartient qu'à nous, à nous deux. Les deux moutons blessés de la bande qui seront à l'arrière quand il faudra fuir. Car nous allons devoir fuir, mais qui restera-t-il pour le faire ? Moscou s'est fait à l'idée qu'il ne pourra pas sortir d'ici, pas en vie. Et une fois que nous serons dehors que restera-t-il de nous, de nos rêves ? Des morceaux, de la poussière. Au fond de moi j'ose espérer que ça sera de la poussière d'étoile.
Après quelques heures, Tokyo nous rejoint. Je crois que j'ai passé la nuit sur cette chaise et maintenant que je suis réveillée j'ai plus mal au cul qu'à là cuisses
Quand Tokyo arrive, Moscou se réveille. Alors qu'ils discutent nous nous rendons tous compte que le pauvre homme est sur le point de nous dire au revoir.
- Berlin, je lance. Il me faudrait une canne.
Il part m'en chercher une et pendant ce temps là, je m'écarte un peu de Moscou pour parler avec Tokyo qui me prend dans ses bras.
- Je suis heureuse de te voir, me dit-elle.
- Moi aussi mais... je prend une grande inspiration. On sait tous se qui va arriver. Et Denver te tiendra pour responsable.
- Et toi aussi.
- Non. Toi. Je suis contente que tu sois revenue. Mais pas ce que ça a engendré.
- Tu crois que je le savais ?! Que je savais qu'il allait mourir ?!
- Bien sur que non ! Mais ce que je crois, et ce que je sais, c'est que Moscou va mourrir parce qu'il voulait te protéger.
Berlin revient avec une canne, il est suivi de près par Helsinki qui a été chercher une poche de sang.
- C'est pas le moment, dit le serbe

14 heures après la fusillade.

Je suis assise en bas des grands escaliers quand Berlin vient me rejoindre, il s'assoit à côté de moi et regarde le vide.
- Pourquoi...? je lance d'une voix faible.
- Il n'est pas encore parti, me répond Berlin.
- Pas encore... c'est fou, j'ai déjà perdu espoir alors que ce n'est pas fini.
Nairobi arrive, l'air paniquée.
- Moscou vous demande, annonce mon amie.
Comment dire non quand c'est lui qui nous appelle ? Je prends ma canne et me dirige jusqu'à l'entrée. Moscou est toujours là, un peu plus pâle à chaque regard. Je m'installe à côté de Tokyo. Je fais de mon mieux pour rester debout, je lui dois bien ça.
- On est là Moscou. Et on ne bouge pas, je lui dis d'une voix douce.
- Tu es debout... dit-il.
Après quelques minutes, c'est Monica et Denver qui arrive dans la pièce. J'ai déjà envie de pleurer. Denver se place face à moi, à côté de son père, sa main dans la sienne.
- Je suis là, papa. Tu dois encore t'accrocher. On va réussir. Pas vrai Rio ? On creuse comme des dingues.
Rio sourit, mais c'est le genre de sourire que tu fais face à une personne entrain de mourir. Le genre de sourire dont Denver a besoin de que seul Rio peut faire.
- On entend les serbes de l'autre cotés.
- Ça va aller, dit Moscou.
- Papa... Quoi ? Quand je t'ai dit que... je te détestais. le jeune homme se met à pleurer. Je ne pourrais jamais te détester. Je ne te déteste pas. Tu as fait ce que tu devais faire. Je ne te déteste pas.
Moscou sourit et regarde son fils avec tellement d'amour, tout l'amour et toute la force qu'il lui reste.
- Monica, appelle-t-il.
- Oui ?
- Je te donnerai 300 millions si tu le garde.
Je souris et Tokyo vient dans mes bras sans que je m'y attende.
- C'est un vrai casse pied. Je l'ai amené ici... mais je vais partir en vacances. Prends soin de lui.
Il bouge doucement sa main jusqu'à la mienne et je pleure doucement en affichant un sourire triste.
- Toi... prends soin de ton bébé.
- Bien sur... je réponds en caressant ses cheveux.
- Ça va être la plus belle chose que tu feras dans ta vie.
- Je te rendrais fière.
Alors que je manque de tomber, Berlin me rattrape et me serre contre lui.
- Messieurs. annonce Moscou d'une voix faible. Je ne suis pas présentée. Agustin Ramos. Ça a été un plaisir.
Il tourne ensuite la tête vers son fils.
- Je t'aime.
- Moi aussi je t'aime papa. Énormément. Je ne te laisserais pas partie. Rio apporte tous les explosifs. Je vais faire sauter ce tunnel.
- Non... répond son père. Si tu le fais sauter, tu nous enterres tous.
- Mais papa...
- Va de l'avant. Et n'oublie pas.
- Quoi ?
- Pas de rétroviseur.
Suite à ses mots, Moscou se laisse partir. Laissant derrière lui un fils et une famille tout entière, mais totalement brisée. Je sais que là où il va, il nous attendra.
Denver prend la tête de son père dans ses mains, et comme dernier hommage, dernier au revoir. Crie son hymne.
- Por la falta de tus labios. Ilore por primera vez. Y maldija conocerte par no dejar de quererte. Yo mi esposa quise hacerter, sin amor ni iba a quedarme. Fui tirando de pistola y el destino trajo muerte. Maria, mi vida, mi amor.
Les images tournent encore en boucle. Moscou et Denver entrain de chanter, danser. Moscou n'était pas vraiment Moscou sans belles paroles, son fils et ses chansons. Toutes ma vie je m'en souviendrais, toute ma vie je me reverrais danser dans ses bras, toute ma vie je verrais son sourire, et toute ma vie je le verrais mourir. Mi vida, mi amor. Au revoir, ou adieu Moscou. Te quiero.

Je pense que je n'ai très clairement jamais autant pleuré en écrivant un chapitre. Qu'est-ce que vous en pensez ?

Loᥒdrᥱs Dᥱ FoᥒoᥣᥣosᥲOù les histoires vivent. Découvrez maintenant