Les guerriers des clans

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« Bien sûr qu'ils ont moins de moyens que nous ! Mais ce qui fait des guerriers des clans des combattants si redoutables est le fait qu'ils soient déjà condamnés. Ils lancent des assauts suicidaires que des braves types avec une famille n'oseraient même pas concevoir. Ça les rend plus dangereux que n'importe quel fusil. Je te le dis mon gars, ne te fais pas avoir, même s'il y en a qu'un seul qui s'avance vers toi avec juste un couteau, n'hésite pas, descend-le. »

Shérif Digger Jones.

***

Avril 2019, quelque part dans l'Alberta, Canada.

La viande commençait lentement à rôtir au-dessus du feu. John Leckner se réjouit d'être parvenu à l'allumer si vite, lui et sa petite troupe pourraient manger un repas digne d'un roi ce soir. Du moins, selon leurs standards. Du bœuf ramené tout droit du sud, de la ville d'Edmonton. La première bidoche non irradiée depuis des mois.

Les flammes orangées baignaient la clairière d'une lueur rassurante, comme si la tombée de la nuit ôtait étrangement l'allure inquiétante de ce paysage meurtri. Au sud, se devinaient les reliefs acérés des falaises artificielles du cataclysme. La lumière blanche de la Lune se reflétaient sur la roche de granite, la faisait presque paraître couverte de neige.

Les mutants s'affairaient au préparatifs du repas et de la veille à venir. Le lieu qu'ils avaient choisi semblait idéal, John le savait. Cette large clairière quasiment dépourvue d'arbres offraient un terrain découvert où une quelconque présence indésirable serait vite aperçue par les veilleurs. Néanmoins, une telle position les rendrait aussi plus facilement repérables par la faune hostile du nord du continent. Aussi, sans se contenter d'un seul feu de camp, plusieurs autres étaient embrasés à intervalles réguliers, en cercle, de façon à protéger les mutants d'une attaque d'animaux sauvages. Une telle méthode était coûteuse en bois, mais ce n'était pas la matière qu'il manquait le plus, et cela valait mieux que la mort de tout le groupe.

Ils n'étaient plus les êtres vivants les plus dangereux de cet écosystème.

John se redressa et s'assura que tous les brasiers étaient bien allumés. La forêt environnante ne montrait aucun signe de mouvement. Parfait.

— Bon allez mes cailles, ça va bientôt être bon pour la viande, venez bouffer! annonça-t-il.

Sa petite expédition d'une dizaine de guerriers accourut comme un seul homme, se bousculant presque comme des enfants dans une joie immature. On croirait presque qu'ils n'avaient pas mangé depuis des années. Le chef de la troupe se réjouit de les voir ainsi. Le sourire n'illuminait pas souvent leurs visages, et ceux-ci, à la lueur du feu, semblaient presque normaux. Comme avant que tout ça ne commence.

John se revoyait emmener sa fille à l'école primaire. Ils remontaient la rue principale de leur petite bourgade, où tout le monde se connaissait et s'appréciait. Ils saluaient Smith l'éleveur de chiens, disaient bonjour à Vince le policier, qui leur répondait toujours d'un grognement désintéressé. Mais cela les amusaient plus que les décourager. Ils passaient ensuite à côté des champs du père Renver, toujours de blé dorés avant qu'il ne décède tragiquement avec sa femme. Sa femme qui concoctait des remèdes à base de plantes qui avaient plus d'une fois sauvé sa petite progéniture en l'absence de médecin. Des gens sympas.

Puis vinrent les étoiles, la blessure et le poison.

Il se revit déposer le corps déformé de sa fille, qui venait d'avoir treize ans, dans un trou qu'il avait creusé lui-même dans son jardin. Tout le monde croyait que c'était contagieux, personne n'avait voulu la prendre en charge, lui assurer des obsèques convenables. Il se remémorait avoir prononcé quelques mots, fabriqué une grossière croix en bois. Et le son de la pelle qui raclait la terre devenue ennemie, qui accablait les vivants et ravissait les morts.

Le Vœu d'être meilleurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant