Alors que je venais de détourner les yeux, quelque chose sur son bureau a attiré mon attention. Semblant s'échapper d'un dossier qui était coincé entre deux livres plus ou moins épais, une feuille de papier imprimé m'a interpellé. J'ai deviné des captures d'écran tirées de Twitter. J'avais reconnu l'interface du réseau social, puisque Jade le mettait sans cesse devant mes yeux. Je me suis approché en silence. Pourquoi Andrew possédait-il donc ce genre de chose dans un dossier ? C'était confus. Je ne sais pas tellement si j'avais le droit de regarder ; en fait, non. Je n'avais pas le droit. Mais je voulais réellement savoir. Et puis, ce n'était qu'une feuille, pas la fin du monde. Peut-être d'ailleurs que ce que j'allais voir me décevrait.
J'ai jeté un coup d'œil à Andrew. Pour moi, il n'y avait aucun risque qu'il se réveille : il dormait comme un bébé. J'ai souri, malgré les battements de mon cœur ne cessant de s'accélérer. Puis j'ai dégagé le papier, en prenant garde à ne pas faire tomber les piles de livres qui l'entouraient. Mais je n'étais sans doute pas prêt à lire ça. Je me suis sentis m'embraser. Inconsciemment, j'ai décollé mes lèvres devenues sèches pour laisser échapper ma surprise. Face à moi, écrit noir sur blanc, des publications publiques défilaient : « ce gay de merde, je vais le fumer comme des juifs », « sale pédé », « ferme ta gueule, homosexuel de mes couilles », « LMAO, et après il va passer dans des émissions avec d'autres pédés pour se plaindre », « brûle, sale merde de contre-nature », « tu vas aller en enfer », « tue-toi ». C'était là, je ne rêvais pas. Et j'étais certain que ça ne s'arrêtait pas là. Brusquement, j'ai remis la feuille dans le dossier. J'ai voulu la piétiner, l'arracher ou la brûler tant ma haine était forte. Mais elle ne m'appartenait pas. Et si Andrew tenait ça dans un dossier, c'est qu'il y avait sans doute une raison. Quel genre de sous-merdes pouvait écrire des conneries pareil ? J'ai serré fort les poings, à m'en faire mal. Je voulais taper dans les murs, bien que ça ne me ressemblait pourtant pas. Comment allais-je pouvoir agir comme si de rien n'était, à présent ? J'ai senti mon cœur déchirer ma poitrine, mon souffle se faire plus bruyant, plus aigu. Alors je suis sorti pour rejoindre ma chambre. Je devais me calmer.
J'ai saisi mon inhalateur en tremblant pour le porter à ma bouche. J'ai appuyé dessus peut-être deux fois avant de m'écrouler sur mon lit, visage dans l'oreiller. Je l'ai serré fort. Je devais me calmer. Puis j'ai compris que le seul moyen pour y parvenir, c'était Andrew. Lui, si paisible dans son sommeil. Lui et ses cheveux d'or. J'avais besoin de lui.
Alors j'y suis retourné. Je n'ai pas regardé le tas de feuilles. Je suis allé directement le rejoindre. Je me suis assis sur le bord du matelas moelleux et l'ai observé. Il était beau et doux. J'ai senti ma respiration se faire plus régulière. Puis ma main a effleuré son thorax, sa peau nue. Elle est remontée le long de son cou pour parvenir à sa joue. Il avait chaud, et moi aussi.
Je me suis levé du lit, ne voulant pas le déranger. Par terre, à ses pieds près de la table de chevet blanche, je me suis assis en tailleurs ; croisé mes bras sur le matelas. Andrew a remué, et j'ai eu un mouvement de recul. Il a respiré bruyamment avant de se tourner finalement vers moi, les yeux clos. Je l'ai observé, silencieusement. J'ai détaillé du regard chacune de ses mèches blondes relâchées devant ses paupières qui bougeaient de temps à autre pour je ne sais quelle raison. Peut-être qu'il rêvait. Du bout des doigts, j'ai caressé ses cheveux. Ils étaient doux, fins. Je les aimais comme je l'aimais lui. Comme j'aimais ses lèvres aguicheuses, pas moins tendres que du velours, et humides.
Alors que je le regardais, je me suis mis à imaginer ce qu'il pouvait se cacher sous cette peau. Dans son cœur. Ce qu'il avait traversé. Comment diable avait-on pu le traiter de la sorte ? Les insultes ne quittaient pas ma tête et n'étaient pas prêtes de le faire. Le pire dans tout ça, c'est qu'il les avait écoutées, prises en compte. Absorbées. Elles l'avaient transformé. Voilà le putain de résultat du harcèlement.
J'ai coincé ma tête à l'intérieur de mes bras, comme si c'était un échappatoire à toutes ces conneries. La vérité, c'est que je venais de réaliser à quel point Andrew avait été mis en miettes par la faute de salopards. Et je ne l'avais pas compris quand il avait essayé de m'expliquer. Je pensais sincèrement que c'était facile, de tourner la page après ça ? J'étais loin du compte. J'ai eu terriblement envie de m'excuser auprès de lui. J'en avais besoin. Et lui, il méritait d'aimer et être aimé. Je crois que c'est la seule chose que je gérais à peu près. L'amour. Ce gros mot fascinant.
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Hey, petit message pour vous dire que c'est vraiment dur d'écrire sur le harcèlement. J'ai peur de dire des bêtises, d'en faire trop ou pas assez, que léonard ait une réaction inapproprié. Qu'il ne se pose pas les bonnes questions... tout ça. Si vous avez des suggestions de modif(s) n'hésitez pas à m'en faire part dans l'espace commentaire :) bonne nuit, Faust. x
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Les pièces de théâtre ne se lisent pas
RomanceQuand il apprend avoir obtenu le bac avec mention, Léonard est fou de joie. Il peut enfin réaliser son rêve : partir un mois à Londres dans une famille d'accueil. C'est ce que lui avaient promis ses parents. Parler anglais, c'est sa motivation. De...