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Quatre jours sans nouvelles. Autant dire que je me sens con. Je me suis emballé trop vite. Comme j'ai besoin de m'occuper l'esprit je me rends chaque soir à la soupe populaire.

Ramón ne vient plus depuis quelques temps. Ça m'inquiète mais j'ai beau interroger les sdf avec qui il avait pour habitude de traîner, personne ne l'a vu, ne sait quoique ce soit. Il a disparu purement et simplement. Et s'il lui était arrivé quelque chose ? Il est peut-être malade quelque part sans possibilité d'être secouru. Demain je vais contacter les hôpitaux, les foyers alentours. Me voilà à imaginer le pire. Ce mec est seul. Sans personne à se préoccuper de son sort.

Les pensées les plus tristes s'accumulent dans mon esprit, prennent toute la place. Pff, je traverse une mauvaise passe là. Il faut que je me ressaisisse avant que mes démons recommencent leur œuvre d'auto-destruction. Je sais qu'il ne manque pas grand-chose pour que je replonge. J'ai honte de me sentir si faible en ce moment.

Il y a beaucoup de monde encore ce soir. Il fait froid dehors, les gens cherchent un peu de chaleur, de réconfort. Les difficultés quotidiennes ne cessent de s'accroître et voir tout ce dénuement m'écœure chaque jour un peu plus. On reçoit des familles entières avec de jeunes, très jeunes enfants. Comment pouvons nous laisser toutes ces personnes à la rue ? Sans rien même pas l'espoir d'un lendemain meilleur. Une nouvelle fois j'ai honte de mon statut de privilégié dans ce monde qui en laisse tellement en marge de la société.

En plein milieu du service, tous les regards se tournent vers l'entrée. Quelqu'un, dont on ne peut voir la tête, rentre les bras chargés d'une multitude de jouets. L'effervescence gagne autant les enfants présents que les adultes.

-J'ai besoin d'aide s'il vous plaît !

Je reste interdit, immobile. Cette voix. Au fur et à mesure de l'aide qui est apportée je distingue la personne qui se cache derrière tout ces paquets. Orlane. Elle vient faire plaisir aux enfants mais pas que... Son sourire, ses yeux pétillants. Elle illumine cet endroit. Tous autant que nous sommes la regardons avec émerveillement. En même temps qu'elle, la gaité a fait son entrée. Y a pas à dire, c'est un ange.

-Tu vois je t'ai dit de ne pas la lâcher. Cette fille c'est une promesse de bonheur au quotidien. Laisse pas passer ta chance, me dit Pierre.

Elle invite tous les enfants à la rejoindre dans un coin de la pièce. Elle s'est assise à même le sol avec tous les jouets étalés autour d'elle. Une douzaine de gamins, des paillettes dans les yeux, s'agglutinent près d'elle. Ils s'assoient et Orlane commence la distribution. Des cris de joie de la part des enfants retentissent. Les parents regardent la scène de loin avec les yeux embués. L'émotion est présente dans la salle. Après avoir embrassé la joue d'Orlane en guise de remerciements les enfants se précipitent vers leurs parents pour montrer ce précieux présent. Quand chaque gamin en a reçu un, un bénévole l'aide à mettre ceux qui restent de côté dans les vestiaires. Je ne suis pas sûr d'avoir fait le moindre pas, le moindre geste depuis qu'elle est rentrée. Une chose est certaine c'est que je ne me suis pas trompé sur la personne qu'elle est. Généreuse, altruiste, bienveillante et ... et elle me plaît. Elle me plaît tant que c'en est douloureux pour ma poitrine. Mon cœur va finir par la faire exploser. Cam m'a dit que j'étais contaminé. Ouais je confirme, contaminé par l'amour. Ça ne me dit pas quoi faire, comment la conquérir. J'ai peur qu'elle soit juste un mirage et que piouf tout s'envole, disparaisse. En si peu de temps, elle a réussi à bouleverser ma vie.

Après avoir salué plusieurs personnes, elle se met bien en face de moi et m'embrasse. Ses lèvres effleurent les miennes. C'est un baiser léger comme une plume. Je secoue la tête pour me persuader que je ne suis pas entrain de rêver.

-Tu comptes rester les pieds fixés au sol le restant de la soirée ? Parce que j'ai bien l'intention que tu me raccompagnes.

-Tu... mais comment... enfin tu...

-Humhum. Tu peux reformuler ? Je n'ai pas tout compris.

Elle ricane, se moque ouvertement de moi. Elle peut, j'ai l'air ridicule, incapable de bouger, d'aligner plus de deux mots. Au putain Brice reprends-toi.
Elle attrape une de mes mains et m'entraîne dans les vestiaires. Ma veste atterrit dans mes bras.

-Ton service est terminé pour ce soir. Tu n'es d'aucune efficacité de toute façon. Allez, rentrons.

Nous sortons dans la rue non sans avoir reçu un clin d'œil de la part de Pierre. Super discret !

-Mais comment tu es venue jusqu'ici ? Tu ne peux pas venir seule, les rues ne sont pas sûres.

-Rhoo, je ne suis pas irresponsable tout de même. Je suis en stage depuis deux jours et j'ai récolté des jouets avec des collègues. C'est l'un d'entre eux qui m'a déposée ici.

De nouveau ses lèvres se posent sur les miennes et cette fois je réagis. Mes mains attrapent ses hanches et je la rapproche de mon corps. Je vis un rêve éveillé.

-Je suis passée voir mon frère hier soir. J'ai discuté avec Camille. On a parlé de toi. Fallait bien que je fasse le premier pas. Toi tu serais resté me regarder comme un merlan frit encore longtemps sinon. Enfin c'est ce que ton meilleur pote m'a laissée entendre.

-Quel enfoiré !

On éclate de rire tous les deux. On sait bien que je n'en pense pas un mot.

-Allons-y. Je... je te ramène chez toi ?

-Ah non, ce n'est pas ce que j'ai prévu. Euh, disons que j'ai déposé un sac à dos devant la porte de ton appartement. Mais ne vas pas t'imaginer n'importe quoi. Je dors dans la chambre d'amis.

-J'te promets que rien que tes baisers me suffisent. Je n'osais même pas y croire.

-Toi le Dandy, tu te fais timide ? Je ne sais pas quoi en penser.

-Disons que c'est différent. Tu es différente. Avec toi je veux plus. Pas une simple baise.

On se sourit et nous mettons enfin en route.

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Je vous souhaite une très belle année 2020. Que vos souhaits les plus fous deviennent réalité. N'oubliez pas de vivre des moments de légèreté, ceux qui rendent le quotidien plus facile à supporter.
Ne délaissez pas vos amis. Nous avons tous besoin les uns des autres, en toutes circonstances.
Faites de votre vie un rêve permanent.
Nous sommes acteurs de notre vie. Alors viva la vida !!!

L'habit ne fait pas le moine (Tome 3)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant