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Putain quelle journée ! Je n'aurais jamais imaginé ce truc de dingue en me levant ce matin. Pas après toutes les angoisses vécues dernièrement. Pff j'ai la sensation que tout va aller super bien maintenant et je reprends confiance en l'avenir.
Oui, Yannis a trouvé une certaine sérénité. Il a arrêté de rejeter ce qu'il ressentait, ce qui l'effrayait. L'amour a vaincu et il assume dorénavant aimer un homme. Adam. Ils sont fait l'un pour l'autre ces deux-là, c'est une évidence.

Du coup, plus rien ne peut empêcher notre amour à nous, Orlane et moi, de se développer, de passer de chrysalide à papillon. Alors autant dire qu'avec cette journée je suis carrément au firmament. On dirait que je suis monté sur ressort, qu'une force jamais connue m'a investie et que je pourrais gravir des montagnes.

Boosté à bloc je rentre chez moi et prends le temps de commander à manger. Ma Orlane a beau dire qu'elle n'a pas faim, que de moi... elle a un appétit d'ogre. Je parle au niveau culinaire là, enfin pas que.

Plus le temps passe plus je la trouve belle. Ça a toujours été le cas sauf que maintenant que je la connais davantage je suis complètement conquis par sa beauté extérieure comme intérieure. Elle est spontanée, indépendante, ne se laisse pas marcher sur les pieds. Elle aime profondément les gens.

Je la vois avec adoration évoluer auprès des personnes démunies. Elle a de l'empathie mais pas de pitié. Elle cherche toujours le bien-être des enfants. Elle leurs apporte des crayons du papier et ils peuvent passer des heures à faire des dessins ensemble. D'ailleurs ils ont rassemblé et collé des feuilles vierges sur tout un pan de mur du grand réfectoire. Chaque soir les gamins présents participent à ce qui devient une grande fresque très colorée. Comme nous ne sommes pas là tous les jours, c'est avec ravissement que nous en découvrons les transformations à chacun de nos passages. Un soir, en pénétrant dans la salle, nous avons découvert qu'Orlane était représentée au milieu de la fresque. Elle est comme un soleil et transmet sa lumière tout autour d'elle. C'est exactement comme cela que je la perçois. En observant ce tableau, les yeux d'orlane se sont remplis d'eau qu'elle a eu toutes les peines du monde à contenir. Elle ne s'y attendait pas et c'est le plus beau des remerciements qu'elle puisse recevoir de la part des enfants.

Orlane a toujours été heureuse et elle voudrait transmettre un peu de son bonheur à ceux qui viennent se nourrir, se réfugier dans ce local où chaque bénévole tente de donner de la chaleur, de l'aide, de l'écoute. Elle a reçu de tout temps l'amour de ses parents avec qui elle est très proche. Yannis et elle se portent beaucoup d'affection ainsi qu'avec Fauve qu'elle considère comme sa sœur. Elle partage des relations plus ambigües avec l'aîné de la fratrie, Arnaud. Cependant elle ne m'a pas vraiment expliqué ce qu'elle entendait par là.

J'ai souhaité le rencontrer et ce malgré son comportement odieux envers Yannis après sa dernière, ultime ?, tentative de suicide.
Je voulais me faire ma propre opinion et c'est sans à priori que je l'ai invité à dîner chez moi. Quelle erreur ! J'espère ne plus jamais avoir affaire avec ce mec. Hormis le Baron, je ne pense pas avoir croisé pareille saloperie, et je pèse mes mots. Tout au long du repas il a eu des propos déplacés, d'abord concernant Yannis. Il ne l'aime pas c'est une certitude, ça ne lui ferait rien si son frère venait à mourir. J'ai failli m'étouffer en entendant ça. Pour ne pas apprécier Yannis, déjà faut y aller. Mais il a été insultant le traitant de lopette, de sale PD et j'en passe. Je bouillais et prenais sur moi pour ne pas le cogner. C'est la seule chose qu'il mérite. Orlane l'a recadré à de nombreuses reprises et pour sa défense il ne trouvait rien de mieux que répondre « je plaisante ». Comme si on était dupes. Et il a fini par s'attaquer à ma fiker* (*signifie amour en amharique, dialecte officiel d'Éthiopie). Il lui a dit, en ma présence, qu'il la félicitait car elle a trouvé en moi un bon parti, un parfait pigeon parce que je pus le fric. Qu'elle n'aurait pas besoin de travailler, je suis sans doute du genre à garder bobonne à la maison. Elle aurait tout temps de se trouver un amant qui serait plus baisable que moi. Là, j'ai craqué. Pas pour ses attaques à mon encontre, ça franchement j'en ai rien à foutre. Non mais parce qu'il rabaissait sa sœur à une simple femme vénale, pourrie jusqu'à la moelle. Il n'a pas de respect ce type, d'ailleurs je me demande s'il en a pour lui-même. Toujours est-il que je l'ai viré manu-militari de chez moi.
Jamais Orlane ne l'aurait cru capable de penser, de dire de telles abominations. Elle craignait que je puisse croire qu'elle est uniquement intéressée par mon argent. Elle était effrayée qu'il ait réussi à insinuer le doute dans mon esprit. Elle en a été malade toute la nuit jusqu'à vomir. Je ne savais plus quoi faire pour la rassurer. Tout ce que je pouvais lui dire était lettre morte. J'aurais réellement dû lui en foutre une à ce connard.

Après cet épisode et une journée sans recevoir la moindre de ses nouvelles, j'ai fini par la retrouver en larmes dans les bras de son frère. Celui que nous aimons, celui qui jamais ne pourrait partager les idées de leur aîné sur qui Yannis a décidé de mettre définitivement une croix. Ce connard ne cherchant qu'à le détruire. Malgré le fort caractère d'Orlane, il réussi à la déstabiliser. Heureusement que Yannis et Fauve étaient là pour lui expliquer que c'était l'intention d'Arnaud de foutre la merde et qu'il ne fallait pas le laisser gagner. La jalousie le gangrène. Il doit franchement avoir un sacré problème psy.

Et la vie a repris son cours. Nous sommes pleinement heureux. La bande ne cesse de me chambrer. Apparemment j'ai la tête dans les nuages et mes yeux reflètent les étoiles. Ben quoi, je suis heureux, j'ai le droit, non ? Et puis franchement Camille et Vincent, Yannis et Adam... ils ne valent pas mieux sur ce coup.

Et il y a nos étreintes, nos corps à corps, ces moments magiques. Je dois admettre que mon meilleur ami a raison. Baiser et faire l'amour sont deux choses tellement éloignées l'une de l'autre. Pour moi le sexe ayant été un exutoire, faire l'amour avec Orlane prend une dimension cosmique.

Je sors de mes rêveries quand elle pénètre dans l'appartement. Elle a tout juste le temps d'ôter son manteau que je lui saute dessus et l'embrasse jusqu'à en perdre notre souffle.

-Et bien dis-moi ! Quelle entrée ! Toi aussi tu as faim on dirait.

Je ne peux empêcher mes lèvres de s'étendre en un immense sourire.

-Si tu savais la journée que je viens de passer. C'était génial et pour la finir, te voilà.

-Hum va falloir que tu me racontes ça, mais pour le moment si on s'occupait plutôt de nous nourrir l'un de l'autre.

Orlane connaît tout de moi, hormis ma véritable identité. Ce nom que je ne souhaite plus porter. Alors oui, tout à l'heure je vais lui parler de cette journée mais pour l'instant nous avons bien plus important à faire.

Il ne faut rien dire à Cam et Vincent, parce que nous aussi aimons bien le canapé...

L'habit ne fait pas le moine (Tome 3)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant