Je suis allongé dans Mon canapé ! Je suis chez Moi. Chez Moi seul. Mon père a cédé. Ce n'est pas comme s'il avait eu le choix mais quand même, IL A CÉDÉ !!! Je jubile. Cette fois-ci j'ai été le plus fort.
Fini l'internat, fini le château. En contrepartie j'ai des obligations. Oui mais ça me paraît tellement dérisoire par rapport au fait d'avoir mon appartement.
Je vais devoir assister à des galas, à des réceptions. Me tenir correctement en société. Être tout le temps bien sapé. Pour dire les choses telles qu'elles sont, je dois arborer la tenue du parfait bourgeois. S'il n'y a que ça pour faire plaisir au Baron... et puis c'était déjà le cas.
En dehors de cette sphère aristocratique, je m'appelle Brice Rénaut. Personne ne me connaîtra au lycée autrement que par ce nom. Lycée public d'autant plus, parce que pour ça aussi j'ai gagné.
Camille y sera avec moi. D'ailleurs c'est Henri, son père, qui a trouvé l'appartement. Il est dans la même rue que le leur. Évidemment mon père ne sait rien de tout ça. Sinon c'est clair qu'il m'aurait trouvé un logement bien plus éloigné.Ça me paraît complètement dingue. J'ai 15 ans et j'ai mon propre appartement. Comme quoi il est aussi content d'être débarrassé de moi que moi de lui. Il a embauché une personne pour faire les courses, le ménage et me préparer de quoi manger. Elle s'appelle Augustine. Elle doit approcher de la cinquantaine. Elle très gentille. Je lui ai dit que c'est moi qui ferai le ménage. J'estime qu'elle n'a pas à nettoyer après moi. J'ai voulu mon indépendance alors faut que j'assume un minimum. Elle avait peur d'avoir moins de salaire si elle ne faisait pas ce pourquoi le Baron l'a embauchée. Je l'ai rassurée en lui affirmant qu'il n'en saurait rien.
J'ai traversé mon été en passant du temps avec Camille, à aller au ciné, à aménager mon nouveau chez moi. J'ai aussi pas mal flâné. Être enfermé dans un collège ne m'a pas permis de connaître vraiment mon environnement. Parce que malgré le fait que j'allais chez la famille Claudel, on ne prenait pas le risque de se faire voir dans les rues de Paris. Alors, soit on passait le week-end dans le logement à partager de bons moments en « famille », soit on partait dans des endroits où on était sûrs que personne ne nous connaissait. Je ne les remercierai jamais assez d'avoir autant pris soin de moi. Et je sais qu'ils ne vont pas me lâcher. Ils vont garder un œil sur moi, c'est bien pour ça que j'habite si près de chez eux. Ça a un côté rassurant parce qu'il faut bien avouer que je flippe un peu.
Je découvre progressivement les alentours et au gré de mes balades je m'éloigne de plus en plus des quartiers riches. Me voilà tout à coup propulsé dans un univers qui m'est inconnu. Fini les costards, fini les rolex, fini les chaussures vernies, fini les cheveux bien plaqués avec la raie sur le côté. Me voilà dans le monde des classes moyennes, des prolétaires, des smicards, des chômeurs, des sdf, des immigrés... je me sens comme un chien dans un jeu de quilles. Les immeubles, les gens, les fringues, les magasins. Tout est si différent de ce que j'ai toujours côtoyé. Je me retrouve au milieu de la société que mon père exècre. Je passe devant des bâtiments où il y a des encarts qui indiquent tantôt «secours populaire», « resto du cœur », « le refuge »... Si mon père me voyait ici, il en ferait une crise cardiaque.
Camille et moi parcourons ensemble le chemin qui nous mène au lycée Jules Ferry. Waouh, on doit être très nombreux car quand on arrive j'ai l'impression de voir un énorme essaim d'élèves devant les grilles de l'établissement. Dès le départ je remarque que je dénote à cause de mes fringues. Les trois quarts des élèves sont en jean et même ce qui ont des pantalons en toile ne font pas costumés comme moi. J'espère ne pas me faire mettre de côté pour ça. Camille me rassure en me disant que les autres me trouveront sympa, ce qui est l'essentiel, alors le reste importera peu.
Au bout de plusieurs semaines, durant lesquelles mon père n'a pas pris de mes nouvelles, je me sens dans mon élément. Complètement. Les élèves n'ont rien à voir avec ceux du collège. Ici, les milieux sociaux se mélangent. Les gens s'acceptent, s'apprécient ou non mais ne font pas semblant. Ils sont eux-mêmes. Ils n'ont pas de rôle à jouer. Et effectivement mes fringues de gros bourges ne m'ont pas empêché de me faire des amis. Et cerise sur le gâteau, le lycée est mixte !!! Oui je pense que mes hormones se mettent à travailler. Je ne peux pas m'empêcher de les reluquer les filles.
Mes résultats scolaires, tout comme ceux de Camille, sont brillants. Au moins de ce point de vue là mon père ne peut rien me reprocher. Je remplis régulièrement ma part de marché et me rends à des réceptions où le Baron joue les pères modèles en me présentant des personnes qu'il est important de connaître pour graviter dans ce monde, son monde. Celui que définitivement je sais ne pas être le mien. Mais durant ces soirées je fais ce qu'il attend de moi. Je joue à l'arrogant, à l'héritier de grande famille. Non, tous ne sont pas comme ça fort heureusement. Mais mon père est comme ça et il veut que je sois comme lui. Il veut faire partie intégrante des grands, de ceux qui se sentent puissants dans cette société quitte à en piétiner d'autres. Mais pour être grand, ne faut-il pas aussi avoir une grandeur d'âme ? Moi c'est ce que j'aime à penser. Pour moi c'est cette grandeur qui est importante, pas celle de notre portefeuille, pas celle de notre longue lignée aristocratique. Je ne renie pas d'où je viens, pas du tout. J'ai des aïeuls qui ont fait de belles choses, de belles actions, du moins j'aime à le croire. Ce que je renie c'est ce que mon père fait de cet « héritage », ce qu'il voudrait que j'en fasse. Il pense que ça fait de lui un être supérieur, alors ne lui parlez pas des classes moyennes, des pauvres gens qui galèrent pour boucler leur fin de mois. Non, ce monde là, d'où il est il ne le voit pas, il ne veut pas savoir.
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L'habit ne fait pas le moine (Tome 3)
RomantizmCe troisième tome peut se lire indépendamment des autres mais des personnages étant récurrents ce serait mieux. Je suis issu d'une famille de la noblesse où tout est basé sur les apparences, les conventions. Je ne choisis pas mon destin, tout est dé...