Chapitre 5

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Lorsque Galahad s'éveilla, la nuque raide et la joue endolorie d'avoir passé la nuit contre l'écorce d'une racine, Mordred était déjà déjà levé. Petits, les deux garçons s'endormaient et se réveillaient en même temps, leurs corps se coordonnaient pour pouvoir jouer ensemble. Mais depuis qu'ils avaient grandi, Mordred avait changé.  Il se couchait tard et se levait tôt, comme si la nuit et le fait de dormir lui faisait peur. Mordred affirmait que rien au monde ne pouvait lui faire peur, mais Galahad savait très bien cependant qui Mordred craignait de voir lorsqu'il était à la lisière de l'éveil et des rêves, quand deux mondes différents entraient en collision en lui.

Le jeune homme repoussa lentement la couverture qu'on avait jetée sur son dos et tâtonna vers la sacoche pour chercher sa gourde.

-Bonjour ! lança-t-il à Mordred qui s'occupait de seller Fata.

-Oh, bonjour Galli, répondit son compagnon d'un air maussade. Bien dormi ?

Galahad inclina l'outre en peau vers sa bouche pâteuse.

-J'ai rêvé que tu parlais à ta mère, fit-il en se redressant pour s'étirer.

Mordred maugréa vaguement en s'éloignant entre les arbres.

-Ce n'était pas tout à fait un rêve, répondit-il.

Galahad bailla avant de suivre son ami. Mordred ne semblait jamais tout à fait à l'aise, le lendemain des nuits où il voyait sa mère. Il n'aimait guère en parler, alors Galahad ne disait rien, ne posait aucune question, et se contentait de rester silencieusement auprès de Modred, lui montrant simplement qu'il n'était pas seul.

Le jeune chevalier s'approcha de son camarade qui était accroupi dans les herbes folles de la forêt. Galahad se baissa et regarda d'un oeil les mains habiles de Mordred qui examinaient les plantes, les repoussaient, fouillant et cherchant parmi elles.

-Qu'est- ce que tu fais ? demanda-t-il.

Le brun s'arrêta un instant dans son travail pour porter une main vers le médaillon que Galahad l'avait toujours vu porter, du plus loin qu'il le connaissait. Mordred l'ouvrit d'une chiquenaude du pouce pour dévoiler une petite fleur sauvage si morte et flétrie qu'elle tombait presque en poussière.

-Il faut que je change mon herbe de la Saint Jean, celle-là est loin d'être fraîche, ricana-t-il.

Galahad caressa la fleur du doigt avant que Mordred ne referme son médaillon puis croisa les bras sur ses genoux pour l'observer.

-Qu'est-ce que c'est, exactement ? s'enquit-il.

Mordred sembla un instant hésiter tout en continuant ses recherches. Il faisait rarement des efforts lorsqu'il s'adressait aux autres chevaliers mais il avait toujours voulu tout expliquer au mieux à Galahad, surtout lorsqu'il s'agissait des ses croyances.

-C'est... une herbe de fée. Ma mère m'en a toujours fait porter, et je la change environ chaque mois. Elle est magique et est censée protéger contre les maladies et les sortilèges des fées, ou des elfes.

Sa main se referma sur une petite mauvaise herbe aux fleurs mauves. Avec un sourire, Mordred coupa la tige d'un geste sec pour la montrer à un Galahad émerveillé.

-C'est ça, fit-il joyeusement.

Son ami le regarda d'un air rêveur changer la plante de son pendentif. Tant de pouvoir dans une si petite chose l'éblouissait au plus haut point. Dans les histoires que lui racontait Mordred, toute chose et toute créature semblaient regorger de magie dans un équilibre parfait.

Galahad posa sa tête sur l'épaule de son ami alors que celui-ci refermait son médaillon.

-J'adore ta religion, Mordred, murmura-t-il d'un air songeur.

La ballade de   CamelotOù les histoires vivent. Découvrez maintenant