-Pouvez vous vraiment croire à une histoire pareille? pesta Tristan.
Mordred leva les yeux du couteau qu'il aiguisait pour jeter un coup d'œil à Tristan, à quelques sièges de lui autour de la fameuse table Ronde. Il n'avait jamais été très proche de Tristan et Yvain. Les autres chevaliers traitaient habituellement Mordred avec une certaine distance, qu'il leur rendait bien. Mais depuis leur adoubement, les anciens chevaliers avaient décidé de leur attribuer des sièges proches. Comme si, parce qu'ils avaient été adoubés ensembles, les jeunes gens allaient soudain se battre les uns pour les autres jusqu'à la mort. La logique de ses aînés échappait parfois à Mordred. Mais pour l'instant, autant faire semblant de bien s'entendre avec les autres.
-Qu'y a-t-il, sir Tristan ? demanda-t-il d'un ton doucereux.
Tristan, qui avait principalement voulu s'adresser à Yvain, le regarda d'un air surpris avant de reprendre.
-Mon oncle le roi Marc vient de s'éprendre d'une femme dont il a trouvé un cheveux emporté parle vent, déclara-t-il. Il lui a déjà demandé sa main.
Yvain fronça les sourcils.
-Comment sait-il de qui il s'agit ?
-Il ne le sait pas, justement, répondit simplement Tristan. C'est du cheveux qu'il est tombé amoureux.
-Dans ce cas j'espère que sa douce ne sera pas une vieillarde. Ce sont elles qui perdent leurs cheveux, habituellement, déclara Mordred.
Laissant là les jeunes gens, il se désintéressa de leur conversation pour se tourner à sa droite, où Galahad lisait patiemment un rouleau.
-Qu'est ce que tu lis ? demanda-t-il à son ami en sachant déjà que ce serait toujours plus intéressant que les déboires du roi Marc.
Galahad ne releva pas la tête mais un sourire étira ses lèvres au son de la voix de Mordred.
-« Histoire des Empereurs", répondit-il.
Mordred sourit. Galahad et sa passion du monde romain...
-C'est bien ?
-Instructif. Mais pas très distrayant.
Mordred fit du regard le tour de la Table Ronde, où les chevaliers discutaient poliment en attendant l'arrivée du roi. « Instructif mais pas très distrayant" décrivait très bien la scène.
-Tu veux dîner dans mes appartements ce soir ? proposa-t-il. Je pourrai lire Ovide.
Galahad délaissa son rouleau pour lui adresser un grand sourire.
-Peut on dire non à Ovide ? fit-il.
Les portes de la salle s'ouvrirent en grand pour laisser passer Arthur, Lancelot et Perceval. Tous les chevaliers se mirent debout d'un même mouvement et le restèrent tandis que le roi et ses deux meilleurs chevaliers rejoignaient leurs places. Arthur leva la main et les chevaliers se rassirent, prêts à commencer la réunion.
-Mes chers compagnons, bonjours à tous, déclara le roi. J'ai l'honneur de vous annoncer que nos quatre jeunes gens ici présents bénéficient d'un siège permanent à la table ronde.
-Quelques applaudissements se firent entendre, ce qui n'était pas très agréable avec les gantelets métalliques que portaient les chevaliers.
-Et avant de commencer la réunion, peut être le seigneur Galahad voudrait-il nous lire un passage de la Bible ? proposa Arthur.
Mordred roula des yeux. Cette tradition précédent les réunions l'avait toujours ennuyé au plus haut point, mais les chevaliers qui se voyaient confier cette lecture la voyait comme un grand honneur. Galahad hésita un instant avant de pousser un petit soupir que personne ne remarqua et de se lever pour rejoindre le trépied où était posée la Bible de Camelot, enluminée d'or et reliée de rouge.
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La ballade de Camelot
FantasiLa coure de Camelot est a l'apogée de son règne, abritant en son sein les chevaliers les plus glorieux qu'on n'ai jamais connu. Mais certains sont également de drôle d'individus. Parmi eux se trouve Mordred, l'enfant damné, fils de la vengeance et d...