Le Royaume de Nelda

Chapitre 22

Trois jours.

Trois jours s'étaient le temps qui s'était écoulé depuis que j'avais quitté "mon équipe". Trois jours c'était ce qu'il m'avait fallut pour retourner dans les montagnes avec Autumn. Trois jours c'était une délicieuse pause sans mourir de faim et en étant seule avec mon seul compagnon à qui je pouvais accorder toute ma confiance. Trois jours c'étaient aussi de longues nuits constituées de cauchemars et des journée de remords. Trois jours c'étaient trois jours de plus sans souvenir. Mais surtout, trois jours c'étaient tout ce qu'il m'avait fallut pour décider de faire demi-tour.

J'avais passé du bon temps avec Autumn à me reposer dans des clairières baignées de soleil et à me régaler de grillades des proies du griffon. J'avais repoussé du bout des doigts mes pensées qui me grignotaient lentement de l'intérieure. J'avais décidé de me rendre au sommet des montagnes pour voir ce qu'il y avait plus loin et tenter de fuir. Sauf qu'en haut de ces montagnes je n'avais vu que d'autres montagnes jusqu'au bout de l'horizon. Des montagnes, des montagnes et des montagnes. Des hautes où s'accrochaient les nuages éparses, des basses recouvertes d'herbes. Des acérées, des plates, des grises, des ocres. Mais rien que des montagnes à perte de vue. Et alors, même si j'avais espéré en avoir finit avec toutes ces filles, j'avais décidé de faire demi-tour parce qu'il n'y avait rien par ici et que les paroles de Léo tournaient en boucle dans ma tête.

Il me fallait aussi avouer que je n'avais pas rebroussé chemin trop tôt parce que j'avais un certain ego et que je refusais de réapparaître parmi elles comme une fleur. De plus je crevais d'envie de retourner à ma vie d'avant quel-qu'elle soit parce que j'étais persuadée que ça ne pouvait pas être pire qu'ici.

Cependant, au sommet de cette montagne et devant toutes ses semblables je m'étais résignée et j'étais remontée sur le dos d'Autumn pour repartir. Une fois dans les aires j'avais été tentée de fuir au Sud sans m'arrêter vers mes anciennes camarades pour chercher autre chose par là-bas. A vrai dire, même en ce moment, assise sur un rocher près du cours d'eau de la clairière dans laquelle j'avais fait mon départ théâtrale une petite semaine plus tôt, je n'étais pas sûre de ce que j'allais faire. Je pouvais toujours chercher une trace de civilisation plus loin en oubliant toutes ces autres filles. Mais, et si le seul moyen de partir était de réaliser les volontés de ceux qui nous avaient enfermées ici et alors de suivre les consignes du Livre- que j'avais au passage détruit- ?

Je soupirai et fermai les yeux mais l'image d'Al'Velda qui mourrait s'imposa à moi et je les rouvris immédiatement. Depuis que j'étais partie, cinq jours plus tôt maintenant, elle n'avait cessée de me poursuivre dans mes songes et mes pensées, ne me laissant aucun répit. De plus, un jour en faisant ma toilette dans l'eau de l'étang central, j'avais remarqué sur l'espèce d'écran à l'intérieure de mon poignet une modification : j'avais un point de plus dans mon score. Au fil des jours j'avais d'ailleurs fait l'apprentissage d'autres choses ; chaque jour au coucher du soleil, une petite vibration se faisait ressentir le long de mon poignée et je pouvais alors voir défilé le classement des trois premières filles. J'étais pour l'instant la seule à avoir un point et j'étais donc sur la première place. J'en avais conclu que les deux groupes ne s'étaient pas retrouvés ou alors qu'ils m'avaient écoutée et coopéré. Je penchai plutôt pour la première option même si cela m'étonnait qu'en cinq jours il n'ait rien eu d'autre.

Aussi, je ressentais un picotement et mon poignet me transmettait des informations. Par exemple, il y a deux jours de cela, lorsque j'avais fait demi-tour, j'avais vu apparaître sur mon poignet les trois petits mots suivants : Tinna est morte. J'avais attendu toute la journée le couché du soleil pour savoir qui l'avait tuée mais le soir alors que je regardais avec impatience mon poignet, aucun nom ne s'était place près du mien dans le classement. Cette Tinna devait être morte d'une quelconque autre manière que par la main d'une autre fille.