Chapitre 4-1

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krsh krsh krsh krsshh krsshh krsshh krsh krsh krsh

Les mêmes grésillements se répétaient en boucle depuis plusieurs minutes, résonnant dans la chambre d'hôtel sans que personne ne vienne débrancher l'instrument. Lizzie et Thomas dormaient et ce n'est pas ça qui les réveillerait. Ils n'avaient pas si bien dormi depuis de longues semaines.

krsh krsh krsh krsshh krsshh krsshh krsh krsh krsh

Le son se fit encore entendre, mais il fut dépassé par la sonnerie familière du réveil de Thomas. Une main engourdie vient taper dessus pour l'éteindre, puis le jeune homme se tira de ses draps, s'étira et passa un pantalon et un tee-shirt sans faire attention au bruit produit par le transmetteur-radio de Lizzie.

Lorsqu'il eut pris une douche, il prépara deux sandwichs, un pour le dîner de sa petite soeur et l'autre pour lui même. Il fourra le sien dans une sacoche, et s'apprêtait à sortit lorsqu'il entendit le léger grésillement :

krsh krsh krsh krsshh krsshh krsshh krsh krsh krsh

- Lizzie, lança-t-il, tu penseras à enlever les piles de ta radio la prochaine fois !

Il claqua la porte et dévala l'escalier avant de sortir de l'hôtel. Pendant quelques secondes, il profita de la vue que les rayons lunaires offraient des rues de la ville. Il avait toujours trouvé Montpellier assez banale pour une ville du sud, ce n'est que maintenant qu'elle était vidée de ses habitants qu'il en percevait toute la beauté.

Il se mit à courir vers le port. S'il avait bien calculé le bateau devrait être en train d'accoster et il ne voulait en aucun cas manquer ça. Lorsqu'il arriva sur place, il vit le paquebot qui tentait de se frayer un chemin entre les petits yachts échoués les uns sur les autres à cause d'un groupe de jeune qui avaient voulu faire une bataille navale grandeur réelle.

Il retrouva Maria, qui lui apprit que le garçon de cette après midi avait été placé dans un immeuble rempli d'autres jeunes qui s'occuperaient de lui.

- Où sont les adultes ? S'enquit-il auprès de son amie.

- Personne ne les a vus, lui répondit-elle. On dit qu'ils auraient quittés la ville pour remonter vers la capitale. Mais si on en croit d'autres rumeurs, le président lui même serait venu les chercher avec des limousines pleines de nourriture; alors je n'y accorde pas trop d'importances. De toute façon, on dirigeait déjà.

Si Thomas était inquiet de leur disparition, il n'en montra rien. Pendant un moment, ils restèrent côte à côte en silence. Ils regardaient les manœuvres compliquées des petits bateaux qui faisaient débarquer les passagers par quinzaines.

Il entendait les questions des adolescents tout autour de lui, demandant d'ou venaient-ils, pourquoi, ce qui ce passait là-bas... Autant d'interrogations qui resteraient sans réponses tant que les rescapés ne seraient pas à terre. Cependant, un cri surgi de la foule attira son attention.

- Il vient de New York City !

Thomas resta un moment bouche-bée, sans savoir s'il pouvait espérer. Se pouvait-il que Jeff soit dans l'une de ces barques ? Cela paraissait invraisemblable, mais pourtant... Non. C'était impossible. Si un bateau venait des Amériques, il aurait accosté au Havre ou à Saint-Nazaire. Il n'aurait pas traversé le détroit de Gibraltar. Mais pourtant... Thomas espérait.

Maria et lui s'approchèrent des pontons pour voir de plus près. Ils étaient effectivement anglais, et parlaient avec un fort accent américain. Thomas dut se forcer à ne pas sauter de joie lorsqu'il aperçut le visage familier parmi la foule.

- Jeff ! Cria-t-il, par quel miracle est ce que...

Sa phrase fut interrompue lorsque Jefferson se jeta sur lui. Il se mit à sangloter contre son épaule. Il avait les cheveux sales et sentait l'air marin.

- C'était horrible, parvint-il à dire entre deux sanglots. J'ai cru qu'on en sortirait jamais. Des cadavres... des cadavres partout. Tu imagines, toi ? Manhattan recouvert de macchabées. Ça puait la mort.

Comprenant qu'il était en train de complètement perdre les pédales, Thomas l'amena dans une maison ouverte à proximité. La décoration épurée indiquait qu'elle avait appartenu à de jeunes adulte et les meubles recouverts de plastiques arrondis sur les angles qu'ils avaient un ou plusieurs enfants en bas-âge.

Ils s'assirent sur le canapé du salon et Thomas demanda à l'autre de recommencer son histoire depuis le début. Jefferson se calma en parlant.

- Eh bien... ça a commencer lorsque tu m'as téléphoné, il y a environ trois semaines,-Thomas s'en souvenait très bien, c'est à ce moment là que tout est parti en vrille pour lui aussi- j'avais remarqué que les gens paraissaient malades dans la rue. Les rues étaient quasiment vides, d'ailleurs. Et puis -il chercha ses mots un instant- tout le monde est mort. Je pense que ça a été pire aux Etats-Unis, il restait dans la ville moins de personnes qu'il y en avait pour nous accueillir ici. Les cadavres s'amoncelaient de partout et d'autres maladies se répandaient parmi les restants. Quand on a compris qu'on ne survivrait pas dans la ville, on s'est regroupé pour aménager les plus gros bateaux qu'on pouvait. On voulait longer la côte pour atteindre la Floride. C'était un plan qui pouvait fonctionner, mais une tempête a dévié notre trajectoire et abîmé l'un des moteurs. Heureusement que l'un de nous connaissait le morse, on a pu lancer un signal de détresse, tu sais trois courts, trois longs, trois courts, et on a été sauvés par l'équipage de ce bateau. C'est un truc de dingue mais là-dessus ils n'avaient pas été atteints par la maladie.

- Attend, le coupa Thomas, qu'est ce que tu viens de dire ?

- Qu'ils n'avaient pas été touchés, répéta Jefferson, surpris.

- Non pas ça ! Avant, sur le signal de détresse.

- Trois courts, trois longs, trois courts, proposa-t-il.

- Il faut absolument que tu viennes à l'hôtel ! s'écria Thomas en se préparant déjà à sortir, sans même vérifier que son ami le suivait.

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- Alors ? S'enquit-il auprès de l'américain. Qu'est ce que tu en penses ?

Jefferson prit le transmetteur dans ses mains comme s'il s'agissait du Graal. Lizzie, quand à elle, regardait le nouvel arrivant comme s'il remontait d'entre les morts, ce qui d'une certaine façon n'était pas entièrement faux.

- J'en pense que c'est absolument fantastique ! Répondit-il avec enthousiasme. Si on pouvait trouver le moyen de lui répondre, on pourrait peut être l'aider.

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NémésisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant