A l'ombre de ma plume

XXXIII. Comme Une Plume

- Ta chambre est vraiment... Vide. C'est assez surprenant, dis-je en arpentant la pièce.

- J'ai jamais compris le concept de mettre des choses dans une chambre, répond-t-il en s'installant sur son lit. Tu viens juste pour y dormir donc un matelas suffit.

Sa réflexion me fait rire car même si elle me paraît incongrue sur le moment, elle répond en réalité à une logique implacable. Amusée je m'installe à ses côtés.

- Si une chambre sert qu'à dormir, pourquoi tu voulais me la faire voir ?

Je pose cette question d'une voix malicieuse, ce qui fait naître un sourire espiègle sur son visage. Nous échangeons un regard intense résultant d'un savoureux mélange de gêne et de désir. Mon interrogation n'en est pas vraiment une car nous savons tous les deux pourquoi nous sommes ici. Toutefois aucun de nous n'ose l'exprimer à voix haute. La nervosité qui m'assaille me pousse à rire sans raison. Face à mon attitude Dan se joint à mes éclats de rire. L'instant est d'une pureté et d'une simplicité incroyable. Ce sont des moments comme celui-ci que je tiens à partager avec lui. Ces intervalles hors du temps et hors des considérations où plus rien d'autre ne compte que nous.

- Je suis la numéro combien à être invitée dans le lit de Dan Ed ? Je demande en riant.

- Honnêtement ? Je dois t'avouer qu'après cent j'ai arrêté de compter.

Je hausse les sourcils et lui lance un regard plein de perplexité. J'ai du mal à savoir s'il est sérieux ou bien s'il se joue de moi. Face à mon mutisme il poursuit avec désinvolture.

- On s'en fout non ?

- Ça c'est typiquement la réponse d'un mec qui s'est tapé beaucoup trop de nanas !

- Tu surinterprètes mes paroles ma belle. Puis je trouve que tu poses trop de questions, même si je dois dire que c'est une technique habile pour éviter de parler de ton cas. Dis-moi Léo, ajoute-t-il faussement sérieux. T'as eu combien de copains ?

- Je devrais même pas te répondre, mais contrairement à toi j'assume. Dis-je en laissant volontairement un petit silence. Six.

Six. Le chiffre résonne dans mes oreilles et me paraît ridicule. Le sourire que Dan affiche me confirme qu'il est minime par rapport au sien. Gênée je m'allonge sur le dos et fixe le plafond.

- Tu les as tous aimés ?

Je ne sais pas ce qui me surprend le plus entre sa question ou sa voix inquiète. L'amour est un sujet délicat pour lui. Si je veux espérer qu'il s'ouvre davantage à moi je dois faire attention à ma réponse.

- J'ai cru tomber amoureuse quelques fois, mais avec le recul j'ai compris que ce n'était que de l'affection ou de l'attachement. Je... Ça n'avait rien de comparable avec ce que je ressens pour toi. C'est mes sentiments pour toi qui me font dire que j'en ai aimé aucun.

Ma réponse est une déclaration d'amour à peine voilée. Mon franc-parler a encore frappé. Je ne sais pas si mes mots vont lui plaire ou bien l'effrayer. Sans le vouloir j'ai pris un risque. Mes yeux se détournent vers ses lèvres blessées. Alors qu'une terrible envie de l'embrasser me submerge, je sens sa main caresser mon ventre. Avec discrétion et habileté il a réussi à passer sa main sous mon tee-shirt. Ce contact embrase mon corps. Ma respiration devient haletante.

- J'ai jamais cru tomber amoureux d'aucun fille, mais tout ça c'était avant toi.

Sa voix se brise sur les derniers mots, mais je les entends et ils me vont droit au cœur. Avec douceur il dépose ses lèvres sur les miennes. De peur de lui faire mal je n'ose pas lui rendre son baiser ce qui l'amuse.