Chapitre 17 - 2

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La Fuyeuse la plus proche me saisit par le bras et me tire vers eux. Je trébuche sur le sol enneigé, mais elle me maintient debout tandis qu'une autre lie mes mains.

— Bon choix ma jolie.

Elle m'attrape violemment le cou et me regarde droit dans les yeux quelques instants. Son acolyte ne m'a pas lié les mains dans le dos ce qui me permet, malgré la corde, d'attraper le bras de mon agresseuse. Malgré cela, je n'ai pas assez de force pour l'empêcher de m'étrangler. Ses courts cheveux bruns lui donnent une allure de guerrière. Elle a le regard noir et toute humanité semble l'avoir abandonnée depuis bien longtemps. Ma gorge est contractée par sa poigne, je sens que je commence à manquer d'air. J'essaie de respirer, mais j'en suis incapable.

— Qu'attendez-vous ? Voulez-vous la voir mourir, puis que l'on vous tue ensuite ? Ou alors préférez-vous vous rendre tout de suite ?

Je sens mes jambes se dérober sous mon poids. Mes poumons sont vides de tout air. Le sang n'irrigue plus mon cerveau. Ma vision devient floue. Je me sens partir en même temps que résonne le son d'une épée tombant sur le sol. Je m'écrase par terre et prends de grandes inspirations. Le soulagement est immédiat. Je reprends ma respiration et le contrôle des émotions aussi vite que possible, mais le début du chaos m'en empêche. Les Fuyeurs se jettent sur mes amis, ils les assomment ou bien les immobilises pour les attacher, je ne sais pas trop. Ils disparaissent de ma vision quand les sauvages les entourent.

La femme m'ayant étranglée attrape la corde qui relie mes mains et me force à marcher.

— Avance, me somme-t-elle en m'éloignant du chaos pour me diriger vers le centre du campement.

J'aimerai l'insulter, elle et tout son peuple. J'aimerai lui dire que je vais finir par la tuer, mais je reste silencieuse. Si je m'énerve, je perds de l'énergie, donc c'est elle qui gagne. Je jette des coups d'œil en arrière, espérant voir mes amis apparaître, mais il n'en est rien. Le feu apparaît devant moi tandis que je ne sais combien de personnes autour m'observent avec haine. Je me retrouve propulsée dans l'une des cabanes et me cogne contre le mur du fond. J'échange un dernier regard avec ma ravisseuse :

— Prends soin de toi, chérie.

La porte se ferme en un claquement et le grincement du loquet résonne. Je suis compressée entre quatre murs et l'air semble rare ici. Je peine à respirer et je ne peux même pas m'asseoir pour me calmer. À travers les planches de bois, j'arrive à apercevoir Vorondil, assommé, se faire porter jusqu'à sa prison. J'entends les loquets se fermer un à un. Il y a le compte, tout le monde est enfermé, je prie juste pour qu'ils soient encore vivants.

Des sourires se dessinent sur les visages des Fuyeurs lorsque le dernier d'entre nous est sous cellule. Ils jettent des bûches pour raviver le feu puis chacun part se recoucher, comme si rien de tout cela ne s'était passé. J'observe la scène, l'œil collé entre les minces espaces laissés entre les écorces. Un homme fin aux cheveux noirs de jais observe ma cabane. Je ne peux pas affirmer qu'il m'observe moi, il ne peut même pas me voir. Son regard ne s'en détache que lorsqu'il s'éloigne dans une allée.

***

J'ai toujours su que les Fuyeurs n'étaient pas des gens fréquentables. Ma vie de prisonnière me le confirme. Cela fait trois jours que je suis enfermée. Jusqu'alors, je n'ai vu aucun de mes amis sur la broche, mais j'ignore combien de temps cela va durer. Les liens de mes mains ont tant frotté ma peau que celle-ci commence à être irritée. Malgré mon corps fatigué, mes réflexions tournent en boucle. Je n'ai pour l'instant trouvé aucune manière de fuir. Jusqu'ici, ils nous nourrissent et nous hydratent bien, mais je ne me fais pas d'illusions. Ils ne font pas cela pour que nous soyons en santé, mais bel et bien pour que nous soyons bien en chair lorsqu'ils décideront de nous manger. À chaque repas, ils ouvrent la porte quelques secondes pour me jeter de la nourriture et une gourde. Ce qui m'empêche de m'enfuir à ce moment-là, ce sont les cinq archers dont la flèche est prête à transpercer mon cœur au moindre faux pas.

Le fonctionnement de leur communauté est bien ficelé. Chacun y a sa place et ses tâches, du moins de ce que je peux en déduire en regardant à travers les fissures de ma prison. Durant la journée, le centre du campement où nous sommes grouille de monde. C'est là que se trouvent certaines échoppes pour échanger des matériaux, mais surtout, il y a l'armurerie. Chaque jour, je vois mes dagues, la hache de Vorondil, les épées des Greymars et l'arc de Daëron prêt à être troqué. L'une de mes lames a disparu de l'étal dès le premier jour.

Par contre, à la nuit tombée, comme à cet instant, le lieu semble abandonné. Seules les braises encore chaudes du grand feu prouvent le contraire. Mes paupières sont lourdes et je m'accote à l'angle de ma cabane pour tenter de me reposer. Mes pensées m'en empêchent, cherchant encore et encore une solution au problème.

— Qorwin ?

La voix de Tulkàs, bien que basse, me surprend. Au son, je devine qu'il est dans la cabane à gauche de la mienne. Jusque-là, nous n'avons encore pas parlé. C'est le premier prisonnier qui émet un son. Dieu sait ce que les Fuyeurs sont capables de faire s'ils nous entendent parler.

— Oui... ? réponds-je incertaine.

— Merci d'être venue. Je suis désolé de ce qu'il t'arrive.

Les larmes me montent aux yeux, mais je les ravale.

— C'est normal, c'est ce que l'on fait quand nos amis sont en danger. On les sauve. Ou du moins, on essaie.

Il ne répond rien, mais le petit bruit qui lui échappe me laisse deviner qu'un mince sourire se dessine sur ses lèvres. Soudain, un homme approche. J'entends le bruit de ses pas avancer vers moi. Mes muscles se tendent, ma respiration se fait plus discrète, comme si cela allait me faire disparaître. Je crois rêver lorsque j'entends mon loquet s'ouvrir. Je me sens fébrile. Que se passe-t-il ? Aussi tard dans la nuit, personne n'est réveillé d'habitude ! Quelqu'un est venu me sauver ? Je l'ignore. La porte de ma cabane s'ouvre lentement et son visage se distingue malgré la pénombre. L'homme aux cheveux noirs qui me fixait lors de mon enfermement se tient devant moi, droit comme un pic. Sa peau blanche couplée à ses oreilles d'Elfe me fait vite comprendre quelles sont les origines de ses parents. Il place un doigt devant sa bouche pour m'indiquer de ne pas faire de bruit.

Je le regarde sans comprendre. Est-il vraiment en train de me libérer ? Pourquoi ? Je sors timidement de la cabane en vérifiant de part et d'autre si ce n'est pas un piège, mais il n'y a que lui.

— Merci... soufflé-je, extrêmement reconnaissante.

— Oh, ce n'est pas ce que tu crois.

Le visage du bâtard change complètement. Il m'oblige à avancer en tenant fermement l'un de mes bras. Sa prise est si forte que ma peau devient blanche. J'essaie de crier, mais la main qu'il plaque sur ma bouche m'en empêche. J'entends Tulkàs m'appeler, mais il n'ose pas réveiller tous les Fuyeurs. Il reste un simple observateur de la scène tandis que je me fais guider à travers le dédale de tentes. Je ne sais pas comment agir, j'ignore les intentions de cet homme, mais au moins, je suis dehors. Là voilà, ma chance de m'enfuir.

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