Chapitre 30

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— Reprends-toi Stanislav ! suppliait Nalphas.

Chacun tentait de raisonner la bête que devenait le prince déchu tout en sachant pertinemment que ça ne servirait à rien. Whil n'était plus à ses côtés. Elle ne l'avait pas fui, elle lui avait été arrachée des bras. Sous ses yeux.

La seule chose qu'on attendait de lui en tant que mâle, protéger sa femelle au péril de sa propre vie... Il n'en avait pas été capable.

Il devait partir, la retrouver. Arracher la tête de ces espèces d'anges de la foudre, de ces maudites guerrière d'Odin, sœurs de Freya ! Elles l'avaient affronté à plusieurs, juste le temps pour une autre de s'emparer de sa vulnérable Whil. Et elles avaient disparu sans lui donner l'occasion de les tenir en otage, sous le supplice de ses mains capables de tenir des interrogatoires comme il était rare de pouvoir en imaginer. Et pour Whil, il se sentait capable de bien pire encore !

Il lançait un grognement rauque et monstrueux, repoussant ces démons non-transformés. Contrairement à lui. Son corps avait doublé de volume pour une masse musculaire plus imposante, il avait pris de la hauteur.

Babylas s'interposa.

— Tu dois te maitriser avant de perdre la raison. Auquel cas tu ne seras qu'instinct, ce qui n'aidera pas forcément ta femelle.

Elle avait raison. Mais il ne pouvait pas.

Et lorsqu'un cri strident vint lui percer les tympans, il s'élança aussitôt sur le balcon, éjectant quiconque l'empêchait de suivre cet écho. Ce cri... Il le reconnaissait.

— Ce n'est qu'une Amazone, lui assura Nalphas. Nous devons nous concentrer sur les Walkyries, Stanislav. Elles l'ont sans doute emmené dans le Valhalla.

— Son cri.

Incapable de prononcer un autre mot, il sauta dans le vide pour déployer ce qui était à présent ses nouvelles ailes. Il n'avait jamais volé de sa vie, pourtant ce fut instinctif. Il n'eut pas besoin d'apprendre, seulement de glisser sur le vent, d'user de l'air pour se diriger et battre puissamment pour gagner en vitesse.

Il s'agissait du cri de Whil. Longtemps, le cri des Amazones lui avait paru être tous semblables, sans aucune distinction. Mais plus aujourd'hui. Plus depuis que sa femelle se trouvait être à demi de cette espèce. Elle était unique, son cri l'était tout autant.

Au loin, la Walkyrie disparaissait dans un éclair. Sans Whil.

Son sang se glaça. Et si Whil était... tombée. A cette hauteur...

Il redoubla d'effort, ne perdant que davantage la raison. D'autres le suivaient, des Lilithus envoyés pour l'aider dans sa quête. Il n'aurait pas besoin d'eux. Il saurait s'occuper de sa femelle. Seul. C'était sa responsabilité. Un fardeau qu'il n'aurait abandonné à personne.

Une odeur attira tous ses sens.

Le sang.

Il piqua droit sur la forêt, traversant les branches lui faisant obstacles avant d'atterrir. Là. C'était là. Une mare de sang.

Mais pas de trace de Whil.

Ça aurait pu être bon signe. Elle n'était pas morte et était parvenue à se relever pour trouver un refuge où elle se cachait en l'attendant. Mais l'autre hypothèse pouvait suggérer que d'autres l'aient très vite trouvé et emmené pour un festin...

— Du sang, observa Nalphas. Mais pas d'autre trace. Soit ta femelle est très douée pour camoufler ses traces, soit les individus l'ayant emmené ont ce talent à sa place.

Il devait la retrouver. Whil était vulnérable, un esprit terrifié dans un corps aux capacités génocidaires. Mais sans arme pour l'aider... Il connaissait déjà ses capacités de combat au corps à corps. Elle avait de bonnes bases, mais rien qui ne saurait vraiment rivaliser avec une créature entrainée depuis plusieurs siècles aux arts de la guerre.

Whil, où es-tu ?


***


Où suis-je ?

Elle eut beau regarder autour d'elle, rien n'avait de sens. Allongée sur un lit de fortune, sous une tente décorée rustiquement, elle n'était ni chez elle ni auprès de Stanislav.

La douleur électrisa son corps alors qu'elle s'était permit un mouvement anodin. Des courbatures comme elle n'en avait jamais ressentis...

Un regard pour son corps lui permit de constater la bienveillance de ses sauveuses. Des bandages et aucun lien. On l'avait couverte et lui avait glisser un oreiller sous la tête. Et on l'avait nettoyé.

— Tu es réveillée ? s'étonna une jeune femme à la beauté transcendante.

Ses longs cheveux platines, raides et souples, tombaient jusqu'au niveau de ses hanches. Deux nattes étaient tressées à même le crâne, le mêlant au reste de la jolie crinière. Elle lui adressa un sourire charmant, prenant une tunique aussi claire que sa peau porcelaine, s'avançant jusqu'à elle.

— Je vais t'aider.

Elle lui permit de se lever, l'aidant à s'habiller. Ses gestes étaient lents pour ne pas brusquer les muscles nouvellement remis de graves blessures.

Peu à peu, elle sembla reprendre l'habitude de son corps, les courbatures lui paraissant bien moins douloureuses.

— Je suis Lina, se présenta-t-elle.

— Je m'appelle Whilemine.

Elle fronça les sourcils, se mettant à réarranger sa franche sur son front en un geste incontrôlé.

— Ce n'est pas un nom d'Amazone.

— Comment est-ce que... ?

— Tu es une Amazone. Ton cri l'a prouvé. Il s'agit d'un cri de guerre, votre arme contre vos adversaires. Seule, il vous permet de prendre l'avantage. Mais ensemble, vos cris mêlés les uns aux autres, vous devenez les guerrières les plus intimidantes. Quoique, il n'est pas besoin de ça pour qu'une Amazone soit effrayante.

Devant l'étonnement de Whil, Lina l'emmena hors de la tente. Le camp était rempli d'une joie viril et paradisiaque parmi toutes ces femmes aux larges sourires, s'amusant à boire et nettoyer leurs armes, se battant par moment sans jamais que le conflit soit dangereux.

Des fillettes courraient et riaient, jouant les acrobates. Tout était charmant et arrangé pour être vivable tout en mêlant plaisir avec utile. Toutes vêtues de vêtements légers, peau de bête pour certaines, de toges et autres draps arrangés par des boucles pour d'autres, les mouvements n'étaient pas encombrés.

— Bienvenue sur les terres des Amazones.

Au rythme de la nuit 2 - Dansons la CarmagnoleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant