Chapitre 45

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La nuit semblait avoir chassé le Soleil et sa clarté chaleureuse. Whil s'accorda à sortir de son arbre, s'asseyant sur sa branche. Il était étrange de constater sa rapidité d'adaptation à sa nouvelle nature. Sa peau en écorce, ses cheveux feuillus... Tout lui paraissait normal, banal.

A cette heure-ci, personne ne viendrait.

Alors, redevenant humaine, elle s'approcha du bord de la falaise. Une rambarde s'y trouvait, entourant le jardin. Cet aménagement avait de quoi étonner, les démons Lilithus ne donnant pas d'importance à se protéger du vide compte-tenu de leur condition d'être ailé.

Au loin, à l'horizon, quelques rayons du Soleil survivaient difficilement. Elle put observer un instant la vue imprenable sur le Téras.

Dans quelques minutes, Stanislav reviendrait. Une couverture se trouvait non loin. Depuis sa métamorphose dans le jardin, il ne cessait de lui siffler dans les esgourdes qu'il se préparait à la guerre, qu'elle était en danger soit par sa condition d'hybride soit par ses origines dans la Ronde, s'il ne lui rappelait pas son passif avec les Amazones ou sa confrontation face aux Walkyries. Il lui promettait avoir confiance en elle, justifiait sa méfiance, et par moment elle sentait son cœur se serrer de culpabilité. Le fait qu'il décide chaque nuit de dormir à ses côtés, sur ses branches, n'arrangeait rien. La journée, il passait le plus clair de son temps auprès de Babylas, se plongeant dans des plans de vengeance et de prise de pouvoir.

La guerre était-elle plus importante que le bonheur de son amour ?

— Attends, m'a-t-il déjà déclaré son amour ?

L'avait-elle déjà fait de son côté ? Elle se souvenait des paroles du démon, lorsqu'il fut encore un vampire. Ce dernier n'accordait pas de réelle importance à un « Je t'aime », le trouvant trop réducteur pour exprimer ses sentiments. Mais quel équivalant donnerait-on dans le Téras ? Cela, Whil n'avait pas un début de réponse à délivrer.

Elle ferma les yeux, chassant la mauvaise pensée de son esprit.

Il était temps de redevenir un arbre. Aussi, elle s'enracina de nouveau dans la terre.

Comme prévu, quelques minutes plus tard, Stanislav vint à elle. Mais cette fois-ci, il ne chercha pas à dormir. Il grimpa sur son tronc, trouvant une branche plus large et un creux pour s'installer. Sa peau se grisa, ses grandes ailes apparaissant pour former un cocon capable de le maintenir entre ses branches. Ses cornes se frottèrent un instant contre son écorce puis il ferma les yeux, les bras croisés autour de sa poitrine.

Elle attendit qu'il s'endorme, sortant de son tronc pour s'approcher sous une forme humanoïde. S'emparant de la couverture laissée là, elle l'en recouvrit.

Il était si chaud. Et son contact lui manquait.

Pourquoi s'étaient-ils disputés ? La raison en valait-elle la peine ? Whil adorait apprendre et expérimenter, mais cette curiosité devenait nocive pour celui qui, bien au lieu de bouder, continuait de rester à ses côtés pour que jamais ses nuits ne soient seules et froides.

Aurait-elle dû céder ?

Soudain, sa main fut saisit par la forte poigne de Stanislav. Elle ne poussa pas de cri, bien trop habituée à garder le silence. Mais le fait qu'elle ne tente pas de se défendre avait de quoi la surprendre.

Le démon avait ouvert ses yeux.

— Tu m'as piégé, tu faisais semblant de dormir.

— Je dors très mal ces derniers temps.

Il tira sur sa prise, l'attirant dans ses bras. Ses doigts glissés dans les siens, il ne se plaignit pas du touché de sa peau-écorce, ni des feuilles en guise de cheveux près de son visage.

Au rythme de la nuit 2 - Dansons la CarmagnoleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant