À l'encre de ta peau

21. Raphaël

©RoseWilliams2020RainbowLove
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J'ai l'impression de flotter, purement et simplement. J'ai du mal à me remettre de l'orgasme foudroyant que Valentin vient de m'offrir. Jamais je n'aurais pensé que la soirée prendrait un tel tournant lorsque j'ai fui le pub, sauf qu'à présent, les rôles sont inversés, et c'est lui qui veut fuir. Retour sur terre. Mon ventre se contracte douloureusement au son trop calme de sa voix qui me fait relever le regard vers lui. J'aimerais voir ses prunelles pour comprendre ce qui lui arrive, mais malheureusement il fixe ses pieds, immobile sur mon paillasson, comme une réminiscence du jour de notre rencontre.

Mes doigts fourmillent désagréablement, une sensation de drame imminent me ceint le cœur. J'ignore ce qui se passe dans sa tête, mais je me doute que ce n'est rien de bon. Il ne faut surtout pas que je le laisse partir. Pas comme ça en tout cas. Regrette-t-il ? Il n'a jamais caché son désir pour moi ni sa volonté de ne pas y succomber. Pas pour une seule nuit. Bien trop pur pour ça. J'aurais sans doute dû le repousser.

— Je... J'ai fait quelque chose de mal ?

Ma question a au moins le mérite de le surprendre. Il relève le menton et m'observe avec étonnement.

— Non ! Bien sûr que non, Raphaël !

Je ne peux rien contre l'expiration tremblante qui m'échappe. Mes muscles sont encore tendus, comme si mon corps se préparait à un affrontement qui n'arrivera jamais. Comme si j'étais en danger tout en sachant que je ne risque rien. J'ai juste... peur ? Peur de le perdre. Que lui aussi m'abandonne. Sa voix me sort heureusement des affres de mon angoisse soudaine.

— Je ne regrette pas non plus si c'est à ça que tu penses.

Il force un sourire sur ses lèvres, mais ne quitte pas le seuil de mon appartement pour autant. Il va mal, mais tente malgré tout de me réconforter. Ce type est vraiment incroyable.

— Il serait judicieux qu'on en parle. La dernière chose que je souhaite, c'est te faire souffrir.

Je n'ai jamais eu besoin d'avoir ce genre de conversation, justement parce que je refuse de prendre le risque de m'attacher et donc de me mettre en couple. Quand on couche avec un mec une seule nuit, tout est simple, rien n'est profond... ou plutôt si, mais ce n'est pas le sujet ! Et pourtant, avec Liam, nous avons souvent ce genre d'explications pas toujours agréables. C'est le prix à payer quand on tient à quelqu'un suffisamment pour l'intégrer à sa vie. Et Valentin fait partie de ces gens-là.

Il m'avise quelques longues secondes, sans bouger ni même parler avant que finalement ses lèvres ne se soulèvent à nouveau, éclairant ses yeux orageux d'une douce lueur. Il hoche la tête à mon plus grand contentement. C'est une petite victoire, mais une victoire malgré tout. Je le connais peut-être peu, mais j'ai cru remarquer que, face aux problèmes, Valentin était du genre à fuir pour se préserver. Je suis sûr que son arrivée à Paris, il y a quatre ans, à tout à voir avec son ex le trompant effrontément. Et là, maintenant, il voulait décamper, mais il reste.

Je souris à mon tour, une étrange sensation dans la poitrine, comme une chatouille à la fois désagréable et agréable dont je ne sais que penser.

J'inspire fortement et extirpe deux bières de mon réfrigérateur avant de les décapsuler. Doucement, presque craintivement, il s'avance jusqu'à l'îlot où il s'installe à sa place habituelle. Habituelle, car il fait déjà partie de ma vie. Il s'est imposé à moi si vite que c'en est étourdissant.

Je lui offre un autre sourire, lui tends sa boisson que je heurte de la mienne pour trinquer avant d'en boire une longue rasade. J'ai la gorge sèche du plaisir exprimé dans l'ascenseur.