Chapitre vingt-sept : Kale

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Pas une trace de Tom, rien. Pas un scandale, pas de rumeur. Ma plainte sans nom ni clan n'a pas porté ses fruits et je me suis fait rembarrer, alors j'ai trouvé une autre façon de rester.

Je gémis de douleur quand le mec me griffe. Heureusement, c'est sur mon dos, j'ai peu de tatouage et donc peu de crème à cet endroit.

Vivement que ce connard finisse de se vider, je n'en peux plus, c'est le deuxième que je me tape, espérant entendre ou voir des choses. Sauf que celui-là n'a rien trouvé de mieux que me baiser dans un coin de où se situe la Cage, donc c'est un coup pour rien. J'aurais voulu accéder à d'autres de leurs pièces. Sinon j'aurais rembarré les mecs en restant dans l'espace principal.

Le client a terminé sa besogne, il s'est à peine retiré qu'il se rebraille. Son sperme rejoint celui du premier et me coule entre les fesses. J'en tremble de dégoût pour moi-même. Je me rhabille à mon tour et c'est en me retournant que je le vois ; Tom.

Outre son piteux état, c'est sa surprise qui me choque le plus. Il y a un moment de flottement qui me paraît durer une éternité. Par automatisme, je me remets en mouvement et me dirige vers lui. Je remarque directement les types qui le fixent. Ils le surveillent, mais Tom ne se reprend pas. Hors de question qu'il lui arrive une tuile si près de la sortie. Je m'approche de lui et fais mon numéro.

— T'as envie de passer un bon moment, tu sembles avoir besoin d'un remontant.

— Je...

— Fais pas le timide, va !

Je ponctue ma dernière phrase en frôlant son ventre, je me retrouve avec le doigt recouvert de sang. Je ne laisse rien transparaître, mais mon inquiétude est montée en flèche. Il a été planté, comment l'expliquer sinon ?

— Allez, viens.

Je le tire par le haut du pantalon et l'entraîne vers la sortie. Les types qui l'avaient à l'œil n'ont pas l'air étonnés. Ils doivent s'imaginer que j'ai trouvé un pigeon à dépouiller.

Tom semble se ressaisir et entrer dans mon jeu, car il me suit et en profite même pour me mettre une tape sur les fesses. Il faut dire qu'il attire l'œil en étant recouvert de poussière et de sang, il a compris qu'il fallait jouer le jeu. Une preuve de plus que j'ai bien fait de lui sauver la vie et qu'il sait s'adapter aux situations.

Je l'entraîne loin, à au moins deux cents mètres. C'est une rue vide et étroite, dont les trottoirs sont défoncés et des monceaux de déchets en obstruent pratiquement le passage.

— Tu vas bien ? T'as été poignardé ?

— Oui. Non.

Son oui laconique ne me dit rien qui vaille.

— Tu as trouvé Mina ?

— Oui.

— Tu l'as tuée ? le pressé-je.

— Non.

Sa réponse résonne comme un coup à mes oreilles, car il est condamné, je comprends mieux son état.

— Elle est où ? On peut encore tenter quelque chose.

— Partie avec les Mélos.

— Tu l'as vue ? Tu en es sûr ?

— Oui.

Tom se laisse tomber au sol et s'attrape le visage.

— J'en peux plus, me confie-t-il.

Les plaies à ses mains et ses bras semblent s'être rouvertes. Des gouttes reflètent faiblement le tiers de lune qui nous surplombe.

Je m'assois près de lui. Les sécrétions qui maculaient mon boxer s'imprègnent dans mon jean. Elles ont refroidi et une vague de nausée me gagne. Je me retiens de vomir et déglutis difficilement.

Au-delà de l'encreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant