Chapitre quarante-deux : Tom

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Jun est parti.

Il sera là-bas bien avant nous, comme il le fait habituellement quand il est de surveillance. Il n'aura aucune arme et tapinera. Il sera notre plan de secours à bien des étapes, mais avec de la veine nous n'aurons pas besoin de lui. Peu de chance par contre que Kale et moi passions inaperçus. Le stress me comprime la poitrine, cette sensation est insupportable. J'ai une envie folle de courage en poudre. Il me suffirait d'aller chez moi, juste pour cette fois... Si nous ne nous en sortons pas ça n'aura aucune incidence, mais au moins je ne me serais pas chié dessus les dernières heures de ma vie...

Kale a enfin consenti à s'allonger un peu. Pendant ce temps, je bois de l'eau pour dissiper le mal de tête consécutif à mes excès de la veille. Nous avons le temps. Nous voulons être là-bas pour vingt-trois heures, donc nous décollerons à vingt-deux heures et il n'est que quatorze heures... Tout ce temps libre me bouffe. Je vérifie ma montre toutes les minutes et je calcule le compte à rebours avant le moment fatidique.

C'est de la folie.

Je regarde Kale allongé en caleçon sur son lit. Je ne m'en lasse pas. Il ne dort pas, je crois, sa respiration n'est pas très profonde.

Il a peu de cicatrices, contrairement à moi. Je me demande si ce n'est pas un peu suspect ma peau des bras et des mains zébrés de la sorte, mais je ne peux rien y faire. C'est déjà pas mal que je n'ai pas perdu un doigt ou deux dans l'affaire.

— Tom, ton pied !

Je réalise que je martèle le sol comme un fou furieux.

— Merde, désolé.

— Pas grave, je n'aurais pas dormi de toute façon. Tu veux t'entraîner un peu ? Ça nous videra la tête.

J'accepte. Nous commençons par nous échauffer. Je n'échappe pas aux pompes. Nous ne comptons plus, c'est à celui qui tiendra plus que l'autre et il gagne à chaque fois.

Il est toujours en sous-vêtement, son corps est recouvert de sueur. Et j'ai l'envie folle de le toucher, de goûter sa peau salée, de me perdre dans une étreinte que je désire depuis des mois. Et qui me viderait mieux la tête que tous les exercices que nous allons entreprendre.

J'ai les bras faibles après les avoir autant sollicités, mais malgré tout je dois parer les coups de Kale. Heureusement, il y va doucement.

Nous ne parlons pas. Je crois qu'il rumine comme moi ce qui va arriver ce soir. Si je pensais que nous ayons nos chances, je lui proposerais de fuir, mais ce plan terminerait mal.

Alors je me contente d'encaisser et de frapper pendant de longues minutes. Même si ce n'est pas très intense, je finis en nage.

— C'est bon. On a notre compte, déclare Kale.

Nous nous agglutinons dans la cuisine pour boire de l'eau à grande goulée.

— Tu veux de l'hydromel ? me propose Kale qui sort une bouteille.

— Oui.

Ce n'est pas raisonnable, mais j'aimerais que ma voix intérieure qui gueule de trouille la ferme un peu.

— On va éviter de se mettre minable, mais je pense qu'on a besoin de décompresser, tente piteusement Kale.

— On sue comme des porcs, mais ça n'a pas été efficace, dis-je tout aussi pitoyablement.

Jun proposerait un bon plan baise pour nous vider la tête, mais c'est clair que Kale ne serait pas réceptif à cette idée.

— Tu recommences à taper du pied.

— Pardon, je suis à cran... J'ai peur, ça ira mieux quand on sera là-bas.

— Tu peux toujours reculer Tom. Je ne t'ai rien demandé.

Au-delà de l'encreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant