Kale me fixe, j'ai l'impression qu'il veut dire quelque chose, mais que rien ne sort. Je ne lui rends pas son regard, car je veux finir mon travail de couture rapidement et m'éloigner de lui. La tentation est trop grande. Nous aurions pu mourir cette nuit et même si cette réflexion n'a pas de sens, je n'ai plus envie de me priver de lui, mais c'est clair que ce n'est pas réciproque. J'ai bêtement supposé qu'il voulait me parler de ma déclaration et qu'il allait me dire qu'au final lui aussi désirait plus de moments intimes entre nous. Sinon, comment expliqué qu'il ait répondu favorablement la première fois ?
Sauf que comme souvent avec lui, je n'ai rien compris.
Ce constat me serre la poitrine. Je ne peux qu'espérer qu'il ne mette pas un terme à mon apprentissage et à nos missions.
— J'ai fini, dis-je en contemplant mes sutures.
— Ça me tire déjà, râle-t-il. Mais il était temps, la douleur devenait insupportable.
Je le vois, il sue et il est un peu pâle. Je désinfecte avant de saisir une bande et de commencer à essayer de protéger la plaie.
— Tom... Tu veux qu'on prenne du recul ?
Je reste sidéré, comme foudroyé. C'était la chose que je voulais éviter.
— Tom ? demande-t-il en posant sa main sur la mienne.
— Je ne voulais pas tout foutre en l'air, dis-je dans un murmure.
Je n'ose pas le regarder et laisse en plan le bandage sans le terminer. Je suis ridicule. C'est chacun pour soi. Je ne sais pas pourquoi j'attendais plus. Je ne sais même pas quoi au juste. C'est simplement que j'étais bien avec lui. Et maintenant... maintenant, c'est foutu.
— Qu'est-ce que j'ai dit de travers ? s'enquiert-il. Ce n'est pas ce que tu voulais ?
— Laisse tomber.
Je me fais violence, pour terminer rapidement d'attacher la bande et m'éloigner de lui.
— Attends !
Il m'attrape par le bras et me force à lui faire face.
— C'est bon Kale, t'as été clair. Je ne t'aurais plus jamais touché, si c'est ce que tu voulais. Je ne suis pas un connard. Je ne pensais pas que tu ne voudrais plus me revoir.
— Parce que tu voulais me dire qu'on pouvait remettre ça ? déclare-t-il complètement perdu.
— Non... Je... Je t'ai dit que tu m'attirais. Je m'attendais à ce que tu me dises si c'était réciproque ou non.
— On attire tous plein de monde. Il suffit de voir Jun, ou toi.
Je réalise que Kale ne comprend pas que je ne parle pas que du physique, mais je suis incapable de lui expliquer.
— Je ne dis pas ça pour coucher avec toi... Enfin, peu importe, il faut qu'on essaie de dormir un peu.
Kale ne dit plus rien et vient s'allonger à côté de moi.
Même si je suis habitué à cette lumière perpétuelle, elle ne m'aide pas à trouver le sommeil. J'ai le cœur qui bat un peu fort, mais je ne sais pas si c'est à cause de ma discussion avec Kale, du fait que nous ayons réchappé à la mort ou de notre promiscuité. Je ne bouge pas de peur de le gêner. Il a quand même pas mal saigné et il doit prendre du repos.
Mais il ne sombre pas non plus, quand il bouge il sursaute de douleur. Alors nous restons comme deux cons allongés à attendre que les heures passent.
Quand vient enfin le temps de se lever, je suis claqué, mais mon cerveau n'a pas voulu capituler. Pour que Kale se ménage, je prépare la bouffe et je termine de nettoyer le linge.
VOUS LISEZ
Au-delà de l'encre
Science FictionDans la Zone, il n'y a qu'un moyen de survivre, rejoindre un clan et arborer sa marque. Au sein de cette micro-société coupée du reste du monde, la vie est dure et les ressources sont rares, sauf peut-être la drogue. Après des années à n'être qu'une...