Chapitre quarante-et-un : Kale

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Toutes mes armes sont sorties, mais je crois que même si je pouvais toutes les amener, je ne me sentirais pas plus rassuré. J'ai passé la nuit à les astiquer, je n'ai pas réussi à fermer l'œil. Je n'ai pas mangé, je ne me suis pas douché. Je suis complètement obnubilé par ma mort qui se profile.

Je m'en veux tellement d'avoir merdé. Au départ, ils étaient trois, un s'est mis en retrait quand j'ai attaqué, donc j'ai rapidement tué les deux autres et ai tenté de le coincer, mais neuf autres se sont ramenés. Ils escortaient aussi un mec, au point de me faire douter de qui était le chef. J'ai essayé de les avoir, mais ils ont détalé avant et c'était du suicide de les poursuivre, nous étions trop proches de l'Oublie. J'ai espéré avoir eu de la chance dans les deux que j'avais eus, sans trop y croire. J'ai attendu au QG de savoir si j'avais pu tuer la bonne personne. Puis, la nouvelle est tombée, la tête du clan ne fait pas partie de mes victimes et je n'ai plus le droit de me rater.

Sauf qu'il ne va pas ressortir de l'Oublie de sitôt. Je suis dans la merde.

J'ai déniché un de mes rares morceaux de papier et un vieux crayon gris mâchouillé. Je dessine grossièrement les plans du lieu. Il y a deux endroits où je peux le trouver. Au sous-sol où au quatrième étage de l'entrepôt désaffecté qui leur sert de boîte.

Allez au sous-sol sera facile, mais en ressortir impossible, tout le contraire de l'accès aux étages où je pourrais toujours mettre fin à ma vie en sautant d'une fenêtre. Rapide et indolore. Je sais que je n'aurais pas le courage de le faire avec ma lame. Avec un peu de chance, ils seront en colère et me tueront vite avant d'avoir l'idée de me torturer pour me soutirer des informations.

Quelqu'un qui tape mon code me fait sursauter.

— C'est Tom.

J'avais complètement oublié sa leçon. Armé je vais lui ouvrir et à ma grande surprise, il est accompagné de Jun... Il a fallu qu'ils passent la nuit ensemble. Malgré ma situation merdique, l'idée ne me plaît pas. Comme si à ce stade c'était important. Parti comme c'est parti, je n'aurais plus jamais l'occasion de m'en préoccuper.

— J'ai pas le temps pour la leçon aujourd'hui, tu n'as qu'à demander à Jun, dis-je sèchement.

— Vu que tu sembles incapable de comprendre ! Ce soir on vient avec toi. Donc, dis-nous ce que t'as prévu, qu'on y réfléchisse tous ensemble, déclare Jun en prenant ses aises sur mon canapé.

— Comment vous savez ?

— C'est Tade qui m'en a parlé. Et Tom est aussi d'accord pour t'aider.

— Je pensais qu'on devait pas prendre de risque l'un pour l'autre ou je ne sais plus trop quoi, dis-je à l'intéressé.

— Ouais. Bah disons que ça dépend des situations, réplique Tom en s'installant à table tout en contemplant mes armes.

Je suis épuisé. Je n'ai pas envie de gaspiller mon énergie à leur demander de partir, alors je me ferme et retourne à mes réflexions, comme s'ils n'étaient pas là.

Leur présence ce soir ne changerait rien. À part Tom qui pourrait peut-être identifier le chef, si c'est toujours le même qu'à son époque. Toutefois, même dans ce cas, je n'aurais aucune certitude. Donc autant que j'aille me casser la gueule seul.

Je fixe ma feuille comme si la solution allait s'y trouver. De la main gauche, je joue à faire tourner ma lame sur la pointe. La table est vite marquée d'un point qui se creuse petit à petit. Mais le plan sans faille ne jaillit pas.

Je ne sais pas combien de temps je reste perdu dans mes pensées. Assez pour que Jun arrive à bout de patience, car il tire violemment ma chaise.

— Si tu continues à te morfondre, je t'en colle une. On n'est pas là pour se suicider avec toi, mais pour trouver un moyen de buter ce salopard et survivre tous les trois. On va discuter en mangeant et peut-être qu'en attendant que ce soit prêt, tu devrais dormir un peu. T'as une tête à faire peur.

Au-delà de l'encreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant