Chapitre XXVII: Rencontre

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⊱𐄚⋞✺⋟𐄚⊰

Résumé: Caaron Esman est le descendant d'une longue lignée d'exécuteurs. Un jour, on lui amène un jeune acteur qui tente de le convaincre de l'aider à s'échapper. Caaron accepte, mais ce n'est que pour lui redonner un ultime espoir avant l'échafaud. Le jeune homme meurt pendu. Béa, l'amante de Camaël, est absolument dévastée par cette perte et lutte pour retrouver goût à la vie. L'action se passe à Mogtryl, capitale du Royaume.

Le cimetière de Mogtryl était bien loin des clichés morbides que l'on rattache souvent à ce genre de lieux. L'endroit était absolument charmant, de jour comme de nuit et ce, grâce aux soins de la famille Esman. Caaron était un habitué, c'était lui qui s'occupait du jardinage et de l'entretient des statues. Les aînés trouvaient ça si ennuyeux, ils ne voyaient dans la mort qu'un instant terrible pour la victime, et une extase pour l'exécuteur.

La mort, c'est avant tout un sommeil. Cette devise était représentée en ce lieu par les milliers de statues allongées sur le dos ou sur le côté. Les visages étaient paisibles, les yeux, clos. Et au centre de tout ceci, l'Ange Dormeur, debout et la tête penchée sur le côté. Ses yeux étaient dissimulés par un voile. Nul n'avait le droit de croiser son regard, sous peine de mourir foudroyé. Tel était le mythe de l'Ange.

Mais ce qui faisait la beauté du cimetière était les parterres de fleurs colorées et les grands arbres Immortels couvrant de leurs ombres les figures de pierre.

Caaron était en paix alors qu'il arrosait ses plantes. Il pensait au petit Ben qui était en train de subir les leçons du paternel, réfléchissant au meilleur moyen d'apaiser son calvaire quotidien.

Une silhouette blanche apparut dans son allée. C'était une jeune femme pâle et triste, ses pas manquaient d'énergie, comme si elle avançait malgré elle. La tirant par la main, un enfant ouvrait la marche, l'air de lui indiquer le chemin.

Caaron eut un frisson en reconnaissant cette figure innocente emprunte d'une certaine naïveté ; il connaissait cette fille, mais d'où tenait-il ce souvenir ?

La fille, elle, ne parut pas le reconnaître en passant à côté de lui. L'enfant la mena jusqu'au fond du cimetière, là où étaient exposées les stèles anonymes des criminels. Seul leur date de mort permettait de distinguer les tombes vides les unes des autres. Elle s'arrêta. L'une des stèles indiquait : « meurtrier » ; et l'autre, « menteur ». Son regard vide fixa la seconde.

La rage explosa dans le cœur de Béa. Soudain, elle se mit à gratter de ses ongles l'inscriptions accusant de mensonge Camaël. Il n'y avait nul pleur dans ses yeux désormais, car le désespoir s'était changé en haine viscérale.

« Tiens, ce sera plus facile »

Caaron tendit à la jeune fille un marteau et un burin, ceux-là même qu'on utilisait pour inscrire les dates de vie et de mort sur les tombes.

Surprise, Béa le regarda avec incrédulité. Maintenant Caaron reconnaissait ce visage détruit par la douleur, ces yeux qui l'avaient vu tirer le levier qui projeta l'amant dans le vide. Ce jour-là, comme à chaque exécution, Caaron avait porté un masque, mais il ne se sentait pas à l'aise pour autant.

Elle prit les instruments en tremblant, et raya l'inscription sur la pierre. La rage passa aussi vite qu'elle était venue, et elle se tint droite face à son amant qui dormait sous la pierre.

Les Contes Sanglants du Royaume PourpreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant