~ Chapitre 1 : Le refuge ~

5K 271 37
                                    


~ Presqu'un an plus tard ~

(Samedi 30 Mars 2019) 

— Mel, faut vraiment que tu te bouges. J'ai promis qu'on y sera tous les deux à l'heure, alors va te doucher, faire tout ces trucs de bonne femme pour te rendre présentable et enfile une robe pour une fois. Je refuse de te voir une minute de plus dans ce pull informe trois fois trop grand pour toi, m'assène Eddy avant de tourner les talons et se diriger vers la porte d'entrée.

C'est un des pulls préférés de Matt. Je me sens bien dedans, même s'il a depuis longtemps perdu cette odeur qui le caractérisait. Parfois j'y pulvérise une petite touche de son parfum pour qu'il continue à m'apporter un peu de réconfort, un soupçon de lui. Penser à lui me fait souffrir, mais ne plus penser à lui m'insupporte. Inutile que je réplique ça à Eddy. Il le sait, il le comprend, mais il refuse de me laisser tranquille. Il veut que j'aille de l'avant.

Inutile aussi que je lui fasse croire que mon choix de porter sans cesse ses pulls, c'est parce que par-dessus un legging, ça fait très cocooning, je trouve, sans compter qu'il a le mérite de cacher, qu'à force de dépérir et de broyer du noir en alternant manque d'appétit et grignotage intempestif, je fais le yoyo et perds, puis reprends un peu des rondeurs que Matt aimait tant chez moi. 

Eddy voudrait que je redevienne la Mel d'avant, joyeuse et optimiste, mais je ne serai plus jamais cette femme. Elle est morte en même temps que Matt. 

Le Samedi 17 Mars 2018, ça fait un an, il n'y a même pas 15 jours.

— Je monte me préparer et passe te prendre dans une heure à compter de maintenant, précise mon ami en ouvrant ma porte. Il a la clé et fait comme chez lui ici. Quoi qu'il faille dire que c'est un peu chez lui aussi.

J'habite maintenant au rez-de-chaussée de la maison familiale de ce cher Eddy Mercier. Il en a hérité après le décès de son grand-père et avec Matt, avait entrepris de le rénover et de transformer l'énorme gouffre financier que constituaient les trois niveaux mal isolés et majoritairement inoccupés depuis des années, en trois appartements modernes et très fonctionnels. Sa grand-mère avait trouvé refuge chez sa sœur pour faire son deuil, mais une fois les travaux terminés, elle est tombée sous le charme du premier étage. La présence de son petit-fils, toujours aux petits soins avec elle a grandement pesé dans la balance. Pour lui-même, Eddy s'est créé une belle garçonnière au deuxième et dernier étage qui jouit d'un accès privé au toit terrasse, où on a passé bien des soirées barbecue à refaire le monde et casser du sucre sur le dos des clients qui nous sortaient par le nez, autour de quelques boissons plus ou moins alcoolisées. Cela fait au moins un an que je n'ai plus remis les pieds sur cette terrasse. Trop de souvenirs.

Quand mon meilleur ami a pris conscience que je dépérissais à vue d'œil dans la maison que j'occupais avec Matthieu depuis notre mariage, car tout m'y rappelait constamment qu'il n'était plus là, mon frère de cœur a pris les choses en main, m'a secoué les puces et m'a convaincu d'aménager, le temps de décider ce que je voulais faire de cette maison, chez lui où, je ne l'ai compris qu'après, il pouvait mieux me surveiller et me bousculer quand l'envie lui en prenait. Et ça lui arrive souvent.

— Je ne te laisse pas une minute de plus, annonce-t-il en restant un instant planté sur le seuil, un regard jeté par-dessus son épaule, pour m'inciter à m'extirper du canapé. Et si tu n'es pas prête, je te fous toute habillée sous le jet d'eau froide et t'enfile de force une robe digne de ce nom moi-même, me menace mon bientôt EX-meilleur ami.

Je m'abstiens de tout commentaire. D'ailleurs ce serait inutile, il a déjà claqué ma porte d'entrée.

Je sais qu'Ed a raison. Je ne peux pas me défiler cette fois. Cet évènement est trop important. Une journée portes ouvertes organisée au Refuge avec comme point d'orgue, Eddy et moi offrant un gros chèque.

New life, new love (- T1 chez les Desert Devils -)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant