A l'église

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~~Anissa~~

Il fut un temps où j'étais proche de Dieu.

Il fut un temps où mon identité en Christ était la seule chose qui me définissait en tant que personne.
Dans le monde, dans mes relations, je gardais en moi la conscience que le Dieu vivant était de mon côté.

Aujourd'hui, cette époque est malheureusement lointaine. Et je le regrette...

Debout devant l'entrée de cette énorme bâtisse, je sens mon cœur battre à tout rompre dans ma poitrine.

Je sais qu'il faut que je me remette en scelle, que je me remette sur le droit chemin et accepte de prendre la main de Dieu jusqu'à la fin de mes jours. Seulement, je sais aussi que je n'y arriverais pas seule.

Je finis par pénétrer l'endroit et m'installe sur l'un des bancs à l'avant.
Les genoux à terre, je lie mes mains, baisse la tête et formule une prière dans mon cœur.
Après avoir prononcé le légendaire "Amen", je lève la tête, et mon regard se pose automatiquement sur cette magnifique représentation de la croix, avec notre Seigneur cloué dessus.

Je reste là, immobile, et les yeux rivés vers lui, songeant à combien il a souffert ce jour-là.

Pieds et mains cloués sur le bois, le corps affaibli suite à la flagellation romaine et au poids de la croix qu'il porta à travers la ville, les tendons à découvert, et dans un état d'hemorragie intense.

Les docteurs en médecine disent que le simple fait de respirer était devenu une corvée pour lui, mais aussi que pour chaque bouffée d'air, il était obligé de se hisser sur ses pieds cloués, râpant son dos écorché contre le bois du calvaire.
Il était obligé de faire ça pour chaque bouffée d'air, des heures et des heures durant, jusqu'à ce que l'épuisement ait raison de lui.
Et alors qu'il avait déjà rendu l'âme, les romains le poignardèrent avec une lance, incision de laquelle coula du sang et de l'eau : un épanchement périchardique.
Tout cela, pour nous !

Sans pouvoir me retenir, je me surpris à éclater en sanglots, le corps entier pris d'un spasme incontrôlable.

-Calmez-vous ! __s'éléve une voix grave alors qu'une main se pose sur mon épaule__

Je lève une seconde fois la tête et croise, cette fois-ci, un jeune homme, sûrement âgé d'une vingtaine d'années. 
C'est le jeune garçon qui prononça les mots d'ouverture du culte, le jour de mon anniversaire.

Il m'accorde un sourire et vient s'assoir à mes côtés, m'invitant à prendre place à mon tour. Je m'exécute et sèche mes larmes.
Un long moment de silence s'installe ensuite, moment au cours duquel nous regardons tous les deux la croix.

-La première fois que je suis venu ici, j'ai eu la même réaction ! __il affiche un sourire en coin__ J'avais 21ans, et malgré mon jeune âge, ma vie était déjà remplie de péchés ; des péchés qui me pourrissaient la vie. Ma mère était une sage-femme, très souvent absente, paix à son âme. Et mon père... Je ne le voyais presque jamais. Alors, faute d'un réel suivi parental, je me suis laissé éduquer par la rue. La violence, le vol, des gardes à vue à tout va, l'alcool, les femmes... Et les hommes, tout !

Le regard désormais posé sur lui, je le regarde avec attention, buvant presque tous ses mots.

-Mais, comme le dit si bien La Parole, la main de l'Eternel n'est pas trop courte pour sauver, ni son oreille trop dure pour entendre. Alors peu importe ce que vous avez fait, peu importe qui vous étiez avant Jésus, sachez que tous vos péchés sont pardonnés et que vous êtes une personne nouvelle, par la puissance de son sacrifice.

-Si seulement c'était aussi simple ! __murmuré-je__

Il glousse.

-Pourtant, c'est réellement aussi simple que ça...

-Vous, vous étiez pêcheur, et vous avez rencontré le Seigneur, qui a par la suite changé votre vie. __je me tourne vers lui__ Mais qu'en est-il de ceux qui l'ont connu et qui, suite à un manque de force, ont fini par l'abandonner ?

-Jésus-Christ a dit : venez à moi vous tous qui êtes fatigués et chargés, et je vous donnerai du repos. J'ai lu ce verset de milliers de fois, et pas une seule fois je ne l'ai vu faire une distinction entre les anciens croyants et les nouveaux. Abandonner sa foi est loin d'être un acte qui plaît à Dieu, au contraire. Mais vous êtes là aujourd'hui, et je me permet de penser que c'est parce que vous voulez revenir à Dieu...

-Oui !

-Alors cessez de penser qu'il vous rejettera. __il ancre son regard dans le mien__ Regardez en arrière, visualisez votre passé avec attention ; je peux vous assurer que vous verrez le nombre de fois où Dieu vous a tendu la main. Et jusqu'au retour de Christ, elle restera tendue vers vous, à condition que vous vouliez bien la prendre !

D'une petite voix, je réponds :

-Je le veux...

-Alors mettez-vous à genoux, confessez vos péchés, demandez-lui pardon, et dites-lui - si cela est sincère _ que vous voulez revenir à lui ! A ce moment-là, je peux vous assurer que les anges tressailliront de joie, et que le cœur de notre Père se réchauffera, car un de ses enfants est maintenant de retour à la maison.

Après m'avoir adressé un énième sourire, il se lève et me tend la main, comme pour me saluer. Je la saisis. 

-J'espère vous revoir bientôt, Anissa !

La bouche entrouverte, je le regarde, me demandant comment il connaît mon nom.

-Attendez ! __je lui retiens la main__ Comment savez-vous que je...

-Parce que je te connais !

Plus il parle, et plus l'incompréhension s'empare de mon être.
C'est une blague ?

-Au fait, je voulais te remercier. A l'époque je n'avais pas assez de courage pour le faire. Tu m'intimidais beaucoup trop. Mais, merci de m'avoir défendu.

-Quoi ? __je me lève à mon tour__ De quoi parlez-vous ?

-Je parle de l'école, du coming out, de la bagarre, et du courage dont tu as fait preuve ce jour-là. Même si les deux événements sont séparés de plusieurs années, je suis certain que ton intervention ce jour-là a contribué à ce que je devienne l'homme que je suis. Alors merci !

-Al... Alain ? C'est vraiment toi ?

Il rit et me prend dans ses bras, avant de me chuchoter un oui à peine audible.
Je réponds à son étreinte et laisse libre court à mes larmes, remerciant intérieurement le Seigneur pour ce miracle.

《Romains 3:23-24》

[23]Car tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu;
[24]et ils sont gratuitement justifiés par sa grâce, par le moyen de la rédemption qui est en Jésus Christ.

Anissa - Sublimes Cicatrices (Tome 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant