Dans la nuit

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~~Anissa~~

Il est deux heures du matin et il m'est impossible de dormir.
Les yeux rivés sur le plafond, j'en viens à me demander ce qui est en train de m'arriver.

Bien loin de la fine douleur que me causent mes côtes en pleine convalescence, je ressens au fond de moi cette chose qui ne m'avait jamais habité auparavant : la rancœur.

J'ai attendu ; ô oui j'ai tellement attendu que Tante Arlines change enfin son comportement envers moi, qu'elle se rende compte que ce qui s'est passé il y a deux ans n'était absolument pas prémédité et qu'elle réalise que j'en souffre autant, sinon plus qu'elle.
J'ai tellement souhaité au plus profond de moi-même qu'elle cesse de voir en moi une ennemie que, maintenant que c'est arrivé, je suis étonnée de mon incapacité à lui pardonner.

La vérité est que, maintenant, c'est trop tard.
Je pense que si elle avait eu ce réveil un peu plus tôt, si et seulement si elle avait réalisé ses erreurs avant de mettre ma vie en danger, je lui aurais pardonné sans aucune hésitation.

Mais le simple fait de visualiser son regard alors qu'elle me descendait plus bas que terre avec ses insultes, la rage et la force qu'elle mettait dans chacun de ses coups, mon visage humide de larmes alors que j'encaissais, en silence. Le simple fait de visualiser le bain de sang dans lequel elle m'a laissée, totalement inconsciente, me retire toute envie de lui accorder mon pardon.
Elle ne le mérite pas.

-Pardonne moi papa ! __dis-je entre deux pleurs, comme si de sa tombe il pouvait m'entendre__

Je tourne sur moi-même et m'allonge sur le ventre, avant de tendre la main, saisir mon portable et cliquer sur le bouton "commencer une nouvelle discussion"  

La vue quelques peu floutée, je parviens tout de même à taper sur mon clavier un message adressé à ma meilleure amie :

📨 Moi : Tu penses que je mérite tout ce qui est en train de m'arriver ? Suis-je à ce point une mauvaise personne ?

Lorsque je repose mon téléphone, je me dis qu'elle doit sûrement être en train de dormir et qu'elle ne verra cet SMS qu'à son réveil.
Et je sais pertinemment qu'à ce moment-là, je n'aurais plus aucune envie de me livrer.
Plus autant que maintenant !

Je souffle, essuie mon visage et remonte la couverture jusqu'au-dessus de ma clavicule avant de fermer les yeux.
Au bout d'un certain temps, alors que le sommeil semble m'emporter bien loin de ce monde, la sonnerie de mon téléphone - annonçant l'arrivée d'une notification - me fait émerger.
Je le reprends et consulte ma messagerie :

📩 Samia : Voir en toi une mauvaise personne équivaudrait à voir dans la nuit un soleil aveuglant : c'est impossible.

Je souris.

📩 Samia : Que se passe-t-il ? Tante Arlines t'a fait quelque chose ?

📨 Moi : Non. Et c'est bien là le problème : elle n'a rien fait : rien à part de faire de moi une veritable épave.

Je sais, je sais que demain je regretterais d'avoir sorti tout ça.
Samia est une jeune femme de nature très curieuse et je suis certaine qu'elle ne s'arrêtera pas tant qu'elle ne saura pas l'histoire dans sa totalité.
Je sais aussi que je serais incapable de tout lui dire, je n'en aurai pas le courage.
J'ai bien trop peur que désormais, elle ne voit en moi un monstre, quelqu'un de qui il faut s'éloigner.
Mais aussi risqué que paraisse cet acte, combien même il me coûterait une amie qui a su illuminer ma vie, je ressens au fond de moi l'envie que quelqu'un m'écoute et se soucie du poids que je trimballe depuis si longtemps.
Je veux juste qu'on prenne soin de moi, pour une fois !

📩 Samia : Alors laisse la essayer, laisse la faire ce qu'elle veut et penser qu'elle peut te détruire. Mais ne la laisse pas gagner, ne lui donne pas ce privilège.

📨 Moi : Elle a déjà gagné !

Sur ces mots, je mets mon téléphone en mode avion et m'allonge en face du mur, comptant les minutes et heures qu'ils me restent à passer avant le levé du jour.

__________

Un chapitre très court, je sais.

J'écris avec un pincement au cœur 😢 et j'espère de tout cœur qu'aucun d'entre vous ne passe par ces moments de questionnement intense sur son identité.
C'est horrible de se sentir à ce point mal-aimé. C'est horrible de vivre, de la part des autres, des choses injustes et de s'en blâmer soi-même. C'est horrible de se sentir rejeté. C'est horrible de sentir dans son cœur que quelle que soit la bataille que l'on mènera, on l'a perdue d'avance.

Alors j'espère qu'au travers de ces mots et des chapitres qui suivront, tous autant que nous sommes nous comprendrons qu'au-delà de ce que les autres sont persuadés à notre propos, au-delà du fait que leur jugement vient à nous faire douter de ce que nous pensions de nous ; oui, au-delà de tout cela, il y a ce que Dieu pense de nous. Mais surtout, que c'est la seule chose qui devrait compter.

Maintenant, place aux questions 😆 :

- Jusqu'ici, que pensez-vous de notre chère Anissa ?

- A-t-elle raison de ne pas vouloir pardonner à sa belle-mère ?
Qu'auriez-vous fait à sa place ?

-Selon vous, quel est le verset biblique qui décrirait le mieux ce chapitre ?

Anissa - Sublimes Cicatrices (Tome 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant