Chapitre 11

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J'ai perdu connaissance j'imagine, parce que lorsque j'ouvre de nouveau les yeux, j'ai l'impression qu'on m'a roulé dessus et ma nuque est raide d'avoir dormi dans la mauvaise position. Mon ventre gronde, réclamant ce que je lui refuse la majeure partie du temps : de la nourriture qui ne serait ni des chips, ni des pâtes instantanées... Ma foi, il est peut-être temps que je sorte de ce lit et que j'abandonne l'idée de me morfondre devant des vieux films débiles. Je roule sur moi-même et m'étire en gémissant jusqu'à ce que ma tête heurte quelque chose de dur. Le quelque chose grogne et tous mes signaux d'alerte s'activent subitement. Je me redresse d'un bond, le corps tendu comme un arc et dévisage le vampire. Ses yeux sont fermés, mais il sourit, de ce genre de sourire qui se veut discret mais qui le rend simplement agaçant.

— Qu'est-ce que tu fous là ? m'étranglé-je en reculant vivement de l'autre côté du lit, embarquant au passage les draps.

Il s'est changé, probablement parce que quelques gouttes de mon sang étaient venues salir son jean, alors que moi je suis exactement dans le même état, à ceci près que mon T-shirt est froissé et que j'ai un bleu énorme sur le poignet. D'habitude, il ne laisse aucune marque, pourtant là, il n'y aucun doute, j'ai bien un hématome violacé autour de la trace de ses crocs. D'ailleurs il disparaît généralement juste après s'être nourri, il ne reste pas jouer les nounous.

Il ouvre un œil et m'observe avec amusement.

— C'est mon lit...

— Tu n'en as pas besoin, tu ne dors pas.

— Qui dit ça ?

— Moi, répliqué-je vivement.

Je suis à peu près sûre de mon coup. Les vampires ne mangent pas, ne dorment pas, ne respirent pas et ça tout bonnement parce que leurs cœurs ne battent plus depuis qu'ils sont morts. Enfin mort en tant qu'humain bien sûr, ce qui n'est visiblement pas quelque chose de très définitif dans le milieu surnaturel. Ça fait partie de ces choses que tout le monde sait depuis une éternité, tout comme le coup du pieu ou du soleil pour s'en débarrasser.

Le soleil.

Nom de dieu ! Il fait jour et il est là, bien tranquille dans mon lit – quoi qu'il en dise - le visage baigné de lumière comme si de rien n'était. J'ouvre grand la bouche, me retourne plusieurs fois comme pour vérifier que c'est bien le soleil que je vois au travers de la vitre et pas une sorte de spot fictif et m'arrête finalement sur lui.

— Tu as vu un fantôme petit chose ? lâche-t-il simplement en s'étirant à son tour, chose qu'il n'a sûrement pas besoin de faire de toute manière.

— Tu ne brûles pas au soleil ? soufflé-je en détaillant sa peau comme si je m'attendais à ce qu'elle prenne feu sous mes yeux.

Il arque un sourcil plus amusé qu'étonné, mais il prend visiblement plaisir à jouer avec mes nerfs.

— Incroyable ! Il faut vite que j'aille partager cette information avec les autres ! s'exclame-t-il. Ils seront contents de retrouver la lumière du jour après avoir passé des siècles cachés dans un cercueil.

Irrité qu'il ait l'audace de se moquer de moi, je lui balance mon oreiller au visage. Il ne prend même pas la peine de l'éviter et pousse un cri de douleur tout à fait ridicule.

— Et voilà que tu trouves mon point faible et que tu essayes de m'achever en usant de mon allergie aux plumes.

Décidément, il est bien décidé à se payer ma tête, il n'y a même pas de plumes dans ces fichus oreillers ! Je me jette sur lui et lui retire du visage.

— Pourquoi est-ce que le soleil ne te brûle pas ? grogné-je quand il osa me sourire.

— Et toi ? réplique-t-il avec un clin d'œil.

Let's dieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant