Chapitre 30

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Je ne redescends pas ce soir-là. Je sais que je n'aurais pas la force de cacher ce qui vient de se passer à Declan et Logan. Chasser Ash avait été la bonne solution, mais je ne lui en veux pas au point de le livrer en pâture à un Berserk et à un Loup. D'ailleurs je ne veux pas avoir besoin d'eux pour régler ça, je refuse de m'en remettre constamment aux autres surtout lorsqu'il s'agit du vampire et de notre lien.

C'est pourquoi le lendemain, alors que je descends d'un pas détendu les escaliers, le cou caché derrière un col roulé trop large pour moi, je décide de garder le silence sur les évènements de la veille. Leurs regards m'indiquent qu'ils ne sont pas dupes sur la raison d'un tel accoutrement, même si en l'occurrence ils se trompent lourdement. Je n'aurais pas caché la marque de ses crocs, ça, ça n'a plus aucune importance. En revanche, je me dois de camoufler les hématomes violacés que sa main a laissé autour de ma gorge. Je m'arrange également pour que la marque de Melanthe sur ma paume reste sagement cachée sous les manches trop longues de mon haut. Declan n'a pas besoin d'être au courant de mon marché avec la sorcière, du moins pour le moment.

— Où est la sangsue ? s'inquiète Declan en constatant qu'il ne fait pas son apparition derrière moi comme il en a l'habitude.

Je hausse les épaules.

— Je lui ai demandé de partir.

Logan s'étouffe et repose la brique de jus de fruit qu'il avait entrepris de vider.

— Comment ça partir ?

Sa voix suinte l'espoir et la joie. Ce à quoi je réponds en levant les yeux au ciel.

— On s'est disputé, mais peu importe, il reviendra tu le sais bien, il me laisse juste un peu d'espace pour le moment.

Bien sûr qu'il reviendra, notre marché tient toujours et aux dernières nouvelles, je suis toujours la seule humaine du coin disposée à lui donner mon sang. J'espère seulement qu'il aura la décence d'attendre de mourir de faim avant d'oser se présenter de nouveau devant moi.

Le salon est comme à son habitude dans un désordre absolu, savant mélange de meubles entassés et de draps et couvertures amassés dans tous les coins. Seul le canapé a retrouvé un aspect normal depuis notre arrivée. Logan y a visiblement élu domicile et il n'a pas l'air d'apprécier l'ancienne disposition des lieux. Declan, un torchon sur l'épaule, est adossé au chambranle de la porte menant à la cuisine et m'observe avec intérêt. Peut-être a-t-il senti qu'il y a plus que ce que j'ai bien voulu révéler, mais comme je n'ai pas menti, les battements de mon cœur ne m'ont probablement pas trahi.

J'hume l'air et souris en reconnaissant l'odeur agréable d'un poulet rôti. Ce n'est certes pas l'heure pour un tel repas, mais c'est probablement pour Logan qu'il s'est donné la peine de se mettre aux fourneaux. Les loups et leur appétit démesuré exigent une grande quantité de protéines animales pour rester en forme. Les repas que j'ai partagé avec eux dans la meute étaient souvent essentiellement constitués de viande, les légumes faisaient le plus souvent office de décoration.

— Où est la fée ? demandé-je.

Declan me désigne la petite porte cachée sur le côté de l'escalier d'un coup de tête avant de retourner à ses fourneaux. Je soupire. Un placard sérieusement ? J'ouvre la porte et découvre sans grande surprise un gamin brun, sale et maigre comme un clou qui ouvre difficilement les yeux, aveuglé par la lumière de la pièce. Ils l'ont simplement posé là, au milieu des balais, des seaux, des produits ménagers et des kilos de poussière qui trahissent le peu de considération qu'a Declan pour le ménage. Quand enfin il semble me reconnaître, ses yeux se voilent de larmes et il se met à pleurer, la bouche toujours entravée d'un lien si fermement serré qu'elle lui marque la peau.

Let's dieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant