Chapitre 39

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Tryg est le second à partir, il fait ça discrètement, se contentant d'un bref signe de la main lorsqu'il quitte notre chambre quelques heures après le départ de Ash. Declan le remarque à peine, Logan lui rend son geste et moi je me contente d'un sourire. Ça paraît si simple, si peu définitif. Puis, le Berserk prétend avoir besoin de prendre l'air et il sort à son tour, me laissant seule avec Logan qui peine toujours à me regarder en face. La pièce me paraît étrangement étroite tout à coup.

— Tu sais où tu vas aller ?

Il se masse la nuque et étend ses longues jambes hors du canapé.

— Non, je vais essayer de voyager. D'aller voir un peu le monde... Je pourrais aller au nord, et peut-être me rendre jusqu'en Angleterre. J'étais pas mauvais en anglais, je pourrais peut-être me trouver un job.

— Tu m'enverras des nouvelles, hein ?

Il relève la tête et croise une seconde mon regard.

— Je ne pense pas que ce soit une bonne idée Mave... Je risquerais de faire demi-tour.

J'acquiesce, je comprends. Il sera moins douloureux d'oublier sa famille si je ne lui rappelle pas constamment ce à quoi il a décidé de renoncer.

— Tu sais, je n'ai jamais voulu te faire de la peine. Quand je t'ignorais à la fac et même là-bas à Osen, je ne pensais pas à mal.

Il soupire, se redresse et hausse les épaules en dépliant son corps massif.

— Tu m'as prévenu un tas de fois que tu ne partageais pas mes sentiments, dit-il en se levant. C'est moi qui refusais d'écouter. Tu n'as rien à te reprocher. Et pour ce que ça vaut, je suis désolé que le vampire soit parti.

L'indifférence me paraît l'arme la plus appropriée pour combattre la douleur qui m'étreint le cœur. Alors je lui souris.

— C'était couru d'avance. Osen nous avait rabattus les uns vers les autres, mais en vérité, notre groupe n'en était pas vraiment un. Je savais qu'une fois sortie, nous finirions tous par partir chacun de notre côté. Declan ne fera pas exception.

Il hoche la tête, la bouche définitivement scellée. Il n'y a rien de plus à ajouter, les mots font trop mal. Lorsque Logan s'agenouille devant moi et dépose un baiser sur mon front, je ne recule pas, je le prends dans mes bras et le serre avec force.

— Fais attention à toi, soufflé-je.

Là encore il ne dit rien. Il me rend mon étreinte jusqu'à ce que je me sente capable de le laisser partir. Alors seulement il ramasse sa veste et quitte la chambre d'un pas lourd et traînant. Égoïstement, je regrette de ne pas avoir insisté pour qu'il reste, je sais qu'il l'aurait fait. Pour moi il est capable de bien trop de choses. Des choses que je ne suis pas prête à lui imposer, même si ça signifie que je vais le perdre à jamais.

Son départ sonne l'heure du notre et à peine a-t-il mit les pieds dehors que Declan revient, armé d'un trousseau de clefs orné du logo d'une Volkswagen.

— Nous devrions nous dépêcher, fait-il remarquer.

Je devrais peut-être culpabiliser à l'idée de voler une voiture, mais j'ai depuis un moment abandonné l'idée de prendre les décisions les plus sages et celle-ci me semble sans importance. Une voiture ? Son propriétaire devrait plutôt s'estimer heureux que ce soit la seule chose que lui coûte sa rencontre avec Declan. Je ricane en imaginant la tête que tireraient les gens s'ils voyaient la créature qui se tapit dans le corps de mon ami et lorsque je lui en fais part, il lève les yeux au ciel. Aucun de nous deux n'a envie de voir une telle chose arriver, mais l'imaginer rend la chose moins effrayante.

Let's dieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant