Chapitre 15

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Le soleil qui m'attaque les yeux me fait pousser un grognement mécontent et je me retourne plusieurs fois pour m'y soustraire. L'effort se révèle assez vain étant donné que la pièce entière est baignée de lumière et je dois finalement me résoudre à ouvrir les yeux. Je me sens étrangement bien, trop bien pour que ce soit tout à fait normal vu les évènements de la veille. C'est en m'humectant les lèvres que le goût du sang de Ash finit par me revenir et je pousse un énième grognement. Cet enfoiré va me le payer ! S'il croit que je vais sagement rester là à attendre qu'il me maltraite de nouveau pour me pousser à le détester, il se berce d'illusions. Je ne suis pas son jouet et je refuse d'être la victime de cette histoire une seconde de plus !

Je me lève donc du mauvais pied et peste sur tout ce qui croise mon chemin jusqu'à la cuisine. Incendiant les pieds de lit au même titre que les poignées de porte grinçantes et les chaises mal rangées de l'îlot central de la cuisine. Là, je ne me donne même plus la peine d'essayer de ranger et déniche un paquet de céréales bourrés de sucre. J'ai besoin de force pour cette journée, et le sucre en est une très bonne source en plus d'être particulièrement agréable à engloutir. Je dois trouver un sorcier et négocier mon passage hors de la ville pour quelque chose d'un peu moins compliqué à trouver qu'une vierge. Un vampire par exemple ? Je le lui offrirais avec plaisir !

Une fois mes batteries rechargées, je finis de m'habiller et enfile une veste qui traîne dans l'entrée. Je n'ai même pas besoin d'un odorat surnaturel pour reconnaître l'odeur de Ash ou du moins de son après-shampoing. Le côté « vampire » m'échappe, mais je suis sûre que Logan qualifierait ça de « puant ». Il fait jour dehors et je suis étrangement rassurée par la présence du soleil et les piaillements des oiseaux, même si je ne suis pas suffisamment stupide pour croire qu'ils pourraient me protéger d'un groupe de fées complétement dérangées ou d'un éventuel vampire, vu que de toute évidence ils peuvent se balader en plein jour sans problème. Une fois dehors, j'inspire un grand coup et jette un dernier regard à la porte métallique et rouillée de l'immeuble. Aujourd'hui j'ai décidé d'enfiler ma peau d'humaine courageuse, alors par question de faire demi-tour maintenant.

Je marche d'un pas décidé en direction de la position approximative de la maison de Declan. J'ignore si je fais bien de me fier à lui, mais dans l'immédiat, c'est la seule personne de cette ville qui n'ait pas cherché ni à me tuer, ni à faire de moi sa chose. D'autant qu'il a l'air relativement disposé à répondre à mes questions tant qu'elles ne le concernent pas directement. De jour les rues sont relativement vides ce qui me permet une certaine tranquillité d'esprit et je m'y retrouve bien plus rapidement sans toutes ces ombres et la panique de voir l'un de mes amis se faire éliminer sans raison.

Osen était probablement une ville agréable avant qu'on ne la transforme en prison, du moins c'est ce que suggère toutes ces boutiques abandonnées, les routes cyclables et les rangées d'arbres qui longent la chaussée. Il est clair que plus personne n'en prend soin aujourd'hui, mais l'endroit reste relativement correct en comparaison de la périphérie des murs d'enceintes qui, elle, évoque davantage une zone de guerre.

Je retrouve donc assez aisément la grille métallique donnant sur la cour envahie de mauvaises herbes de Declan et me fraye un chemin parmi elles pour rejoindre la porte. Cette dernière est en bois et mériterait un bon coup de peinture car l'ancienne, d'un bleu maladif, s'écaille très largement, laissant le bois humide et probablement en partie pourri, apparaître çà et là.

Je frappe trois coups et attends patiemment que le Berserk vienne m'ouvrir même si au vu de l'état du verrou de la porte, je pourrais tout aussi bien m'inviter chez lui sans prévenir. Une idée qui aurait pu être tentante, mais je suis venue pour lui demander un service alors autant se montrer un minimum poli. J'entends son pas lourd se rapprocher et crois même discerner le bruit d'un grognement, puis la porte s'ouvre dans un craquement sonore. Il baisse les yeux vers moi et pousse un soupir las avant de croiser ses énormes bras. Il est à peu près comme la veille, à ceci près qu'il a troqué sa chemise à carreaux contre un T-shirt gris et une veste en cuire qui le fait passer du statut de montagnard à celui de Biker. Dans les deux cas, le fait qu'il prenne à lui seul toute la largeur et la hauteur de la porte le rend impressionnant...

Let's dieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant