Chapitre 8

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Je me réveille en vrac. Comme d'habitude, les cauchemars m'ont rattrapé dès que j'ai fermé les yeux. C'est toujours la même chose, des morts, du sang, des yeux rouges luisant dans la nuit et une douleur intense qui me foudroie sur place. Je peux presque encore sentir la texture visqueuse du sang maculer ma peau. Ça me répugne, me donne envie de vomir, mais je n'ai pas grand-chose dans l'estomac, alors je me contente de me passer un grand jet d'eau glacé sur le visage et d'en avaler une rasade pour faire passer le goût métallique qui persiste dans ma bouche.

Lorsque j'étais malade, je n'avais pas à me soucier de ces cauchemars, j'en faisais peu, voire aucun, mon esprit n'était pas capable de me les imposer. Maintenant, c'est différent. Chaque nuit, ça recommence, les cadavres s'invitent dans mon lit et chaque grondement ou cri de la part d'un membre de la meute suffit à me faire sauter au plafond. Je dors de moins en moins à mesure que mes peurs prennent le dessus et je ne mange quasiment plus. Même John, le cuistot, semble l'avoir remarqué car il me fait régulièrement des remarques lorsque je passe dans sa cuisine. J'évite soigneusement le contact avec les autres, hormis Eris, Teddy, Noah et Logan qui je ne sais pourquoi me semble plus « humains » que le reste de la meute. Du moins mon cerveau les considère encore suffisamment humain pour que leur proximité ne me dérange pas.

Je ne sais pas trop ce qui nourrit cette peur en moi. Je n'avais pas ressenti ça en revenant il y a quelques jours. Elle s'est installée doucement, encouragée par les souvenirs qui envahissent mes rêves. C'est peut-être dû à un phénomène post-traumatique. Maintenant que mon cerveau re-fonctionne correctement et qu'il prend la mesure de la merde dans laquelle je me noie.

Ou alors cela me vient de leur proximité, de cet instinct que j'ai de prendre mes jambes à mon cou lorsque je les entends ou que je les vois se transformer sous mes yeux. C'est de plus en plus récurrent, la pleine lune arrive dans deux jours et on entend régulièrement les bruits de combat entre les membres de la meute. Le plus souvent cela se règle rapidement dès que l'un d'entre eux prend le dessus sur l'autre, mais parfois Evan doit intervenir pour les empêcher de saccager le repère. Dans ces moments-là, j'ai l'impression qu'on m'écrase la poitrine, mon cœur tambourine à un rythme affolant et je me sens comme un lapin pris au piège dans la gueule d'un loup. C'est même exactement le cas même si j'essaye toujours de me convaincre que ce loups là ne me veut pas de mal.

Je comprends mieux pourquoi c'est lui l'alpha. Il a quelque chose de plus, il n'est pas seulement effrayant lorsqu'il se change en loup, il dégage une sorte de supériorité palpable. Ses hurlements résonnent dans chaque partie de mon corps, ses grondements me pétrifient sur place et la violence avec laquelle il recadre ses bêtas me donne des frissons. Evan est un peu comme le jour et la nuit, à la fois absolument adorable et bienveillant lorsqu'il est humain et d'une férocité glaçante une fois transformer.

Logan a remarqué ma gêne. Comme il l'a dit, il est plus attentif que les autres lorsqu'il s'agit de moi et il devine immédiatement lorsque la panique me gagne. Le plus souvent, il m'éloigne de la scène en toute discrétion et attend patiemment que je reprenne le contrôle de mon corps. Il me rassure, me prend dans ses bras, il fait tout ce qu'il peut pour que je dépasse cette peur. Mais rien n'y fait, je suis la proie et eux, ce sont tous mes prédateurs. Il suffirait d'un rien pour que l'un de leurs coups ne m'atteigne et ne me tue. J'ai conscience que ma vie ne tient plus qu'à un fil en présence de la meute et pour couronner le tout, même celui qui cherche à me rassurer me fait parfois peur. Il le sent ça aussi lorsqu'instinctivement je me crispe dans ses bras, et je sais que ça le blesse, mais je sais aussi qu'il comprend. Lui aussi était là cette fameuse nuit, il n'a pas oublié cette sensation, celle qui vous glace le sang au moment où vous croyez mourir.

Le problème, c'est que lui aussi est touché par les effets de la lune. Il peut essayer de minimiser ça à son comportement collant, mais la bête en lui cherche constamment à se battre. Il réagit toujours pour me protéger, c'est vrai, mais dès qu'un autre loup fait un geste trop brusque près de moi, il se jette pratiquement sur lui sans raison valable. J'ai bien conscience qu'à côté d'eux je suis comme une poupée de porcelaine qu'un rien pourrait briser, mais s'il tenait vraiment à me protéger, il ne s'engagerait pas dans un combat qu'il ne peut pas gagner juste à côté de moi. Eux, ils se frappent, se mordent à tel point que la cour intérieure est régulièrement baignée de sang, mais ils s'en remettent. Quelques heures à peine et la majorité de leurs blessures disparaissent... Parfois, ils n'ont même pas besoin de transformer pour retourner la pièce et se mettre dans des états déplorables. Leur part humaine est suffisamment puissante pour être dangereuse.

Let's dieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant