Le vampire s'avance, mais au lieu de m'attaquer, il se contente de passer devant moi pour rejoindre la cuisine. L'endroit est comme dans mes souvenirs : blanc, lumineux, à des années-lumière de l'ambiance étouffante de la tanière de la meute. Il n'y a ni désordre ni meubles cassés, aucune trace de violence, ou de sang... Si je n'étais pas certaine de la véritable nature de ce type je pourrais presque croire que cet endroit appartient à un humain lambda. Enfin à un humain lambda assez riche pour se payer un appart de cette taille. Quoique, pas sûr que le concept d'argent vaille encore quelque chose à Osen.
— Quand as-tu mangé pour la dernière fois ?
J'interromps mon analyse de la pièce pour m'arrêter sur lui. Il ne me regarde pas, toute son attention est rivée sur la machine à café, et pendant un instant, je doute même qu'il se soit adressé à moi. Puis, n'entendant pas de réponse, il relève les yeux et les plante dans les miens. Mal à l'aise, je détourne le regard et me gratte nerveusement le bras.
— Je ne sais pas, un ou deux jours...
Il hoche la tête avec une grimace et se tourne vers un placard dont il sort rapidement quelque chose et me le lance à la figure. Je le rattrape maladroitement et découvre avec surprise un paquet de pâtes instantanées.
— Mange ça, si tu n'es pas en forme tu ne me sers à rien.
Sympa. Le tact est en option par ici on dirait.
Je n'ai pas particulièrement faim mais il n'a pas tout à fait tort, si je suis vouée à servir de banque de sang, il faut mieux que mon corps puisse tenir le choc. Je m'avance vers la cuisine avec prudence et il me suit du regard.
— Qu'est-ce que tu fais ?
— Au risque de te surprendre, ça ne se mange pas cru, il faut les cuire.
Je l'entends grogner quelque chose, mais je me détourne bien vite pour me concentrer sur ma « tache ». Ce n'est qu'une fois le tout placé dans le micro-onde que je me décide à lui faire face de nouveau.
— Pourquoi un vampire a-t-il besoin de tout ça ? demandé-je en désignant l'ensemble de la cuisine.
C'est une question stupide et il va probablement m'envoyer bouler, mais j'ai besoin de combler le silence, autrement il va finir par me faire suffoquer. Il relève la tête vers moi, abandonnant à regret son café pour m'adresser une grimace agacée.
— C'était là à mon arrivée.
Evidemment... Je récupère mon plat et prends place à l'autre extrémité du bar, histoire d'instaurer une distance de sécurité entre ma carotide et ses crocs. Très vite, le silence devient pesant et ma bouche s'ouvre d'elle-même.
— C'est courant de boire du café quand on est un vampire ?
Il repose sa tasse, souffle et finit par plonger ses yeux dorés dans les miens.
— C'est comme l'alcool, ça aide à supporter la soif.
Son regard glisse sur mon cou de manière assez équivoque. Je déglutis mal à l'aise et manque de m'étouffer avec mes pâtes. Je crois que dans de telles conditions, l'odeur du café me dérange un peu moins, si ça lui permet de ne pas me sauter à la gorge.
— Pratique.
Pauvre débile. « Pratique » ? non mais sérieusement Mave, fais un effort !
Il reste stoïque, visiblement pas très intéressé par l'idée d'avoir une conversation et je ne peux pas vraiment lui en vouloir vu le nombre de bêtises qui s'échappent de ma bouche en sa présence. Je baisse les yeux et tente donc de me concentrer sur ma tâche : manger. Ça pourrait être simple, mais je n'arrive tout simplement pas à avaler ces maudites pâtes alors qu'il me fixe toujours.
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Let's die
ParanormalCertaines personnes naissent avec des destins extraordinaires, ils sont, dès la première minute de leur vie, voués à quelque chose de grand. Mave ne fait pas partie de ces gens, à dire vrai, la banalité est un mot qui lui convient très bien. Du moi...