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Pdv Cléore

J'étais en train de préparer mes affaires pour le retour proche à la fac.
J'étais toujours intriguée par cette mystérieuse rencontre avec le fantôme de ce jeune homme : j'avais la vague impression qu'il y avait quelque chose qui me titillait l'esprit par rapport à lui et il ne s'était plus manifesté depuis notre première rencontre. Je croyais qu'il voulait que je l'aide pour sa mère et j'attendais un signe de sa part mais rien; c'était comme si j'avais imaginé cette rencontre.
Il y avait toujours ce malaise dans mon cœur car je savais que rien n'était résolu avec Raphaël. C'est pourquoi après avoir préparé mes affaires longtemps à l'avance, je pris un peu de temps avec ma famille pour le dîner,puis j'avais le besoin de sortir pour me détendre dans la nuit. J'ai pris des vêtements chauds j'ai mis mes boots et je sortis un peu avant minuit. Je pris la direction du banc où Raphaël et moi avions l'habitude de passer notre temps. Il me manquait je l'avoue. Mais je ne pourrai rien y faire pour le moment, ma grand-mère ne m'avait pas donné de nouvelles pour l'instant mais je sentais qu'au fond de moi qu' elle avait besoin de me parler et je sais que demain nous nous verrions. Je sentais, après quelques minutes de marche, un bruit de pas ou plutôt une présence derrière moi. Malgré moi un petit frisson me parcourut sur le moment mais je contrôlais davantage mes émotions maintenant par rapport au monde invisible. Et plus je marchait plus cette sensation d'être suivie s'amplifiait. Soudain, j'eus presque peur que c'était véritablement un humain, ce qui me poussa d'ailleurs à me retourner pour en être assuré. À ma grande surprise, c'était un homme, ce fameux fantôme que j'avais rencontré. C'était fou à quel point il me faisait penser à un humain. En voyant que je l'avais remarqué, il me fit un petit sourire puis glissa vers moi.
-Balade nocturne pour une si jeune femme, ce n'est pas dangereux ? Demanda-t-il d'un ton moqueur.
- Je crois que je côtoie le danger tous les jours en parlant avec les morts répliquai-je doucement.
Il me fixa longuement et j'ajoutai :
- Quoique... parfois je me demande si je ne suis pas plus en sécurité avec les morts qu'avec les vivants.
- Je crois que tu ne te rends pas bien compte de ce que tu dis, reprit-il en Fronçant ses sourcils.
Je gardais le silence et continuais à écouter le bruit de mes pas et j'étais un peu perturbée de constater que je n'entendais pas les siens (ses pas) puisque c'était un esprit et que j'avais l'impression parfois d'oublier qu'il en était un, c'est-à-dire à quel point il me paraissait « vivant » et bizarrement, je me sentais plus en confiance que je l'avais jamais été avec une entité un fantôme.
- Si tu es venu me voir c'est. parce que tu veux que je t'aide avec ta mère ? je lui demandais soudainement.
Ses longs cheveux se secouèrent nerveusement et il évita mon regard pendant quelques secondes avant de déclarer :
- Je ne sais pas je pense que ce serait opportun pour ma mère de savoir que je ne suis pas loin d'elle malgré ma mort.
- y'a bien quelque chose qui te retient ici non ? je pense que c'est le fait que tu n'es pas en paix par rapport à ta mère.
- je suis mort si brusquement je ne sais pas... j'ai l'impression de n'être démuni face à ce qui m'est arrivé et puis, je pense que je n'arrive pas vraiment à accepter mon état : le fait que je sois vraiment mort pour de bon et que tout ce que j'espérais dans la vie est réduit à néant désormais.
Ses mots me touchèrent affreusement et j'essayais de le dissimuler en évitant son regard. J'aperçus le banc sur lequel Raphaël et moi... notre banc... et une certaine gêne s'empara de moi car il n'était pas là et au lieu de penser à lui, je discutais avec un esprit.
qu'est-ce qui tourne pas rond chez moi?
Je me demandai ce qu'il faisait en ce moment : pensais-t-il encore à moi ? ou bien était it-il déjà retourné auprès de Chelsie?
- Quelque chose te préoccupe n'est-ce pas? murmura-t-il.
Je croisais ses prunelles sombres qui ne brillaient plus de vie.
- En effet... mais bref il n'est pas question de moi maintenant. Je ne vais pas tarder à repartir pour la fac dans les prochains jours alors si tu veux pour que je t'aide pour ta mère, il faudrait y aller demain.
Il continuait à me contempler, comme s'il essayait de comprendre, d'accéder à mes pensées.
- Tu ne mérites pas de souffrir de la sorte ni tout ce qui t'es arrivé. Tu le sais n'est pas ?
J'en restais bouche bée. Que savait-il de moi ?
- Bien plus que tu ne le crois, souffla-t-il, en se rapprochant vers moi.
J'en eus la chair de poule de sa proximité. L'énergie qu'il dégageait me troubla, brouillait mes sensations, altérait mes émotions.
- Qui es-tu ? m'enquis-je, en reculant de quelques pas. Je n'ai jamais vu un esprit comme toi aussi...
- Familier ? sourit-il à moitié. Pourtant on s'est déjà croisés il y a quelques mois... de mon vivant...
Sur cette énigme, il me fit un clin d'œil et se volatilisa sans que je ne puisse répliquer.
Et quand je me retournai... il était là en face de moi, je ne m'y attendais tellement pas que je sursautai comme une démente.
- «  Les grands esprits se rencontrent... », chuchota-t-il, près de mon oreille.
Je clignais des yeux et il disparut pour de bon.

* * *
PDV Raphaël

Des trous de mémoire. Des moments de vide. Des instants de souffrance et un besoin de faire le contraire de ce que j'aspirais vraiment dans ma vie.
En arrivant à la maison, j'avais essayé de me souvenir de ce qui s'était passé précisément chez la grand-mère de Cléore. Mais ce fut inutile. Je me souvenais juste d'être entré dans la boutique, d'avoir parlé un peu avec elle, d'avoir goûté à son thé  et puis le trou noir.
Quand j'ai repris conscience -si je puis dire- j'étais à mi-chemin de chez moi et une atroce douleurs me vrillait le crâne, sans parler de l'énorme cavité qu'était mon cœur désormais.
J'étais tombé tellement bas que je ne me voyais plus jamais remonter à la surface et retrouver la lumière, celle de l'espoir. celle qui était présente dans les yeux de... d'elle.
Je savais que ma mère était inquiète pour moi et j'essayais de faire bonne figure ce soir afin qu'elle puisse sortir avec son compagnon mais elle déclina son invitation afin qu'elle puisse rester avec moi. Au fond, j'étais heureux qu'elle fût avec moi car je me sentais terriblement vulnérable en ce moment, plus moi-même et surtout je craignais de ce qui allait advenir de mon existence lorsque je retournerais en cours. Qu'allait-il advenir de l'appartement que je partageais avec Cleore?
Je ne savais pas vraiment quoi faire mais au pire. j'allais demander à Sam ou à Éric de m'héberger car on ne pouvait plus rester ensemble elle et moi, étant donné les circonstances et notre rupture.
J'avais à peine mangé au dîner et ma mère s'inquiétait du fait que j'avais perdu beaucoup de poids : j'étais devenu l'ombre de moi-même autant à l'intérieur qu'à l'extérieur.
À vrai dire, je n'avais pas vraiment envie de retourner à la fac, de subir cette pression et, notamment je l'admets, de revoir Chelsie et de ressentir ce quej'avais ressenti avant de retourner en vacances ici. Comment cette fille que je détestais au lycée avait pu me séduire au final ? Comment ma répugnance s'est transformée en un désir brute de cette fille ? Je ne croyais pas que ce fut le résultat de mes hormones car un cerveau intelligent sait se contrôler et surtout contrôler ses besoins primait si je puis m'exprimer ainsi. J'avais toujours eu ce cerveau intelligent qui était différent (sans me vanter) du cerveau de mes camarades au lycée notamment. J'avais réussi à aller au-delà de l'attirance physique, à réprimer ses tentations et à vouloir garder cette idéal amoureux. Comment cela a-t-il pu changer aussi soudainement ? Être loin de cette ambiance de la fac, être loin de Chelsie me permettait de réfléchir bien que, quand j'essayais de creuser longuement la situation comme maintenant, une sorte de torpeur essayait de réduire à néant ma volonté, mes idées, mon avis sur ces questions et m'encourageait à ne pas réfléchir, à me laisser aller, à me laisser dominer. Je réfléchissais ainsi sur mon lit, après avoir regardé un film avec ma mère. Cette fatigue, ce brouillard ne cessait de m'anéantir, d'anéantir ma raison , d'annihiler mes émotions. Je me sentais faible physiquement, moralement. Une force sombre voulait me contrôler ou mon côté sombre voulait prendre le dessus mais il y a quand même une part de moi qui résiste à cela, une petite partie mais qui semblait infinie, plutôt dur à expliquer, mais c'était cette petite partie-là, cette lueur, qui m'empêchait de sombrer véritablement du mauvais côté.

Murmures 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant