Chapitre 36

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Rien que d'imaginer ça te donne la nausée. Tu sors précipitamment du bureau de Jonathan pour courir aux toilettes où tu vomis ton petit-déjeuner. Tu t'assois à côté de la cuvette et tu pleures toutes les larmes de ton corps. Jonathan vient te voir et tu sens son regard désolé sur toi. Tu pleures pendant très longtemps, tellement que des patients curieux sont venus se plaindre du bruit. Dr. Yeager, quant à lui, reste auprès de toi , il s'est assis en face. Vous ne parlez pas, vous vous regardez simplement. Il te sourit de temps à autre. Lui aussi vient de réaliser à quel point tu es en proie face à une immense souffrance.

Les minutes, (ou les heures ?) passent. Jonathan finit par s'exprimer, le visage grave :

« Ella, allez prendre un peu de forces.

- Je n'ai pas envie de manger.

- Vous le devez, levez- vous, je vais vous accompagner jusqu'au self. »

Il t'aide à te relever car tu tangues beaucoup. Tu sens que tes genoux ne vont pas tenir. Pourquoi est-ce que tu es une victime à chaque situation ? Même quand tu fais du mal à quelqu'un, c'est toi qui en ressors la plus chamboulée et blessée. Tu te poses lourdement sur une chaise dans la cafet, même pas à ta place habituelle. Jonathan apporte un plateau bien garni et s'installe en face de toi. Il commence à manger en silence, mais tu sens son regard t'observer. Il est inquiet, très inquiet.

Tu as l'impression d'avoir été vidé de ton âme. Tu n'as plus de forces ni d'énergie. Tu contemples le sol, tes cheveux devant tes yeux pour éviter qu'on voit ton visage rougi et tes yeux explosés à cause de tes pleurs. Alors c'est ça une rupture amoureuse ? Est-ce que ça fait aussi mal que ça ou tu es une exception ?

Puis ton psy finit par te raccompagner jusqu'à ta chambre et demande à Amélie de prendre le relais et de te surveiller. Il te cale un rendez-vous par jour pour toute la semaine prochaine. Tu sens que tu n'auras pas la force d'y aller. Tu es en train de redescendre, tu sens que tu as perdu toute motivation de te battre pour sortir d'ici. Tu serais tellement plus tranquille si tu te laissais abrutir par les médicaments comme ça tu n'aurais plus à revivre ça.

Tu fermes les volets dans ta chambre et tu t'écroules sur le lit. Amélie essaye de te relever mais tu la repousses.

« Pitié, laissez-moi tranquille, j'ai besoin de temps. »

Les deux se regardent, un peu horrifiés. Oui, tu viens probablement de faire une rechute.

Le soir, tu ne viens pas manger dans la salle commune. Tu n'as pas bougé de mon lit, Amélie a essayé de te tirer du lit mais impossible. Tu es comme un poids mort. Elle toque vers 22h30, un plateau dans les mains, elle te le pose au bout de ton lit. Elle te regarde et passe une main dans tes cheveux. Tu as le regard dans le vide, tu ne réagis même pas.

Tu ne touches pas à ton plateau. Tu t'endors, le ventre vide. Amélie vient te réveiller le lendemain avec un autre plateau. Elle te sermonne quand elle voit que tu n'as pas touché à ta nourriture d'hier, mais c'est comme si elle était dans un autre pièce : sa voix est étouffée et tu ne comprends pas ce qu'elle te dit.

Lorsqu'elle sort, tu manges un morceau de pain et tu bois le verre d'eau. Puis tu te recouches sur le dos et contemple le plafond, étendu comme le ciel. Tu es vide, tu ne ressens plus d'émotions, rien. Tu ne sais pas combien de temps tu restes comme ça, tu finis par t'assoupir car tu n'as quasiment pas dormi de la nuit, hantée par le regard indifférent de Livai lorsqu'il est sorti du bureau.

Une routine s'installe, Amélie vient et poser les plateaux pour manger mais tu n'y touches quasiment pas. Elle te secoue frénétiquement par les épaules mais tu ne réagis toujours pas. Une partie de toi est morte. Tu vas devoir mettre beaucoup de temps pour te reconstruire. C'était le premier homme pour qui tu es tombée amoureuse.

Trois jours plus tard, tu n'as toujours pas bougé de ton lit, hormis pour prendre des douches. Amélie est exaspérée et terriblement inquiète. Même Marion est venue te voir pour essayer de te réconforter. Tout ce que tu te souviens, c'est voir son visage avec les larmes sortir de la pièce. Elle ne pouvait pas imaginer que tu étais dans cet état-là.

Tu as loupé tous les rendez-vous avec Jonathan, Amélie lui a dit que c'était impossible dans ton état. Alerté, il est venu te voir en fin de semaine. Ça fait d'ailleurs 7 jours pile que tu es comme ça. Il était choqué. En l'espace d'une semaine, tu avais déjà perdu du poids, tes cernes s'étaient creusés. Tu avais pris dix ans de plus.

« Ella, écoute-moi je t'en prie. » Pas de réponse. Il reprend :

« Je vais maintenant venir dans votre chambre pour nos rendez-vous, vous devez absolument me parler. » Il fait signe à Amélie de sortir qui a les larmes aux yeux.

« Ella, je suis votre psychiatre. Vous pouvez tout me dire, je garderai tout sur secret professionnel sauf si cela vous met en danger. Votre situation est déjà très instable. Vu votre état, je me doute que vous n'aviez pas une simple relation avec Livai. »

Tu frémis à son nom. Eh merde, il a tout deviné, tu vas devoir tout lui dire.

« D'accord Jonathan, mais laissez-moi tranquille pour la fin de cette journée, je vous expliquerai demain. »

Ça fait une semaine que tu n'avais pas parlé hormis pour pleurer. Tu as donc une voix très grave qui impressionne Dr. Yeager aussi bien que moi.

« Entendu Ella, prenez des forces pour demain. »

Il sort et tu l'entends discuter avec Amélie sur comment il va procéder mais il se tait à propos de ses doutes sur ta relation avec Livai. Tu es parfaitement consciente que si tu dis tout, Livai sera interrogé. Tu vas te contenter du strict minimum, c'est-à-dire signes de tendresse et dire tes sentiments sans révéler qu'ils sont possiblement réciproques.

C'est un demi-mensonge car disons que tu cacherais le principal. Ça se trouve, Jonathan ne dira rien. Techniquement, tu n'as vu aucune règle dans le règlement qui disait qu'on n'avait pas le droit de tomber amoureux d'un patient. Tu es bien trop naïve, évidemment qu'il va prévenir tout le monde ! Mais est-ce que cette situation te met en danger ? Techniquement non, mais de son point de vue certainement.

Qu'est-ce que tu vas pouvoir lui dire ? Tu vas devoir puiser dans tes dernières forces pour mentir et lui cacher tout ce tu as fait. Comment vas-tu t'en sortir ? Des larmes coulent sur tes joues, tu viens de t'engouffrer dans une impasse où tu vas certainement blesser encore plus Livai. Mais tant pis, tu ne peux plus te sacrifier pour lui, où tu sortiras avec de graves séquelles. Alors, lorsque Amélie apporte ton plateau, tu te fais violence pour tout manger pour être assez forte demain.

Livai X Reader [No time to think]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant