Chapitre 21

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Et alors, dans un doux murmure qui me chatouilla les oreilles, elle me demanda :

– Ça va ?

– Oui, soufflai-je sur le même ton.

Elle m'embrassa de nouveau, et même si je m'attendais à un autre baiser, un baiser que je l'espérais tout du moins, celui-là non plus je ne l'avais pas vu venir ; et contre rien au monde, je n'aurais échangé ce moment. Je sentais sa peau contre la mienne, son souffle face au mien, son parfum – mélangé à l'iode de l'océan – m'embaumer de loin en loin. C'était ce genre de moment qui vous marque à vie.

Ses lèvres étaient si douces, si accueillantes, si agréables à embrasser. La troisième fois, c'était moi qui m'étais jetée sur ses lèvres ; je voulais m'assurer que tout ça se passait vraiment pour de vrai, que tout n'était pas simplement une invention de mon esprit...

Je souriais béatement, tout près de son visage, tout me semblait irréel, comme tout droit sortie d'un rêve trop beau. Et je n'arrivais pas à m'empêcher, par moments, de pouffer doucement de rire, toujours accrochée à ses bras ; j'étais bien près d'elle, rien ne pouvait m'atteindre.

– On va peut-être sortir de l'eau, qu'est-ce que t'en penses ? me chuchota Pénélope, ses lèvres au bout des miennes, son nez se frottant au mien.

– Oui, je veux bien !

Puis elle me posa ; je chancelai quelque peu, toute chamboulée encore par ce qu'il s'était passé. Je débordais de cette énergie qui brûlait en moi sans vaciller, et j'aurais pu soulever des montagnes si je le voulais ; mais je marchais, doucement, derrière Pénélope qui, du bout de ses doigts, me tenait la main. Et je me sentais alors moins coupable de la regarder, de regarder son corps, ses hanches, ses fesses. C'était tout un pan, tout un univers méconnu qui allait s'offrir à moi. Je débordais d'impatience et d'excitation, de mignonnerie et de joie.

Elle s'était enveloppée, sur la plage, dans sa serviette ; et comme je ne me retenais plus de l'épier, elle avait remarqué mes yeux baladeurs. Elle me sourit, s'assit à même le sol, et ouvrit sa serviette pour m'inviter à la rejoindre, ce que je fis sans hésiter !

– On est pas bien là ? me glissa-t-elle à l'oreille, le regard perdu dans l'horizon.

– Si, si, murmurai-je.

Enfin. Enfin ! on avait notre moment à nous deux ! Notre moment sans que personne, en particulier Fredo, ne vienne nous interrompre et nous perturber. Mais en réalité, je ne pensais pas qu'il allait, ce moment, arriver aussi vite. Alors, soudainement, prise par ma nature de grande pessimiste, des petites inquiétudes, que j'essayais déjà de nier, de détruire, commençaient à faire surface ; puis, la gorge désagréablement nouée :

– Mais alors... ça veut dire que...

– Hum ?

– Bah que...

– Que quoi ?

– Bah toi et moi, ça veut dire que... qu'on sort ensemble ?

Pénélope, dans un premier temps, ne dit rien ; elle me regardait juste, son sourire naturel aux lèvres, ses yeux vagues dans les miens. Puis elle se tourna de nouveau vers l'océan, souffla un peu, et me répondit « tu es mignonne, » avant de se taire de nouveau. Sans doute, elle sentait mon inquiétude grandir et mes doutes s'assombrir. J'avais peur d'avoir posé la question qu'il ne fallait pas poser, d'avoir tout gâchée. J'avais peur de m'être précipité... quelle idiote je fais. Bien sûr qu'on ne sortait pas ensemble ! c'était juste un baiser, rien de plus ! et puis, qui voudrait sortir avec une gamine comme moi ?! Pénélope ? sûrement pas !

– C'est compliqué, ajouta-t-elle finalement.

– Pardon ?

– C'est compliqué, répéta Pénélope dans un soupir.

– Comment ça ? osai-je demander.

Alors, sans jamais lâcher l'horizon du regard, elle posa sa tête contre mon épaule :

– Je t'apprécie beaucoup, Céleste...

Mon cœur se serra.

– Vraiment, je ne rigole pas, continua-t-elle. Je me sens bien à tes côtés, et ça faisait longtemps que je n'avais pas ressenti ça. Je ne sais même pas pourquoi, et c'est ça le plus fou. Mais... et ça ne sert à rien de le cacher, ou de faire comme si ce n'était pas le cas, mais toi et moi... c'est particulier... ne serait-ce que le fait que-

– Que tu sois mon ancienne prof ? lui coupai-je la parole sur le ton de l'humour.

– Oui, répliqua-t-elle dans un rire. Par exemple... mais c'est pas tout, il y a aussi...

Et après une courte pause :

– Il y a aussi lui, conclut-elle.

– Je sais... murmurai-je.

J'essayai de la regarder, d'appeler son regard. Mais elle, elle restait sur l'horizon, elle cherchait au loin une réponse, peut-être, à tous ses soucis, en vain... Puis, elle se tourna vers moi, brusquement, un triste sourire d'une oreille à l'autre, et sur un ton doux-amer :

– Tu ne veux pas, pour le moment, qu'on profite juste de l'instant, toi et moi, rien que toi et moi. J'ai envie d'oublier tous mes problèmes, tous ces trucs qui m'angoissent et qui m'empêchent de dormir la nuit... ça te dit ?

Elle me suppliait presque, et je ne pouvais pas lui dire non. Elle n'avait pas tort... Il n'y avait aucune raison de ne pas profiter du moment, et puis zut ! on n'a qu'une jeunesse ! Moi qui, secrètement, fantasmais sur elle, sans jamais l'avouer à personne, ni même à moi ! Les questions, je me les posais plus tard ; et les angoisses attendraient aussi !

Alors, en guise de réponse, je l'avais embrassée, une fois encore ; mais cette fois-ci, je m'étais permise d'explorer son corps. Je ne savais pas quelle audace m'avait poussé à le faire, moi qui étais si impressionnée par elle d'ordinaire... mais on semblait être sur un pied d'égalité, la différence d'âge finalement, n'avait pas de réelles importances. Et une main sur sa hanche, l'autre sur son flanc, impunément, je la palpai doucement, grande gamine que j'étais, un rire taquin aux lèvres.

Mais face à ma désinvolture soudaine, Pénélope repris le dessus, et l'ordre des choses revint. Elle avait posé une main sous ma joue, contre mon cou, son pouce me caressant la pommette. C'était un long baiser passionné, je me retrouvais sous Pénélope, allongée sur le sable. Je goûtai à sa langue, ses lèvres, son souffle.

Et sans que je m'y attende, sa main m'avait saisi un sein ; ça m'électrisa de loin en loin, et je m'étais cambrée, taisant une plainte languissante au fond de ma gorge. Alors Pénélope se releva. Elle avait fini sur moi, à califourchon, sa serviette toujours sur ses épaules. Le souffle rapide, le regard pétillant de folie, elle me dit :

– Tu viens ?

– Où ça ? dis-je entre deux respirations.

– À ton avis, bêta ?! répliqua-t-elle vivement, un large sourire aux lèvres, et en tirant quelque peu sa langue.

Je fis oui de la tête, frénétiquement, et je bouillonnais de l'intérieur !

Parfois, je ne pense à rien d'autre que toi. (GxG)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant