Chapitre 35

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On était revenue dans son camping-car, après avoir tout ranger et nettoyer sur la plage. Pénélope s'était mise à l'aise, pendant que je l'attendais patiemment, à moitié nue et allongée dans son lit. Il n'y avait plus aucun son à l'extérieur, du reste seul le bruissement silencieux de ses vêtements, le tintement de ses bijoux, et quelques insectes nocturnes qui chantaient leurs meilleures berceuses ; tout le monde semblait dormir et le temps se cristalliser en ce moment précis. Elle m'eut regardé, quand elle éleva ses boucles d'oreille, et toujours avec cette douce gaieté qu'elle portait sur ses lèvres, elle me souriait, imperceptiblement.

— Alors, qu'est-ce que tu en as pensé de cette petite sauterie ? me demanda-t-elle une fois déshabillée.

Je m'étais décalée, la laissant une place pour qu'elle puisse s'installer à son tour, puis d'une moue plutôt convaincue :

— C'était bien, très bien, même ! C'est la première fois que je vois Frédo dans cet état !

— Oh ! s'écria-t-elle doucement en se glissant à mes côtés. Et encore, il s'est bien retenu cette année, si tu étais là les autres fois, tu l'aurais vu !

Et, après un soupir, elle s'était carrément relâchée. Elle s'affala comme si elle avait tenu une posture rigide et stricte toute la journée. Allongée sur le dos, à peine calée dans mes bras, elle posa sa tête contre mon épaule. Les yeux clos, un sourire aux lèvres, elle me demanda alors, sur ce ton que l'on prend quand on connaît par avance la réponse à notre propre question :

— Est-ce qu'on n'est pas bien là ?

— Si, très bien ! murmurai-je en lui bisant le haut du crâne.

J'avais laissé un silence, cet instant était trop parfait pour être interrompu, et enfin, sur le même ton :

— Moi aussi, en fait...

— Toi aussi quoi ? rétorqua Pénélope en relevant doucement ses yeux vers moi.

— Moi aussi, répétai-je. Moi aussi, je sais que je t'aime.

Je savais que tout cela était prématuré, que les choses s'emballaient bien vite, que cette erreur je l'avais déjà commise ; mais force est de constater – même si l'on ne croit pas au destin, ou autre fatalité de la vie – que quand deux êtres, deux âmes, s'accordent et raisonnent dans un même unisson, que tout est alors prédestiné. Ou du moins le croire que tout ça n'est pas une tocade ou simple folie passagère.

— Comment tu nous vois ? dans l'avenir, je veux dire... reprit Pénélope après avoir déposé un baiser sur ma bouche.

— Je ne sais pas, dis-je simplement.

Et c'était vrai. Mais je n'en avais pas peur ; au contraire, ça me grisait. Traverser ce flou, braver l'incertain à ses côtés, m'emplissait de cette joie des plaisirs interdits. Cet amour naissant et profond était le fer de lance de notre relation, l'énergie qui nous nourrissait et qui balayait, d'un revers de main, toutes les craintes futures. Rien ne semblait pouvoir nous atteindre.

— Moi non plus, mais je le sens bien, conclut-elle en me serrant dans ses bras.

Sur ses mots, sans réponses ni précision, l'on s'était couchée, trop fatigué l'une et l'autre pour entreprendre quoi que ce soit. Quelques caresses seulement – chastes et innocentes – et l'on s'était endormies d'un sommeil profond.

Les jours qui suivirent furent remplis de légèreté, d'amour et d'eau fraiche – quand ce n'était pas de bières et autres alcools bons marché. C'était un amour de cocagne, plein de tendresse et de passion, de ces jours où l'on s'aime sans compter, et de ces nuits où l'on partage son corps et ses sens sans retenue. Je ne mettais plus les pieds dans ma tente, et dormais exclusivement dans les bras de Pénélope. Certainement, une fois ou deux, peut-être que quelqu'un aurait pu nous surprendre dans nos ébats. Tant pis ! parce qu'on était bien !

Parfois, je ne pense à rien d'autre que toi. (GxG)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant