Chapitre 17

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Pénélope me regarda un instant, plaça sa main sur sa gorge, puis d'un coup de tête rapide, jeta un œil vers sa chambre. Elle me regarda de nouveau, d'un air de réflexion profond, et, dans un souffle rapide, me dit :

– Laisse-moi le temps de me changer, tu restes ici ?

– Oh bah... non... je ne vais pas t'embêter pendant que tu te prépares...

Puis, dans un éclat de rire, elle me répondit :

– Ne t'inquiète pas ma petite Céleste, tu ne m'embêtes pas ! et puis, je vais me préparer vite ! Je sais déjà comment je vais m'habiller.

– Ma petite Céleste, me chuchotai-je, les joues toutes rouges.

– Tu vas voir, continua-t-elle en se dirigeant vers sa chambre dans son grand kimono floral qui, de son pas rapide, montrait sans pudeur le haut de ses cuisses.

Je détournai le regard de son déhanché félin, et au moment où elle passait les fins rideaux translucides de sa chambre, les soulevant d'une main rapide, j'aperçus sur son lit, ici et là, des choses que je n'aurais pas pensé voir en sa possession. Et mon imagination ne me jouait pas des tours, je savais ce que je voyais.

Pour l'un, les formes étaient, bien que peu suggestives, ce qu'elles étaient. Longiforme et couleur pastel, je ne pouvais pas me tromper sur la nature de ce jouet. Pour l'autre, d'une forme un peu plus fantaisiste, ovoïdale même, je n'étais pas très certaine de la manière dont ça s'utilisait. Mais les voir là, à la vue de tous, avaient créé en moi une petite montée de chaleur ; cette intimité sulfureuse, brusquement dévoilée m'avait, comme qui dirait, émoustillée. Mais pour une fois, et c'était étrangement drôle, je ne me sentais pas coupable de ressentir ça pour elle.

Alors, Pénélope, sans se retourner, sans montrer la moindre gêne, releva son drap sur ses affaires, les cachant au dernier moment, se disant sans doute que je pouvais les voir ; c'était trop tard.

Elle ferma le rideau, et je ne vis plus que sa silhouette floue qui se mouvait dans sa chambre, et de temps en temps, n'entendis seulement que le tintement de ses bijoux, le bruit caractéristique que diffuse le flacon de son parfum ; Puis, assez vite, il est vrai, elle revint devant moi, tout apprêtée. Et j'étais restée, la bouche entrouverte, à la regarder. Elle était belle, simplement habillée, rien d'extravagant, ni de provocant, elle gardait cette beauté simple, sans artifice ni maquillage.

– Alors, commença-t-elle en finissant d'étaler son parfum sur l'intérieur de ses poignées.

– Alors ? répétai-je, un peu confuse et troublée par sa beauté soudaine.

– On fait quoi ce soir ? tu as prévu quelque chose en particulier, un lieu, un bar ? non ?

– Euh... fredonnai-je dans un long son continu et maladroit.

En réalité, je ne m'attendais pas du tout à aller aussi loin, donc je n'avais pas prévu grand-chose, étant donné que je m'étais seulement imaginé un refus catégorique à mon invitation ; alors Pénélope, avec un large sourire aux lèvres, comprenant sans doute mes pensées :

– D'accord, je vois ! Bon, bah suis moi, j'ai une idée alors.

Elle me tira par la poignée, sa main était douce et chaude, et en un rien de temps, d'un battement de cils, et on était déjà en train de marcher dehors, sous le regard intrigué de Monarque. Je suivais tant bien que mal les grandes enjambées de Pénélope et l'on se dirigeait à l'arrière du bungalow de Frédo.

On passa alors devant tout le monde, encore assis devant une table vide, un jeu de cartes, et une radio qui crachotait par moments des bruits parasites ; Pénélope ne les avait même pas regardés, contrairement à moi qui, tout aussi étonné qu'eux, ne savait pas vraiment ce qu'elle voulait faire. Néanmoins, ils semblaient tous assez ravis et rassurés de la voir hors de son camping-car, bien habillée et un peu plus joyeuse que d'habitude.

Et Frédo me lança un regard qui voulait sans doute dire « je ne sais pas comment tu l'as convaincu de sortir, mais chapeau ! »

Je lui rétorquai d'un simple sourire, puis, on s'arrêta à l'arrière du logement de Frédo, à l'ombre des loupiottes de sa terrasse ; quelques tas de bois, des feuilles mortes, et une grande bâche qui couvrait je-ne-savais-quoi. Elle la retira d'un coup de main, balançant par la même occasion tout un tas de feuillages et de poussière, et je vis se découper dans la pénombre du bungalow une sorte de scooter, du genre italien, urbain et rétro, d'une couleur vert d'eau, et mes faibles connaissances en la matière ne me permettaient pas définir la marque du bolide.

– Tu es déjà monté sur un truc comme ça ? me demanda Pénélope, pas peu fière.

Je fis non de la tête, chevaucher sur une moto, un scooter, ou tout autre cyclomoteur était une chose prohibée par mes parents ; alors, montait déjà en moi le trac de faire des choses interdites, ce pic d'adrénaline que provoque la douce flamme de la rébellion juvénile. Je ne tenais plus sur place, entre la peur, l'excitation, et tous ces papillons qui batifolaient dans mon ventre.

Elle releva la béquille et tira l'engin à la lumière. Pénélope émit un petit hochement de tête de satisfaction quand elle remarqua que les clés étaient déjà sur le contact ; mais, en tournant ses dernières, le scooter refusa catégoriquement d'émettre ne serait-ce qu'une petite toux de moteur. Alors, depuis l'autre côté de la maison, Frédo lui dit :

– Il y a un jerrican d'essence dans le placard à bazar ! Peut-être que tu en auras besoin... Tu y trouveras les casques, aussi !

– Merci, rétorqua-t-elle en soufflant sur l'une de ses mèches qui était tombée sur son visage.

Elle remit la béquille, me dit de la suivre et se dirigea vers ledit placard. Elle sortit deux casques ronds, très kitch, mais qui collaient parfaitement au style de la petite moto, me les passa ; puis, elle prit un petit bidon à poignée, tout rouge, qu'elle tint avec deux doigts seulement et qui avait, et de loin déjà, cette odeur typique des stations-service. Une fois le plein fait, avec une précaution absolue, elle s'essuya les mains dans le vide, s'assura que rien ne restait sur ses doigts et démarra le scooter.

Et dans un vrombissement caractéristique, le moteur rugit, pour le plus grand plaisir de Pénélope, et du mien aussi ; elle tapota alors l'arrière du siège, comme pour m'inviter à monter, me prit un casque des mains, avant de l'enfiler d'un coup et de s'installer au guidon ; même avec ce couvre chef, ridicule, il fallait l'avouer, elle restait très-mignonne, très-charmante. Je fis de même et m'assis derrière elle.

Une fois installée, beaucoup trop près de Pénélope, je m'étais seulement accrochée aux poignées métalliques de mon siège, trop timide encore pour oser toucher ses hanches, et ça malgré ses invitations multiples. Mais au moment où elle mit un coup d'accélérateur, je l'avais saisie, par réflexe surtout ; et dans cette embrassade accidentelle, j'avais mon visage collé contre son dos, dans l'échancrure de son caraco noir.

Alors tout son parfum m'enivra. Pénélope rigolait à gorge déployée. Et moi, prise dans les douces bourrasques de l'accélération, la fragrance du parfum de Pénélope, l'agréable chaleur de sa peau, je gardais les yeux fermés, un grand sourire aux lèvres.

Parfois, je ne pense à rien d'autre que toi. (GxG)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant