Chapitre 15

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 Lana Parker


La pluie s'est changée en neige boueuse, les feuilles brunes qui recouvraient le sol en givre redoutable, et la détermination générale du début d'année en une nervosité maussade. Les paroles de Tyler n'auraient pas pu mieux se confirmer. Trop prise dans l'enchaînement des événements, entre mes révisions intensives, mes entraînements pour la course, et mes tentatives ratées de rapprochement avec Adam, je n'ai même pas vu la fin du trimestre approcher. 

Je pose le point final à ma rédaction et relève la tête complètement épuisée. C'est justement sur lui que mon regard tombe : Adam. Impossible de savoir ce qu'il lui est arrivé pendant les vacances de Novembre, mais après son départ précipité lors de notre cours de soutien, il n'a refait surface qu'une semaine après la reprise, plus apathique que jamais. 

Tous ces petits détails que j'avais réussi à creuser se sont refermé sur eux-mêmes, comme s'il s'était vidé pour de bon. J'ai l'impression de communiquer avec un robot chaque fois que je lui adresse la parole. 

Mon regard glisse de lui à Axel, avachis les bras croisés devant sa copie, qui ne présente qu'un seul paragraphe. Les quatres heures laissées par Madame Mclynn pour son contrôle de fin de trimestre approche de leur terme, et il n'a même pas rédigé une introduction complète. 

À lui tout seul, il incarne parfaitement cet état d'esprit nerveux et dépassé qui règne au pensionnat. La troisième année est la plus dure, le niveau est haut, le mauvais temps incessant pèse sur le moral de tout le monde, et pour ne rien arranger, l'écran qui affiche le classement les vendredi soir a été endommagé par le givre. 

Déjà deux semaines que l'on a pas vu le top dix. 

Selon Astrid et Kally c'est la première fois que ça arrive, et c'est loin d'être anodin. C'est comme si d'un coup, tout le monde avait le même avantage que Hacker, un anonymat qui permet de monter sans problème. 

— C'est terminé, annonce Mme Mclynn en se relevant derrière son bureau. Je vais vous appeler par ordre alphabétique, vous déposerez votre copie puis vous sortirez. 

Je ne relis pas mon travail par peur de me rendre compte qu'il est catastrophique, et patiente en tapant du pied. Mes notes n'avaient jamais autant compté pour moi. Quand vient le tour d'Axel de rendre son devoir, la professeur lâche une exclamation offusquée. 

— Dix lignes monsieur Laurens ? Est-ce de la provocation ?

Axel ne répond pas, il a enfoncé ses mains dans ses poches mais malgré ça j'arrive à voir qu'elles tremblent. Tout le monde arrive à voir qu'elles tremblent, personne ne manque une miette de cet échange, et je vois de la satisfaction se peindre sur un paquet de visages.

— Je vais vous retirer vingt points pour ce manque d'efforts inadmissible, déclare madame McLynn. 

— Vous pouvez pas faire ça. 

— Comment ? Et pourquoi je ne pourrais pas faire ça ? 

— Parce-que j'en parlerais a mes parents et vous aurez des problèmes ! répond Axel d'un ton tranchant. 

Il y a un silence de mort. Tout le monde était déjà au courant de sa situation familiale et des avantages qu'il en tire, mais le dire à voix haute devant toute la classe, et surtout s'en servir frontalement contre un membre du personnel, c'est autre chose. Mon premier réflexe est de vérifier si Adam, sorti juste avant Axel, à eu le temps d'entendre cet échange. 

Je me penche pour avoir une vue du couloir et le repère juste à côté de la porte. Il ne pourra pas nier qu'il y a quelque chose de malhonnête ici après avoir entendu ça. Pourtant... Il semble encore une fois complètement indifférent. 

Le pensionnat KeppelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant