Chapitre 32

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Lana Parker



Il n’est pas encore six heures et le ciel s’éclaircit à peine derrière les volets quand je vois Noah sortir de la chambre sans bruit. Astrid et Kally ont dormi ensemble dans le lit de cette dernière pour ne pas le réveiller hier, il n’y a aucun mouvement de leur côté, pour ma part je n’ai pas pu fermer l'œil. Je me lève aussi, enfile un jogging, et rejoins Noah dans le couloir. 

— Hey, ça va mieux ? 

Il regarde son téléphone en soupirant avant de répondre :

— Nan ça va pas, le réfectoire ouvre que dans une heure et j’ai la dalle. 

Ça me fait sourire. 

— Si c’est ça ton seul problème, alors oui, ça va mieux. 

Il ne dit rien. Je penche la tête pour observer son visage alors qu’il se perd dans la contemplation d’une tâche sur le sol. C’est loin d’être son seul problème en réalité, je le sais bien. J’aimerais pouvoir prétendre l’inverse, lui proposer d’aller piquer à manger en cuisine et ignorer tout le reste, mais j’ai trop de questions. Pourquoi il était dans cet état hier ? Est-ce qu’il a vu Adam arriver ? Est-ce qu’il sait ce qu’il foutait là ? Il faut que je sache. 

— À propos d’hier… 

— J’ai rien à te dire, m’interrompt-il aussitôt. J’avais vraiment trop fumé, je savais même pas qui était au bord du toît jusqu’à ce que Kally et Astrid me l'expliquent en me ramenant dans leur chambre… J’ai aucune idée de pourquoi Adam a fait ça. 

Je laisse passer un silence sans cesser de détailler son expression. Il fait exprès d’éviter mon regard. 

— Si on oublie Adam une seconde… T’as bien une idée de ce qui t’es arrivé à toi ? Pourquoi t’as fumé comme ça ? 

— Je sais pas, pour fêter les vacances. 

— Bien sûr, quelle bonne idée ! T’aurais dû m’inviter à ta petite fête. 

Il hausse les épaules. Je n’aurais pas insisté en tant normal, mais ce qu’il s’est passé hier a changé quelque chose. Mon cerveau a eu toute la nuit pour dresser un inventaire lugubre des personnes auxquelles je tiens et qui aurait pû se trouver à la place d’Adam. Noah en faisait partie. 

Je le prends par le bras pour l'entraîner avec moi en direction des cuisines. 

— Si je te trouve un truc à manger, tu m'expliques vraiment ? 

— Mais j’ai rien à expliquer… 

— Tu changeras d’avis quand t’aura l’objet de mon chantage sous les yeux. 

Je le laisse patienter dans le couloir alors que je m’infiltre en cuisine, passant par le réfectoire qui n’est jamais verrouillé. Encore une fois, des caméras m’auront peut-être filmée, mais encore une fois, je m’en fiche. Il y a plus important. 

— Alors ? je demande quand je rejoins Noah avec un plateau de petit-déjeuner chargé. Tu parles ou je mange tout ? 

— Finalement j’ai plus envie de vomir que vraiment faim, donc… 

— Mais tu fais chier !

Je m'assois par terre en soufflant. Je n’ai pas faim non plus, mais je descends tout de même la totalité d’une tasse remplie de café pur et immonde pour secouer un peu mon cerveau trop engourdie par ma nuit blanche. Noah finit par s’asseoir à côté de moi, le regard toujours fuyant.

— Comment t’as fait pour qu’Adam descende du bord hier ? 

Sa question me provoque un flashback saisissant. Ils ne s'arrêtent pas depuis hier. Je sens la pluie sur moi et mon cœur battre comme si j’y étais encore, là-haut, face au vide. 

Le pensionnat KeppelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant