Ginger

5-

Le Ministère était tombé.

Ce n'était pas une surprise en soi, ce n'était plus qu'une question de jours — d'heures même — mais l'annonce soudaine, en pleines réjouissances, pendant le mariage Delacour-Weasley, causa une panique immédiate.
Harry resta figé un long moment, le souffle coupé en voyant le mouvement de panique.

Les invités de Fleur et Bill transplanaient, certains pleuraient, d'autres s'agitaient, visiblement indécis. Au milieu de toute cette pagaille, les membres de l'Ordre s'étaient immobilisés, le visage grave, baguette en main. Fleur, une expression décidée sur son beau visage, dans sa magnifique robe de mariée en dentelle, tira sa baguette de son corsage, prête à se battre. Bill, juste à ses côtés avait enlacé leurs doigts, prêt lui aussi.

Soudain, ce fut l'apocalypse.

Les Mangemorts commencèrent à arriver, semant le chaos.

Hermione arriva, remorquant Ron, et agrippa le bras de Harry.
— On doit partir !

Hébété, Harry secoua la tête.
— Mais on doit les aider ! On ne peut pas...
Hermione le coupa, les yeux brillants, décidée. En cet instant, dans sa jolie robe rouge, elle était une déesse guerrière.
— Notre présence les met en danger, Harry. C'est nous... C'est toi qu'ils sont venus chercher. Pour les aider, on doit partir immédiatement, le plus loin possible et se cacher. Et espérer ne pas être repérés.

Ron déglutit, regardant sa famille se battre pour survivre, mais se laissa entraîner par leur amie quand elle les poussa un peu plus loin, dans l'ombre. En entendant les cris de rage et les sorts fuser, Harry grimaça et hocha la tête. Il avait l'impression d'être sonné, de ne plus savoir quoi décider. Sans Hermione pour le soutenir, pour prendre la décision de fuir, il aurait probablement été capturé immédiatement, sous le choc de la débauche de violence.

Hermione inspira profondément et les attira contre elle, yeux fermés. Elle eut un bref sourire, un peu tordu, et marmonna.
— Remerciez mes parents de m'avoir payé mon permis de transplanage.

Puis, ils disparurent du terrier dans un crac sonore, leur départ couvert par le bruit des combats en cours.

Ils arrivèrent en plein Londres moldu, au risque d'être repérés. Cependant, il faisait nuit et personne ne sembla remarquer trois adolescents apparus soudainement sur le milieu de la route, en vêtements de soirée. Si quelqu'un les voyait, il penserait probablement à un groupe de fêtards éméchés, et certainement pas à trois adolescents sorciers poursuivis par un psychopathe.
Ils titubèrent, et Hermione laissa échapper un rire soulagé.
— Je craignais de nous désartibuler. Je n'avais jamais... transplané en emmenant quelqu'un... je... Je ne savais pas où aller, je crois qu'on devrait...

Elle cligna des yeux, regardant rapidement autour d'elle et elle les entraîna dans une ruelle sombre.

Hors de vue, elle souffla doucement et fouilla dans son sac de perles. Harry se souvint qu'elle l'avait toujours sur elle. Voyant le regard de son ami, elle gloussa.
— J'ai lancé un sortilège d'agrandissement dessus. Et un d'allègement. Et je l'ai rempli de tout ce qui pourrait nous servir en cas de départ précipité...

Avec un discret cri victorieux, elle brandit un ballot de vêtements soigneusement pliés et elle le leur lança.
— Ça inclut de quoi se changer !

Ron émit un son incrédule, visiblement admiratif de sa présence d'esprit, tandis que Harry se mit à glousser, soulagé d'un poids.
— Hermione ! Tu es géniale.

Ils se changèrent dans la rue, se tournant le dos pour garder un minimum d'intimité, et rassemblèrent leurs vêtements de fête dans le sac de perles de Hermione. La jeune fille termina d'enfiler un sweat épais et soupira.
— Il doit y avoir un café pas loin. Je connais ce quartier, j'y viens... j'y venais souvent avec mes parents. Je suppose que c'est pour ça que je nous ai conduits ici, je n'ai pas eu le temps de vraiment réfléchir à...

Harry la coupa.
— C'est parfait Hermione. On peut boire un truc chaud et décider de l'endroit où on ira ensuite.

Ron se mordilla la langue.
— On devrait... contacter quelqu'un au Terrier. Juste pour être sûrs qu'ils vont bien. Je veux dire...
Hermione baissa la tête, les larmes aux yeux, et Harry détourna le regard en répondant doucement.
— Ron... mon pote. On ne peut pas. Si on les contacte et qu'ils sont surveillés, ça les mettra en danger. On va devoir faire profil bas quelque temps. Je suis désolé...

Le rouquin était sur le point de protester, mais il se ravisa. L'attaque sur sa maison, l'endroit où il avait grandi, l'avait choqué et il était prêt à tout pour ne pas mettre en danger ses parents et ses frères et sœur. Y compris prêt à endurer la douleur de l'incertitude, à ne pas savoir s'ils étaient blessés ou pire...

Silencieux, les trois amis sortirent de la ruelle, s'assurant d'un coup d'œil qu'ils n'avaient pas été remarqués. Puis, ils s'approchèrent du café illuminé. C'était désert, mais l'endroit leur paraissait terriblement chaleureux.
Hermione fut la première à entrer, saluant la serveuse d'un sourire, suivie de Harry, puis de Ron qui regardait avec curiosité autour de lui. Munis de leurs boissons chaudes, ils s'installèrent à une table, et restèrent silencieux, digérant le choc qu'ils avaient eu.

Ils échangèrent des regards nerveux et Hermione laissa échapper un rire tendu.
— Et maintenant ?

Harry se frotta les yeux, épuisé. Cependant, avant qu'il ne puisse répondre, deux hommes entrèrent.
Les trois adolescents se raidirent et se turent, observant les deux nouveaux arrivants. Ce fut leur méfiance qui leur permit de se rendre compte du danger. Lorsque les deux hommes sortirent leurs baguettes, ils étaient déjà prêts et il leur fallut peu de temps pour les désarmer et les ligoter.

Face aux deux hommes inconscients, Hermione claqua la langue.
— On doit partir d'ici.
Harry gloussa nerveusement. Il ne connaissait pas cette facette de son amie, mais il était plutôt content de l'avoir de son côté. Elle était redoutable et particulièrement efficace.
Ron plissa le nez.
— Qu'est-ce qu'on fait d'eux ?

Harry repensa soudain l'air terrorisé de Malefoy, alors qu'il faisait face à Dumbledore. Ce fut cette image qu'il avait gardée dans sa tête qui l'aida à prendre une décision. Il serra les poings, et il hocha la tête gravement.
— Personne ne doit savoir où ils nous ont vus. Même qu'ils nous ont vus. On va leur effacer la mémoire et partir d'ici au plus vite...

Ron haussa les épaules — il n'allait certainement pas prendre parti pour deux Mangemorts alors qu'il ignorait si sa famille allait bien — et Hermione lui lança un regard en coin, avant de s'avancer en se mordillant la lèvre. Après tout... elle avait de l'entraînement pour les sortilèges d'amnésie, même si ses deux amis ne savaient pas à quel point.