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Étonnement, sortir du Manoir Malefoy fut terriblement simple. Drago, son chat dans les bras, parcourut les couloirs silencieux d'un bon pas, surpris de ne rencontrer personne. Il savait que le manoir n'était pas désert, il avait entendu les cris stupides des Mangemorts un peu plus tôt.
Il décida de ne pas se poser plus de questions — peu importait où ils pouvaient être, tant qu'il était tranquille.

Au moment de passer la porte, il soupira, et se crispa, jetant un bref coup d'œil derrière lui, espérant que ses parents iraient bien.
Sa mère avait semblé confiante lorsqu'elle lui avait assuré qu'ils pourraient se débrouiller sans lui, même s'il choisissait de s'éloigner de la guerre.

Pour autant, il ne comptait pas rejoindre l'autre camp. Il n'était pas un héros, comme il l'avait dit à Ginger. Le monde magique dans son ensemble pouvait bien brûler, ce n'était pas son problème. Il resserra sa prise sur le chat, décidant qu'il espérait quand même que Potter survivrait. La vie serait bien morne sans lui, sans leurs affrontements quasi permanents. Comme avant que tout ne déraille et que son père soit jeté à Azkaban.

En entendant des bruits de voix, Drago, le cœur battant, se dépêcha de quitter le manoir et il traversa le parc à grands pas. Il ne tenait pas à devoir s'arrêter, ou à être obligé de justifier son départ précipité.

Une fois la grille du domaine passée, Drago relâcha son souffle et hocha la tête.
— Blaise n'habite pas loin. Habituellement, je passe pour la cheminette ou ma mère me fait transplaner, mais cette fois on va devoir marcher... Je ne pense pas que ça soit judicieux d'aller sur le chemin de Traverse en premier finalement, autant... te mettre à l'abri directement.

Ils avancèrent sur le chemin de gravillons, bordant la forêt, s'éloignant tranquillement du manoir Malefoy. D'un coup, Ginger se tortilla vivement dans les bras du Serpentard, jusqu'à atterrir souplement au sol. Le blond grogna, agacé.
— Po... Ginger ! C'est quoi ton foutu problème ?
L'air décidé, le chat miaula vivement, et ça sonnait définitivement comme un reproche.


Drago roula des yeux et haussa les épaules, avec un rictus moqueur.
— Tu peux toujours miauler, je ne comprends rien ! Et si tu préfères marcher, libre à toi !
Ginger miaula une fois encore, un peu plus insistant, et Drago ne put s'empêcher de jeter un coup d'œil nerveux autour d'eux, un peu inquiet.

Face à l'hésitation du blond, Ginger attrapa le bas de son pantalon entre ses crocs et le tira, ignorant ses protestations virulentes.
Bien évidemment, le jeune chat n'avait pas la moindre chance de faire bouger l'adolescent en pleine santé qu'était Drago Malefoy. Pas plus qu'il ne risquait de le faire tomber. Mais il était déterminé à le tirer vers lui, et par curiosité Drago suivit le mouvement, avançant dans la direction indiquée par l'animal.

Ginger ne cessa de tirer que lorsqu'ils furent arrivés à la lisière de la forêt, loin du chemin. Drago fronça les sourcils, son regard passant du chat au Manoir Malefoy qui se découpait un peu plus loin, avant de revenir au chemin soigneusement entretenu. Le lieu de passage unique qui permettrait d'arriver chez lui.

D'un coup, il comprit, et lança un regard amusé à Ginger.
— Visiblement, tu as retenu ma leçon sur la prudence à avoir, Ginger... Je suppose que tu veux qu'on marche dans la forêt ?
Le chat s'assit avec un « miaou » satisfait, et commença à faire sa toilette tranquillement.


Drago renifla, et marmonna, vexé d'avoir été rappelé à l'ordre par Potter sur une stupide question de sécurité.
— Je ne suis pas encore fugitif, je te rappelle. Pour l'instant, je me rends juste en compagnie de mon familier chez mon meilleur ami. Après tout, j'ai des courses à faire pour Poudlard, non ?

Ginger émit une fois de plus un miaulement, et Drago aurait pu jurer que c'était l'équivalent félin d'un ricanement moqueur. Si tant était que les chats puissent ricaner. Puis l'animal se leva souplement et commença à progresser avec agilité dans le sous-bois, se glissant sous les branches et évitant les racines alors que Drago, juste derrière, trébuchait régulièrement et se retenait de ne pas hurler de frustration. Il faisait le bruit d'un troupeau d'hippogriffes, et il avait déjà récolté plusieurs griffures en passant sous des ronces. Ses chaussures étaient probablement ruinées, et il transpirait abominablement.

Maudissant les chats et en particulier celui qui trottinait devant lui joyeusement, il avançait péniblement en s'efforçant d'ignorer Ginger quand il s'arrêtait pour lui jeter un coup d'œil. Chaque fois qu'il croisait le regard vert, il imaginait que Potter s'en donnait à cœur joie pour se moquer de lui et de son manque de grâce, et il pouvait presque entendre le rire de la version humaine du Gryffondor. Tout ça ne contribuait pas à améliorer son humeur, et il marmonnait, regrettant déjà de s'être lancé dans une telle entreprise.

Le jeune homme se demandait à quoi il avait pensé pour jeter aux orties tout ce qu'il avait, pour suivre Potter sous la forme d'un foutu chat. Certes, sa situation était loin d'être parfaite, mais il était près de ses parents, qui le protégeaient un minimum. Tant qu'il était étudiant à Poudlard, visiblement, il n'aurait pas d'autre mission en tant que Mangemort.
Quant à devoir tuer, Drago essayait de ne pas penser à la mort de Dumbledore — lorsqu'il n'avait pas pu lancer le sort sur le vieil homme et que son parrain était venu à son secours — ou à la facilité avec laquelle il avait tué un rafleur, alors qu'il avait compris que c'était le seul moyen de sauver Harry Potter.
Il se bornait à se répéter qu'il aurait pu le faire. Suivre les Mangemorts, semer le chaos. Attaquer, détruire. Torturer. Tuer.

Mais la vague de nausée qui le secouait et ses mains moites étaient un bon indicateur du fait qu'il ne pourrait jamais être un Mangemort aussi zélé que sa tante. Il ne pourrait pas faire face à un innocent moldu et le tuer, juste parce qu'il était sur son chemin. Il ne pourrait même pas faire face à l'un de ses camarades de classe, quel qu'il soit, pour l'attaquer et le blesser.
Il n'était pas fait de ce bois-là, et Drago n'arrivait pas à le regretter.

GingerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant