Samedi 4 juillet 2015En trois jours, aucune interaction.
Nous nous évitons royalement et c'est plutôt réussi. Il s'est replongé dans son travail et je m'occupe entre deux services au Scar. Et quand, l'oreille tendue vers le couloir, je décèle un bruit de vie de l'autre côté de la cloison, je patiente sagement jusqu'à ce que la grille de l'entrée couine. Alors, à ce moment j'investis pleinement les lieux.
Je commence à connaître ses petites habitudes. Il part aux aurores, fait quelquefois un saut au loft dans l'après-midi puis soit il rentre vers vingt et une heure trente soit beaucoup plus tard et beaucoup plus éméché si j'en juge par les grognements qu'il lâche en se cognant aux quatre coins des pièces...
Pourtant, je n'arrive pas à lâcher l'affaire, j'ai besoin de savoir pourquoi il se comporte de cette manière avec moi, pourquoi j'ai pu apercevoir son côté pile quelques instants, presque prévenant et attachant et qu'il tente avec assurance de le cacher sous ce côté face, agressif et effrayant.
Siri a beau m'assurer que je ne devrais pas chercher plus loin, c'est plus fort que moi, je ne comprends pas les sautes d'humeur de Jack. Comment peut-il être si accessible, prévenant et concerné et se transformer en dragon l'instant d'après ?
Depuis notre soirée « mouvementée » puis la visite chez sa grand-mère, j'avais l'impression que nous avions franchi un cap, qu'il commençait à m'accepter, à me faire confiance. Je lui ai d'ailleurs avoué des moments difficiles de ma vie, une partie des raisons de ma venue ici et, quand j'ai décelé le malaise en lui, j'aurais aimé qu'il se confie un peu lui aussi, j'aurais peut-être pu l'aider...
Mais ça ne s'est pas passé comme çà.
Jack ne partage pas ses états d'âme, il ne veut pas qu'on s'apitoie, il s'enferme et rejette toute tentative extérieure. Je n'ai jamais connu personne d'aussi froid et déterminé à garder tout le monde à distance.
Siri m'a mise en garde, les raisons de son mutisme sont multiples et elle-même qui le connaît bien n'est pas sûre de tout savoir.
« Il a de bonnes raisons de ne pas vouloir fêter le 4 juillet, tu sais... »
Voilà la seule réponse que j'ai obtenue jusqu'à aujourd'hui.
Alors, peu importe. Si je ne m'avoue pas vaincue, j'ai décidé d'arrêter de cogiter sur le sujet. On verra bien comment les choses évolueront.
En attendant, Dan roupille sur le canapé du salon, une bière à demi vidée. Il est arrivé en fin de matinée et, à sa mine fatiguée, je me doute qu'il ne chôme pas. Mais aux quelques échanges que nous avons eus, je sais qu'il est là où il a envie d'être et qu'il fait exactement ce qui lui plaît.
Inquiet de mon état d'esprit, je ne me suis pas résolue à lui parler de l'appel de Richard, de l'intervention de sa grand-mère, je ne veux pas qu'il se soucie de ça, sa simple présence est un baume sur mes tracas. Mais si jamais Jack lui en parle, je ne sais pas quoi faire...
Ce soir, nous sortons pour célébrer comme il se doit la fête de l'Indépendance américaine. Je suis de service jusqu'à vingt-trois heures au Scar où tous les amis de Dan seront réunis et assisteront au feu d'artifice depuis le toit-terrasse exceptionnellement ouvert. Ensuite, à la fermeture, nous irons ensemble à Sausalito pour finir les festivités en beauté sur une plage qu'ils ont l'habitude de fréquenter.
Sans Jack.
Je soupire en découvrant un message de Granny. Elle m'en m'envoie chaque jour et hier j'ai eu le courage de l'appeler. Elle ne veut pas comprendre mon point de vue, mais elle accepte que j'aie besoin de prendre du recul. Je n'ai pas pu lui dire pour Richard, c'est au-dessus de mes forces. Peut-être me comprendrait-elle mieux ?
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A l'encre de ton coeur
Lãng mạnRose, 21 ans, termine sa troisième année universitaire sur l'île de Skye en Ecosse. Trahie par son petit-ami, en colère contre les obligations familiales, elle est déterminée à ne plus se laisser dicter sa vie. Elle se réfugie chez son frère aîné Da...