Chapitre 24 : Rose

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Lundi 6 Juillet 2015

Quand le moral se fait la malle, j'ai trois options : je laisse la déprime m'envahir, je couche ma mélancolie sur mon PC ou je danse.

Ce matin, mes pointes aux pieds, c'est la troisième que j'ai choisie pour me sentir mieux et chasser le spleen qui me colle à la peau.

Danny est parti à l'aube pour Monterey, Siri travaille, Richard a tenté plusieurs fois de me joindre et Granny m'a laissé un message qui me ramène à mes incertitudes passées.

Mais ce qui me contrarie encore plus c'est de ne pas avoir de nouvelles de Jack. Il n'est pas réapparu depuis sa fuite avec Lexie hier soir.

Où est-il ?

Je ne peux m'empêcher d'imaginer qu'il a couché avec elle.

Mon cerveau carbure à cent à l'heure et est en train de visualiser des scénarios tous plus salaces les uns que les autres.

Je devrais n'en avoir rien à faire. Je le devrais oui.

J'ai un caractère assez tranché, mais je me suis toujours effacée. C'est comme çà que mon éducation m'a polie. Mais avec Jack, je suis à fleur de peau, répondant à chacune de ses attaques, suscitant ses moqueries, depuis le début. On ne fait que s'affronter les trois quarts du temps. Pourtant, les quelques moments où nous avons échangé sans que ce soit la tempête entre nous, j'ai été touchée par ce qu'il provoque en moi.

Comme s'il cachait un trésor d'âme sensible au plus profond de lui. Comme si toute cette couche de crétinisme n'était qu'une façade. Mais, chaque épaisseur de vernis que je gratte se reconstitue presque immédiatement. À chaque fois c'est plus dense, plus dur et impossible d'atteindre les strates inférieures.

Alors là, tout de suite, j'ai besoin d'extérioriser toutes ces émotions négatives, je n'en peux plus de combattre, je veux les expulser et pour ça, rien de mieux que la danse. J'en ressortirais épuisée, apaisée par les endorphines et j'arriverai peut-être à dormir plus de trois heures d'affilée.

Après un échauffement pointilleux, je lance la lecture de ma playlist sur l'enceinte et je m'élance sur la terrasse au son de Castle in the snow de The Avener. J'alterne des mouvements de danse classique avec des enchaînements beaucoup plus contemporains. Mes muscles tirent, mes mains s'élèvent et mon cœur s'emballe. Mon souffle maîtrisé, je me laisse porter par mes émotions, abandonnant mes craintes et hésitations. Tout devient simple, naturel et je ne ressens plus que l'euphorie qui se diffuse dans mes veines. Les yeux fermés, je tourne dans un sens puis dans l'autre avant de me jeter vers le ciel.

Les musiques s'enchaînent et je danse, je danse jusqu'à ne plus avoir la force de mettre un pied devant l'autre. Ces derniers, écrabouillés dans mes pointes, vont m'en faire voir pendant des jours.

Quelques étirements plus tard, j'attrape la bouteille d'eau au sol et me désaltère.

Quand je me redresse, mes yeux rencontrent ceux indéchiffrables de Jack. Posé contre le chambranle de la baie vitrée, ses bras croisés sous ses pectoraux, il me fixe. Depuis combien de temps est-il là ? J'étais tellement inspirée par la musique que je n'ai rien entendu.

— Salut.

— Salut.

— Tu es là depuis longtemps ?

— Suffisamment.

Et son sourire arrogant qui accompagne ses paroles m'agace déjà.

— OK j'ai besoin d'une douche.

A l'encre de ton coeurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant