Chapitre 25 : Jack

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— Mamina, tu m'avais promis !

— Mon chéri, je suis privée de ce plaisir depuis bien trop longtemps !

Malgré mes oppositions à tous ces chichis d'anniversaire, cette année Mamina a réussi à me mettre le grappin dessus. Elle m'a invité à dîner me demandant expressément d'amener la furie et me voilà, il est 21 h 30 et vingt-quatre bougies scintillent devant mes yeux.

Il y a si longtemps que je n'ai pas vu ces étincelles briller dans son regard. Depuis qu'elle nous a récupérés avec Lucy, lorsque nous venions de dire adieu à notre mère, elle a donné tout son temps, son argent et surtout son amour pour rendre un sens à nos vies. Elle a perdu sa chair, son mari puis sa petite-fille, mais elle est encore là, debout devant moi. Elle ne souhaite finalement qu'une seule chose : que je souffle ses vingt-quatre putains de bougies.

Je lui souris, ému de sa dévotion avant que mon regard ne dévie à sa droite, à la place qu'occupe la furie. La bouche ouverte, ses yeux alternent des miens aux flammèches qui surplombent le dessert, elle semble attendre ma décision, suspendue sagement à ma réaction.

Alors sans les faire mariner plus longtemps je prends une grande inspiration et souffle sur le gâteau de toutes mes forces. Malgré les six années qui me séparent de ma dernière tentative, je n'ai pas perdu la main. D'un seul souffle, je réduis à néant la vie de tous ces petits bâtons luminescents.

Comme dans un film, Mamina et Rose applaudissent de concert.

— C'est bon, pas la peine d'en faire des caisses...

— Tu ne peux pas savoir le plaisir que tu me fais mon Jack ! Je suis heureuse de vous avoir tous les deux.

— Moi aussi Mamina, je suis heureux d'être là.

— Je t'aime mon chéri.

Et je la serre fort avant d'embrasser le sommet de son crâne où virevoltent quelques mèches rebelles à l'odeur de talc. J'aime cette femme du plus profond de mon cœur même si je suis conscient de lui en avoir fait voir de toutes les couleurs.

Elle s'écarte et étire ma joue en signe d'affection, comme elle le ferait avec un petit garçon.

Puis elle fait signe à Rose d'approcher pour participer à notre câlin.

— Vient ma jolie Rose, ce soir j'ai envie de vous serrer fort tous les deux !

Et cette adorable sentimentale s'exécute, s'accrochant à nous deux comme une moule à son rocher. Moi, je ne suis même pas gêné, conscient de ma proximité avec la furie, je passe ma main dans sa chute de rein et elle relève ses yeux qui plongent dans les miens. Une fine pellicule rouge recouvre son teint diaphane et je lui souris, amusé.

J'ai presque envie de me foutre de ma propre gueule tellement je deviens sentimental.

Nous nous séparons et Mamina dresse son doigt dans ma direction m'intimant de ne pas bouger.

— Reste ici, j'ai un petit cadeau pour toi.

Elle s'éloigne, sautillant presque de joie malgré sa démarche fatiguée.

Je me tourne vers la furie en levant les yeux au ciel. C'est étrange. N'importe quelle fille aurait envie de s'enfuir devant ces élans d'affection soudains.

— Je suis désolé si elle t'a mis mal à l'aise. Mamina est parfois un peu... étouffante.

— Je la trouve adorable Jack. Elle t'aime beaucoup, en toute simplicité, et n'attend rien en retour. C'est très positif pour moi. Elle n'essaie pas de te contrôler, elle veut juste ton bonheur.

A l'encre de ton coeurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant