Par un vendredi soir d'octobre alors que les squelettes des arbres se déshabillent de leur manteau de feuilles, je presse le pas pour ne pas arriver en retard chez moi. Mon arrêt de bus n'est qu'à quelques enjambées de notre petit quartier tranquille. Il faut dire que dans notre village en périphérie de la ville les soirées sont bien souvent insipides et silencieuses, parfois troublées par les rires et cris des enfants.
Cette entente cordiale n'est que le fin voile qui couvre en réalité un monde bien plus sombre et ingrat que tout ce que l'imagination peut imaginer.
En toquant à la porte je patiente quelques secondes avant de comprendre que cette dernière est fermée. Ruminant dans la barbe que je ne possède pas je tâte mes poches à la recherche de mes clefs et déverrouille maladroitement la serrure en tournant d'abord dans le mauvais sens. Comme toujours.
Une fois ouverte je débouche dans le grand hall d'entrée et essuie maniaquement mes pieds sur le tapis en poils synthétiques marrons.
Ma mère m'accueille dans le couloir avec un grand sourire. C'est une femme magnifique dont la gentillesse n'a d'égal que sa grandeur d'âme. Son visage est usé par le temps, ses mains fatiguées. Ses cheveux toujours attachés, elle tente de garder un minimum de classe en permanence. Je l'admire comme tout enfant admire ses parents, une maman c'est précieux. Sans elle ... Sans elle que pourrais-je faire ?
Me faisant sursauter mon père me serre dans ses bras lorsque je traverse le salon. Un frisson de dégoût longe ma colonne vertébrale. Il semble bien inoffensif mais ce comportement ne trompe personne, je ne doute plus.
Avec une lenteur exaspérante je me dirige vers la cuisine sans dire un mot et saisis la brioche en sachet, qui trône sur la table de la cuisine, que je fourre dans mon sac, sachant pertinemment que je n'aurais pas le courage de descendre pour le dîner.
Ma mère me serre une fois contre elle et je ne peux m'empêcher de lui murmurer, pour la rassurer mais surement également pour me rassurer moi-même.-Maman .... si jamais ....
Ma voix retombe sur la fin de la phrase. Je suis bien incapable d'agir, je ne peux pas interférer dans cette crise familiale, je ne sais pas comment gérer un tel fardeau.
-Ne t'oppose pas à ton père ma chérie.
J'ouvre plusieurs fois la bouche sans rien dire, puis fronce les sourcils en serrant des poings.
La colère me gagne, ma respiration se fait plus courte.-Tu es horrible, râlais-je vexée qu'elle ne veuille pas de mon aide.
-Monte dans ta chambre, si tu as envie viens dîner avec nous, ignore-t-elle ma répartie avec un sourire rassurant.
En déglutissant j'accepte à contre cœur et monte dans ma chambre. Grimper l'escalier de bois me parait aussi long que de gravir les étages de la Tour Eiffel.
Ma chambre n'est pas très grande, elle se compose d'un lit deux places, d'un bureau de bois recouvert d'une peinture blanche fatiguée et d'une penderie qui donne sur une petite bibliothèque secrète. C'est là que j'aime me réfugier, principalement parce que les livres sont la seule porte qui nous permet d'accéder à des mondes fantastiques mais aussi parce que c'est le lieu le plus calme et réconfortant de cette maison entière.
Fatiguée de cette journée qui ne semble pas se finir, je saisis mon plaid vert kaki orné de motifs militaires et me mets en pyjama. J'attrape également au passage trois coussins et ma brioche. Avec toutes mes affaires je me dirige vers la bibliothèque, en manquant à deux reprises de m'étaler sur la moquette à cause de ce fichu plaid qui s'enchevêtre entre mes pieds, et referme mon armoire.
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Neverland
FanfictionAvez-vous déjà rencontré Peter Pan ? Les contes décrivent un jeune homme de 14 ans souhaitant vivre loin des problèmes de la vie. Mais si tout était faux ? Si Peter Pan était un garçon bien plus âgé, narcissique et obstiné ? --Correction en cours--